La tendance à l’improvisation de Legault se poursuit
On aurait cru que François Legault et son équipe seraient revenus de leurs vacances des Fêtes fin prêts à reprendre le contrôle de l’« agenda » politique perdu du gouvernement caquiste.
On aurait cru qu’avec la chute jusqu’ici tenace de la CAQ dans les sondages, le premier ministre aurait suivi ses propres conseils donnés à ses troupes en début d’année : plus de discipline, plus de cohérence et moins de distractions.
Or, ce n’est pas encore chose faite. Sauf pour quelques bons coups du ministre de la Santé, la tendance de la dernière année à l’improvisation sévit toujours.
Dans le dossier Nothvolt, son ministre Pierre Fitzgibbon s’en est aussi pris vertement aux médias et aux écologistes. Rajoutant une couche, M. Legault, comme s’il arrivait dans une maternelle, s’est présenté aux journalistes armé d’une pomme, d’une orange et d’une banane.
Son but : leur « expliquer » qu’il ne faudrait pas mélanger un projet immobilier défunt avec la construction de l’usine Northvolt. Un geste inutile et infantilisant.
Retournant à leur bureau, lui et ses conseillers en ont même ri ouvertement avec les caméras présentes. De toute évidence, quelque chose ne tourne pas rond.
Le premier ministre peine aussi à trouver ses repères face au fédéral. Talonné par le Parti Québécois et son projet souverainiste revampé, on le voit de plus en plus mal à l’aise.
PRIS ENTRE L’ARBRE ET L’ÉCORCE
Comment porter à la fois ses habits d’« autonomiste » et son costume de « Capitaine Canada » ? Coincées entre l’arbre fédéraliste et l’écorce autonomiste, ses demandes à Justin Trudeau, intraitable, restent lettre morte.
Y compris dans le dossier des demandeurs d’asile. Bref, plusieurs attendent que le « vrai » François Legault se lève.
Pour muscler son côté autonomiste, il ne peut même pas tenir un référendum sectoriel sur l’obtention des pleins pouvoirs en immigration. S’il en déclenchait un, il le gagnerait certes. Son vrai problème est cependant ailleurs.
Car s’il est vrai qu’un renvoi de la Cour suprême obligerait le fédéral à négocier à la suite d’un référendum gagné par une province, il n’y a toutefois aucune obligation de résultat. Ce qui tombe sous le sens.
C’est pourquoi risquer de se faire refuser les pleins pouvoirs en immigration par Justin Trudeau ou un jour, qui sait, par Pierre Poilievre, serait une défaite politique majeure pour la CAQ.
JOUER LE JEU
Voyant M. Legault coincé, Marc Tanguay, chef intérimaire des libéraux, a donc pris plaisir à lui conseiller de s’inspirer de Jean Charest, ex-premier ministre libéral et fier créateur du Conseil de la fédération.
Dit autrement, que M. Legault assume pleinement son option fédéraliste en acceptant lui aussi de forger des alliances avec ses homologues provinciaux.
Pour Marc Tanguay, dont le parti croupit à 7 % chez les francophones, c’est surtout une manière de rappeler le piège politique qu’est la double position autonomiste-fédéraliste du premier ministre.
Car il n’est pas sans savoir que la seule mention du nom de Jean Charest donne de l’urticaire à M. Legault.
En octobre dernier, il s’était même écrié : « Y a-t-il quelque chose de plus insultant que de se faire traiter de Jean Charest ? »
Le tout se passe, comme on le sait, sur fond de services publics en désarroi. D’une crise du logement que la nouvelle loi sur l’habitation de sa ministre France-Élaine Duranceau aggravera d’autant. Sans compter une communication politique confuse.
Ce gouvernement a vraiment besoin de se faire une tête sur la suite des choses. Loin des caméras. Au Québec, on appelle ça un lac-à-l’épaule...