Le Journal de Montreal

QUAND UNE BOÎTE À LETTRES DEVIENT UNE CRÉATURE NOCTURNE

- STÉPHANE CADORETTE

Les longues heures d’efforts soutenus jumelées au manque flagrant de sommeil dans le cadre de l’épreuve Race Across America ont poussé Sébastien Sasseville jusque dans des phases hallucinat­oires.

Aujourd’hui, l’athlète émérite peut en rire. Sur le coup, il fallait plutôt apprendre à vivre avec cette drôle de bête qui envahissai­t soudaineme­nt ses pensées.

C’est à compter des jours 5, 6 et 7 de son périple de 12 jours à travers les États-Unis que le subconscie­nt de Sasseville s’est mis à lui jouer des tours.

Plus particuliè­rement pendant la nuit, quand le corps se mettait à rêver d’un brin de sommeil réparateur et que l’esprit en venait à divaguer.

« On ne parle pas d’une perte de contrôle totale, mais tu vois des choses en avant. Tu es dans les lumières du véhicule de chasse qui te suit. Tu passes à côté de buissons et de boîtes à lettres, puis soudaineme­nt à 100 mètres, la boîte à lettres peut devenir une créature », raconte le cycliste en revenant sur ses hallucinat­ions du moment.

EN TOUTE CONSCIENCE

Sasseville affirme qu’il était conscient de se retrouver dans un monde imaginaire, mais qu’il n’y pouvait rien.

« Ce n’était jamais rose, c’était plutôt diabolique et noir, mais quand tu passais à côté, tu voyais bien que ça redevenait une boîte à lettres », rigole-t-il.

« Moi, je prenais conscience que le show partait et je l’accueillai­s au lieu de me secouer la tête et de refuser ce qui se passait. J’étais capable de me dire que presque personne n’était prêt à aller jusque-là. Il faut réaliser que tu as choisi d’être là et que tu es chanceux d’être là, même quand tu commences à halluciner des choses. »

PROCHE DE L’ABANDON

Ces épisodes hallucinat­oires n’étaient en fait que la pointe de l’iceberg. C’est vraiment au jour 9 que le corps et la tête sont tombés et que Sébastien Sasseville a songé à tout larguer.

« J’ai carrément craqué. J’étais en larmes. Tout le monde faisait son travail de façon admirable et je laissais tomber tout le monde », explique-t-il.

« Tout ce qui me restait comme jeu en termes d’heures, mon équipe m’a fait dormir. On m’a expliqué ce qu’il fallait accomplir dans les 24 prochaines heures et psychologi­quement, l’esprit est ensuite revenu. La première heure, je n’avais aucun autre objectif que de m’activer en me bougeant les jambes. Peu à peu, j’ai senti que ça allait passer. Si l’équipe m’avait écouté au jour 9, on n’aurait jamais fini la course. »

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