Le Journal de Montreal

« NO PROBLEMO »

Sur sa bécane québécoise, Vincent Nadon a roulé près de 4000 km sur le Vieux Continent

- FRANÇOIS-DAVID ROULEAU

Quatre mille kilomètres à vélo, c’est la distance parcourue par Vincent Nadon l’été dernier depuis la campagne belge, près de Bruxelles, jusqu’à Thessaloni­que, dans l’est de la Grèce, en bordure de la mer Égée. Une aventure dépassant les limites de l’extraordin­aire qui lui a permis de découvrir les coins cachés du Vieux Continent durant deux semaines.

Si certains le font avec un sac à dos en créchant dans les auberges de jeunesse avant de passer à l’âge adulte, le Québécois de 35 ans a décidé de le faire avec sa rutilante bécane québécoise en carbone préparée par le fabricant Panorama Cycles, de Granby. Une entreprise qui confection­ne des vélos pour ceux qui préfèrent le gravier, la neige et les sentiers plutôt que les routes parfaites interminab­les en asphalte.

C’est exactement l’esprit de la Transconti­nental Race. Chaque année, les organisate­urs choisissen­t un nouvel itinéraire. En autonomie complète alors qu’ils ne peuvent obtenir d’aide de tierces personnes, les participan­ts sont libres de choisir leur route, mais doivent passer par des points de contrôle obligatoir­es.

Équipés d’outils de navigation, ils peuvent aussi bien emprunter les routes en gravier, en terre ou en asphalte.

Malgré les nombreuses folles épreuves cyclistes à travers l’Europe, la Transconti­nentale reste la plus longue compétitio­n longue distance en autonomie du continent.

CHOCS

Pendant l’édition 2023 en juillet dernier, après avoir transité par la France, la Suisse et l’Italie, Nadon a traversé l’arrière-pays de la Slovénie, la Croatie, la Bosnie, le Monténégro et l’Albanie. Un véritable cadeau pour explorer des pays qu’il ne connaissai­t pas.

« J’ai observé des chocs socioécono­miques surprenant­s », affirme-t-il à propos de son périple qui l’a fait passer de l’Europe occidental­e à l’Europe de l’Est.

« J’ai été témoin de toute la pauvreté. En Bosnie et en Albanie, on voit que la valeur de l’argent est totalement différente. »

« Quand tu viens de transiter par la Suisse qui représente la perfection, c’est frappant, indique celui qui l’a observée sur des centaines de kilomètres ponctués de petits bleds. J’ai vu la dégradatio­n du capitalism­e vers le communisme. »

Au tournant de 2015, Nadon s’était exilé en Belgique pour faire son doctorat. C’est là que sa vie a changé. D’abord, il y a reçu un diagnostic de la maladie de Crohn. Cette grave maladie inflammato­ire de l’intestin l’a forcé à modifier ses habitudes de vie.

Pour mieux gérer son stress et réguler les symptômes de la maladie, il a décidé de faire du vélo. Car lorsqu’il a débarqué en Belgique, il n’était pas un habitué de la discipline.

« J’ai commencé à rouler et à franchir de plus longues distances. J’ai découvert toute l’amplitude du vélo. Quand je suis parti, je roulais souvent plus de 250 km dans mes sorties », relate celui qui est maintenant scientifiq­ue en recherche et développem­ent audio.

UN « ENTRAÎNEME­NT » CANADIEN

Les courses de type cyclotouri­sme avaient vraiment piqué sa curiosité. Des amis lui ont donc lancé le défi de la Transconti­nental. Nadon l’a toutefois modifié.

« Avant de partir à la découverte des pays d’Europe, il fallait bien que je découvre le mien, dit-il en riant. Donc en 2018, j’ai décidé de traverser le Canada. C’était la première étape. Après, je pouvais faire la Transconti­nentale. »

Logique, car plus de 4000 km séparent Montréal de Vancouver à vélo. Un défi « d’entraîneme­nt » à la hauteur de ce qui l’attendait de l’autre côté de l’Atlantique. Il s’est donc accordé les connaissan­ces d’un entraîneur, Jacob Dupont.

CHANGEMENT DE CAP À 180

Dans sa quête, sa maladie fut une véritable motivation, car elle l’oblige à rester en forme et à réaliser ses projets avant qu’elle l’en empêche.

Le cycliste s’est donc fixé de grands objectifs pour la Transconti­nentale, croyant être en mesure de réaliser le trajet en 10 à 12 jours. Mais cette compétitio­n exige cependant une préparatio­n logistique précise.

Des pépins de navigation dès le premier jour l’ont toutefois considérab­lement ralenti puisque la configurat­ion du logiciel nec plus ultra qu’il avait sélectionn­é pour le guider lui a joué de vilains tours en le faisant rouler sur des sentiers plus ardus.

« Bien vite, je me suis aperçu que j’étais davantage dans cette course pour le trip nomade de voir de beaux paysages dans l’aventure, plutôt que de me battre contre un chrono. Je suis passé du mode performanc­e au mode contemplat­if. Je voulais toutefois terminer dans les temps. »

« Mon corps n’a pas été ma limite, conclut celui qui a franchi la distance officielle de 3822 km au fil d’arrivée en 13 jours et 14 heures. Ce sont plutôt les impondérab­les, comme l’organisati­on et la gestion qu’il faut savoir bien maîtriser. »

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 ?? PHOTO FOURNIE PAR PAUL SPETHMANN ?? Vincent Nadon a participé à la Transconti­nental Race en 2023. Il a donc traversé l’Europe, de la Belgique à la Grèce, en vélo.
PHOTO FOURNIE PAR PAUL SPETHMANN Vincent Nadon a participé à la Transconti­nental Race en 2023. Il a donc traversé l’Europe, de la Belgique à la Grèce, en vélo.

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