Le Journal de Montreal

Le Canada perd un très grand homme d’État

L’ancien premier ministre du pays jusqu’en 1993 est décédé hier à l’âge de 84 ans

- – Avec Clara Loiseau

AGENCE QMI | L’ancien premier ministre du Canada Brian Mulroney s’est éteint, hier, à l’âge de 84 ans, laissant derrière lui un important legs politique et économique.

« Au nom de ma mère et de notre famille, c’est avec une grande tristesse que nous annonçons le décès de mon père, le très honorable Brian Mulroney, le 18e premier ministre du Canada. Il est mort paisibleme­nt, entouré de sa famille », a fait savoir Caroline Mulroney, sa fille, sur le réseau social X.

M. Mulroney était affaibli par la maladie, alors qu’il avait des problèmes cardiaques et avait déjà dû combattre un cancer.

En plus de ses deux mandats comme premier ministre du Canada de 1984 à 1993, Brian Mulroney a porté de nombreuses casquettes telles que celles d’avocat, homme d’affaires et philanthro­pe.

Jusqu’à son décès, il siégeait à la présidence du conseil d’administra­tion de Québecor.

À travers le Québec et le Canada, les politicien­s et anciens collaborat­eurs ont tenu à rendre hommage à ce dirigeant hors pair.

« Il n’a jamais cessé de travailler pour les Canadiens et a toujours cherché à faire de ce pays un endroit meilleur où il fait bon vivre. Il était généreux, dévoué et très passionné par son travail », a déclaré Justin Trudeau, premier ministre du Canada.

MEMBRE DU PPC À 16 ANS

Né en 1939, à Baie-Comeau, sur la CôteNord, Brian Mulroney est parti réaliser ses études secondaire­s dans un pensionnat du Nouveau-Brunswick.

Dès 1955, il a étudié les sciences politiques à l’Université Saint-Francis-Xavier, en Nouvelle-Écosse.

C’est là-bas qu’il a commencé à s’intéresser à la vie politique et qu’il a décidé d’adhérer au Parti progressis­te-conservate­ur à l’âge de 16 ans.

Ce n’est qu’en 1961 que le jeune Québécois est retourné au Québec pour suivre des études en droit à l’Université Laval.

Avec son diplôme tout juste en poche en 1964, il commence sa carrière dans un grand cabinet d’avocats montréalai­s.

Il a alors eu l’occasion de représente­r de grandes entreprise­s comme la Compagnie minière IOC ou encore la Power Corporatio­n of Canada lors de négociatio­ns collective­s.

Il n’oublie pas pour autant son engagement politique. Dans les années 1970, il est notamment l’organisate­ur conservate­ur en chef et responsabl­e des campagnes de financemen­t du parti au Québec.

SOMMET DE SA CARRIÈRE

En 1976, il est considéré pour obtenir la direction du Parti progressis­te-conservate­ur, mais est défait lors du scrutin. C’est Joe Clark qui remporte la mise.

L’échec ne l’empêche pas de devenir vice-président de la Compagnie minière IOC, puis président dès l’année suivante jusqu’en 1983.

Brian Mulroney n’abandonne jamais l’idée d’une carrière en politique et retente sa chance en 1983 pour obtenir la direction du Parti conservate­ur, qu’il remporte

face au même Joe Clark. Élu aussi député de Central Nova, il sera alors le chef de l’opposition.

C’est en 1984 que l’homme politique est propulsé au poste de premier ministre, après avoir obtenu le plus grand nombre de députés de l’histoire avec 211 sièges sur 282.

« C’était un des rares politicien­s qui a pu créer une coalition pancanadie­nne et avoir des députés dans l’Ouest canadien, en Ontario et au Québec. On tient ça pour acquis, mais c’était assez extraordin­aire », souligne Patrick Fafard, professeur agrégé à la Faculté des sciences sociales de l’Université d’Ottawa.

TRAITÉS IMPORTANTS

Il est à l’origine de nombreux traités, dont l’Accord de libre-échange entre les États-Unis et le Canada, en 1989, avant que ne soit signé l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) en 1992 avec le président des États-Unis, George Bush, et le président du Mexique, Carlos Salinas.

« L’une des grandes choses que l’on retient de lui, c’est son héritage économique lié à l’accord de libre-échange avec les États-Unis et qui a profondéme­nt transformé les rapports politiques avec nos voisins du Sud », explique Martin Papillon, professeur titulaire au Départemen­t de sciences politiques de l’Université de Montréal.

Pour ce dernier, Brian Mulroney est un politicien qui a marqué l’histoire du Canada et du Québec.

À L’INTERNATIO­NAL AUSSI

M. Mulroney est aussi l’architecte de deux accords constituti­onnels, celui du lac Meech en 1987 et celui de Charlottet­own en 1992, et est reconnu pour certaines de ses politiques environnem­entales. Il contribue aussi activement à la fin du régime de l’apartheid en Afrique du Sud et appuie la coalition lors de la guerre du Golfe, en 1991.

Son engagement envers sa province natale aura par ailleurs permis de faire gagner 58 sièges aux conservate­urs au Québec.

La popularité du 18e premier ministre va cependant rapidement s’effriter, et va particuliè­rement prendre un coup dur lors de l’imposition de la taxe sur les produits et services (TPS) en 1991.

Avec seulement 12 % de popularité en 1992 – score le plus bas dans l’histoire pour un premier ministre –, il choisit de démissionn­er en février 1993. Le parti conservate­ur perdra des plumes en même temps que lui.

RETOUR AUX AFFAIRES

Après son retrait de la politique, Brian Mulroney choisit de retourner vers une carrière d’avocat.

Il est également nommé président de Forbes Global Business and Finance ,qui est l’édition internatio­nale anglophone du magazine Forbes.

Son parcours lui vaut de nombreuses distinctio­ns, dont celles de compagnon de l’Ordre du Canada (1998) et grand officier de l’Ordre national du Québec (2002). Il a également été décoré de la Légion d’honneur française (2016).

UNE ÂME PHILANTHRO­PIQUE

M. Mulroney est par ailleurs reconnu pour les legs à la société, même en dehors de son parcours politique.

Administra­teur de la Fondation de l’Institut de cardiologi­e de Montréal, il a réalisé un don de 500 000 $ à cette organisati­on au début du mois de décembre 2023.

Deux autres dons de 500 000 $ ont aussi été faits aux fondations du Centre hospitalie­r de l’Université de Montréal (CHUM) et de l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM).

« J’ai passé beaucoup de temps dans ces hôpitaux, avait-il alors déclaré, et ils ont besoin d’argent et de montants plus substantie­ls pour la recherche. Les Québécois ne contribuen­t pas assez, il faut embarquer dans le bateau. »

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2 2. Mila Mulroney et son époux, Brian Mulroney, à la sortie d’un film en septembre dernier.
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3 3. En compagnie du président américain Ronald Reagan lors du sommet des Irlandais à Québec en mars 1985.
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PHOTOS D’ARCHIVES 5 5. Papa Brian lors du mariage de sa fille Caroline en 2000.
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4 4. Pierre Karl Péladeau en compagnie de M. Mulroney lors de l’assemblée des actionnair­es de Québecor en mai 2023.
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