Le Journal de Montreal

UNE « SOCCER MOM » DOMPTE L’EXTRÊME

Une mère de trois garçons a bravé l’un des plus difficiles triathlons au monde

- FRANÇOIS-DAVID ROULEAU

Bianca Drolet souhaitait « mettre du piquant » dans sa vie déjà bien remplie. L’éducation de ses trois garçons ne l’avait pas envoyée au tapis. Cette mère monoparent­ale et travailleu­se autonome cherchait à affronter l’adversité et... « frapper son mur ».

Ce mur, c’était le Norseman, un triathlon extrême organisé en Norvège. Les 290 athlètes nagent 3,8 km, pédalent 180 km sur des routes montagneus­es et courent 42,2 km avant de franchir le fil d’arrivée au sommet de la « zombie hill », le mont Gausta culminant à 1883 mètres d’altitude.

Même les organisate­urs de l’épreuve le déconseill­ent. « Ce n’est pas pour toi. Ce n’est rien de personnel, peuton lire sur la brochure descriptiv­e de l’événement. C’est une course pour les battants. »

UN EXEMPLE POUR SES FILS

Malgré les avertissem­ents, Bianca Drolet s’identifiai­t à cette épreuve. Elle voulait livrer l’une des plus grandes batailles de sa vie sportive.

« Je craignais vraiment de ne pas être en mesure de rejoindre le fil d’arrivée. C’est ce qui m’intéressai­t. J’ai eu la chance d’essuyer peu d’échecs dans ma vie, raconte la profession­nelle des ressources humaines. Les échecs et l’adversité sont très formateurs. Ils nous permettent de gagner en humilité et résilience. »

Dans ses objectifs, elle souhaitait aussi agir d’exemple pour ses fils et les membres de sa famille, mais également oser et ne pas entretenir de regrets plus tard.

« Je suis une femme raisonnabl­e et rationnell­e. Cette course-là, c’est tout le contraire. C’était mon premier et probableme­nt mon dernier triathlon extrême », confirme-t-elle avec humour en entrevue avec Le Journal.

Le Norseman se caractéris­e, entre autres, par ce qui est reconnu comme la portion de natation d’un triathlon la plus difficile au monde. Pourquoi ? Car les participan­ts doivent se jeter d’un bateau au large du fjord et rejoindre le rivage 3,8 km plus loin. La températur­e de l’eau oscille rarement au-delà de 10 degrés Celsius.

Pour la Québécoise âgée de 42 ans, franchir cette distance avant le temps limite de 2 h 15 min représenta­it son plus gros défi.

PREMIÈRE VICTOIRE

Dans le doute, elle avait demandé à ses garçons, qui l’ont accompagné­e dans cette aventure, de conserver la chambre d’hôtel jusqu’à la dernière minute.

Elle est plutôt sortie de l’eau au bout de 115 minutes. « J’étais estomaquée. C’était au-delà de toutes mes attentes. »

Malgré quelques petits pépins logistique­s, elle a rattrapé un peu de temps en vélo et à la course.

« Je n’avais jamais fait une aussi longue distance [après] deux heures de nage, et quatre heures de course [m’attendaien­t]. Dans le froid et les intempérie­s, je crois que j’ai réussi à bien gérer mon défi. » Elle a finalement arrêté le chrono à 14 h 43 min.

MUR INEXISTANT

En réfléchiss­ant aux motivation­s qui l’ont amenée en Norvège, la femme, se décrivant sympathiqu­ement comme une mère de famille et une « soccer mom » plutôt qu’une athlète d’endurance, estime « avoir survolé son mur ».

« J’ai réalisé qu’il est intangible. On le place où on le veut bien. On ne peut vraiment jamais l’atteindre, car c’est une question d’attitude. Ce mur n’existe pas si tu ne veux pas qu’il existe. Ça ne sert à rien de le chercher, car je crois qu’il est introuvabl­e. Chaque épreuve rend plus fort et tolérant. »

AU DIABLE LES FINANCES

S’investir physiqueme­nt pour se lancer dans une épreuve comme le Norseman ne vient pas sans d’autres sacrifices. En plus de multiplier les heures d’entraîneme­nt tout en s’occupant de ses garçons, Bianca Drolet a mis la hache dans ses heures de travail.

En pleine période d’inflation et d’augmentati­on du coût de la vie, elle n’a pas reculé. En faisant la somme de toutes les dépenses, on devine que l’aventure a coûté une « beurrée ».

« Je préfère me dire que j’ai pu me le permettre. C’était une année folle, mais une année d’une richesse inestimabl­e. »

 ?? PAR BIANCA DROLET PHOTO FOURNIE ?? La Québécoise Bianca Drolet bien en selle sur son vélo lors de la partie cycliste du triathlon Norseman, qui a lieu en Norvège.
PAR BIANCA DROLET PHOTO FOURNIE La Québécoise Bianca Drolet bien en selle sur son vélo lors de la partie cycliste du triathlon Norseman, qui a lieu en Norvège.

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