UNE « SOCCER MOM » DOMPTE L’EXTRÊME
Une mère de trois garçons a bravé l’un des plus difficiles triathlons au monde
Bianca Drolet souhaitait « mettre du piquant » dans sa vie déjà bien remplie. L’éducation de ses trois garçons ne l’avait pas envoyée au tapis. Cette mère monoparentale et travailleuse autonome cherchait à affronter l’adversité et... « frapper son mur ».
Ce mur, c’était le Norseman, un triathlon extrême organisé en Norvège. Les 290 athlètes nagent 3,8 km, pédalent 180 km sur des routes montagneuses et courent 42,2 km avant de franchir le fil d’arrivée au sommet de la « zombie hill », le mont Gausta culminant à 1883 mètres d’altitude.
Même les organisateurs de l’épreuve le déconseillent. « Ce n’est pas pour toi. Ce n’est rien de personnel, peuton lire sur la brochure descriptive de l’événement. C’est une course pour les battants. »
UN EXEMPLE POUR SES FILS
Malgré les avertissements, Bianca Drolet s’identifiait à cette épreuve. Elle voulait livrer l’une des plus grandes batailles de sa vie sportive.
« Je craignais vraiment de ne pas être en mesure de rejoindre le fil d’arrivée. C’est ce qui m’intéressait. J’ai eu la chance d’essuyer peu d’échecs dans ma vie, raconte la professionnelle des ressources humaines. Les échecs et l’adversité sont très formateurs. Ils nous permettent de gagner en humilité et résilience. »
Dans ses objectifs, elle souhaitait aussi agir d’exemple pour ses fils et les membres de sa famille, mais également oser et ne pas entretenir de regrets plus tard.
« Je suis une femme raisonnable et rationnelle. Cette course-là, c’est tout le contraire. C’était mon premier et probablement mon dernier triathlon extrême », confirme-t-elle avec humour en entrevue avec Le Journal.
Le Norseman se caractérise, entre autres, par ce qui est reconnu comme la portion de natation d’un triathlon la plus difficile au monde. Pourquoi ? Car les participants doivent se jeter d’un bateau au large du fjord et rejoindre le rivage 3,8 km plus loin. La température de l’eau oscille rarement au-delà de 10 degrés Celsius.
Pour la Québécoise âgée de 42 ans, franchir cette distance avant le temps limite de 2 h 15 min représentait son plus gros défi.
PREMIÈRE VICTOIRE
Dans le doute, elle avait demandé à ses garçons, qui l’ont accompagnée dans cette aventure, de conserver la chambre d’hôtel jusqu’à la dernière minute.
Elle est plutôt sortie de l’eau au bout de 115 minutes. « J’étais estomaquée. C’était au-delà de toutes mes attentes. »
Malgré quelques petits pépins logistiques, elle a rattrapé un peu de temps en vélo et à la course.
« Je n’avais jamais fait une aussi longue distance [après] deux heures de nage, et quatre heures de course [m’attendaient]. Dans le froid et les intempéries, je crois que j’ai réussi à bien gérer mon défi. » Elle a finalement arrêté le chrono à 14 h 43 min.
MUR INEXISTANT
En réfléchissant aux motivations qui l’ont amenée en Norvège, la femme, se décrivant sympathiquement comme une mère de famille et une « soccer mom » plutôt qu’une athlète d’endurance, estime « avoir survolé son mur ».
« J’ai réalisé qu’il est intangible. On le place où on le veut bien. On ne peut vraiment jamais l’atteindre, car c’est une question d’attitude. Ce mur n’existe pas si tu ne veux pas qu’il existe. Ça ne sert à rien de le chercher, car je crois qu’il est introuvable. Chaque épreuve rend plus fort et tolérant. »
AU DIABLE LES FINANCES
S’investir physiquement pour se lancer dans une épreuve comme le Norseman ne vient pas sans d’autres sacrifices. En plus de multiplier les heures d’entraînement tout en s’occupant de ses garçons, Bianca Drolet a mis la hache dans ses heures de travail.
En pleine période d’inflation et d’augmentation du coût de la vie, elle n’a pas reculé. En faisant la somme de toutes les dépenses, on devine que l’aventure a coûté une « beurrée ».
« Je préfère me dire que j’ai pu me le permettre. C’était une année folle, mais une année d’une richesse inestimable. »