Demandeurs d’asile : des délais « criminels », dit un ancien ministre libéral
On s’en souvient, celui-ci a déjà accusé celui-là de « souffler sur les braises de l’intolérance ». Reste que, en 2018, sur la question des demandeurs d’asile, il tenait pratiquement le même langage que son successeur caquiste.
QUATRE MINISTRES
Avril 2018 : la situation au chemin Roxham s’aggrave. Le nombre de demandeurs d’asile (DA) entrés au Dominion de manière irrégulière atteint des sommets. 91 % transitent par le Québec. Comme aujourd’hui, ça coûte cher au trésor québécois et Ottawa fait la sourde oreille.
Quatre ministres du gouvernement Couillard se fendent d’une grande conférence de presse pour servir un ultimatum au fédéral. Les ressources sont « saturées ». La « capacité d’accueil » a atteint sa limite.
Les portefeuilles représentés sont pratiquement les mêmes qu’à la récente conférence de presse caquiste. À l’époque, c’était :
David Heurtel, Immigration. Mardi dernier, C. Fréchette.
Jean-Marc Fournier, Relations canadiennes. Mardi dernier, J.-F. Roberge.
Sébastien Proulx, Éducation. Mardi dernier, B. Drainville.
Lucie Charlebois, ministre déléguée à la Santé.
Il y a six ans, les chiffres sont bien moindres (25 510 DA au Québec en 2017 contre 65 330 en 2023), mais le vocabulaire et les constats sont aussi dramatiques.
En 2018 comme en 2023, les ministres soulignent que le Québec doit assumer des frais croissants pour « l’aide de dernier recours, l’hébergement, les soins de santé, l’éducation, l’aide juridique ».
COÛTS ÉNORMES
La facture de 2017 est estimée à 146 millions $. La semaine dernière, la ministre Fréchette a soutenu que pour les années de 2021 à 2023, c’est « un total de plus de 1 milliard $ que le fédéral doit rembourser au Québec ».
En 2018, le PM Couillard, en chambre, soutient que la situation est alarmante dans le secteur scolaire. Il parle de 2500 élèves de plus par rapport à 2018 : « C’est comme s’il y avait cinq écoles de plus ! »
En 2023 ? Le ministre Drainville parlait, la semaine dernière, de l’équivalent de « 52 écoles primaires dédiées à l’accueil et à la francisation ».
DÉLAIS « CRIMINELS »
En 2018, les ministres libéraux soulignaient que le Québec recevait plus que son lot de DA en raison de la géographie, mais aussi de l’attrait de son panier de services incomparable à celui du Canada. Cela est toujours vrai en 2023.
David Heurtel, en entrevue à mon micro à QUB jeudi, disait comprendre les réclamations du gouvernement Legault. Sauf sur un aspect : « Je ne crois pas que ça mette en péril la nation ».
Selon lui, le coeur du problème est la « grossière négligence » du gouvernement Trudeau, qui n’a rien fait pour réduire les délais de traitement des DA. La norme, c’était de traiter les cas en 60 jours. En 2018 comme en 2023, ça prend cinq ans ! Une période d’attente pendant laquelle les DA, inévitablement, s’installent.
« Sans ces délais, on n’aurait pas toute cette pression sur nos services ! » Une fois l’entrevue terminée, celui qui est retourné à la pratique du droit ajoute un qualificatif : l’inaction du gouvernement Trudeau face à cela, c’est « criminel » !