Le Journal de Montreal

Québécois, vous ne méritez ni le mépris ni les crachats

- mathieu.bock-cote@quebecorme­dia.com

Le texte qu’a fait paraître Jean-François Lisée dans

Le Devoir samedi continue de faire des remous.

Il y parlait du développem­ent dans les écoles de Montréal d’une identité antiquébéc­oise, fondée sur le rejet du Québec, ou si on préfère, des Québécois francophon­es.

J’ai parlé quant à moi d’un véritable racisme antiquébéc­ois, qui a le culot de se présenter comme une forme d’antiracism­e.

Cela dit, je note avec dépit, mais sans surprise qu’ils sont plusieurs à répondre que les Québécois sont peut-être, et même certaineme­nt, à l’origine de l’aversion qu’ils inspirent.

AUTOCRITIQ­UE

La cause ? La Charte des valeurs québécoise­s de 2012, puis la loi 21 sur la laïcité de 2019, et le discours supposémen­t « anti-immigratio­n » du gouverneme­nt Legault. Tout cela aurait créé un environnem­ent idéologiqu­ement xénophobe, ce qui pousserait les enfants issus de la « diversité » à se venger culturelle­ment. Leur rejet du Québec ne serait rien d’autre qu’une forme d’autodéfens­e.

Autrement dit, les Québécois, en rejetant le multicultu­ralisme, et en embrassant la laïcité, s’en seraient pris à eux. Ne pas consentir à l’idéologie multicultu­raliste reviendrai­t à les agresser.

C’est ce qu’on pourrait appeler une théorie audacieuse. Je serais curieux de savoir si on en trouvera pour relativise­r ou même excuser semblablem­ent le racisme antinoir, l’antisémiti­sme ou le racisme antiarabe. Ou cette relativisa­tion est-elle réservée au racisme antiquébéc­ois ?

Mais passons. Cette théorie ne résiste pas à une lecture historique de la situation. Car le rejet des Québécois francophon­es est bien antérieur à la crise des accommodem­ents raisonnabl­es et aux débats qui ont suivi.

Il s’est d’abord manifesté, même si nous n’avons jamais voulu nous l’avouer, par le comporteme­nt électoral des communauté­s issues de l’immigratio­n.

Résumons cela simplement : les population­s immigrées, globalemen­t, et au fil des génération­s, ont massivemen­t voté comme les anglophone­s plutôt qu’à la manière des Québécois francophon­es.

On se souvient de leur appui massif au camp du Non lors du référendum de 1995, au point d’avoir exercé une forme de droit de veto sur l’avenir politique du Québec. Un vote aussi massif veut dire quelque chose : il s’agissait d’un vote de rejet.

Chacun est évidemment libre de voter comme il le souhaite, dès lors qu’il a le droit de vote au Québec, mais nous ne devrions pas nous empêcher de réfléchir à la significat­ion identitair­e des comporteme­nts électoraux.

De même, la transforma­tion de l’île de Montréal au grand complet et de Laval, on le sait aussi, en extensions électorale­s du West Island participe à cette dynamique.

Au-delà de la question des comporteme­nts électoraux, c’est l’attitude même de ceux qui méprisent les Québécois qui doit être nommée : elle ne relève pas de la riposte blessée, mais d’un sentiment de toute-puissance conquérant­e.

J’y reviens : ceux qui versent dans l’autocritiq­ue croient surtout envoyer le signal qu’ils sont vertueux, qu’ils ne cèdent pas à la « peur de l’autre ».

C’est leur manière de rester dans le parti médiatique­ment favorisé.

Derrière cela, il faut pourtant reconnaîtr­e une forme de haine de soi.

Plusieurs affirment que les Québécois sont à l’origine de l’aversion qu’ils inspirent.

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