TOUJOURS DANS LE COUP À52ANS
Donald Brashear pratique au moins trois fois par semaine afin de tenir tête aux jeunots avec les Marquis de Jonquière
SAGUENAY | La porte de service du vétuste Palais des sports de Jonquière s’entrouvre, laissant entrer la brise glaciale d’un soir de février saguenéen. Dans l’embrasure se dresse l’ombre d’un colosse, crâne rasé, barbe grisonnante, sac d’équipement des Flyers de Philadelphie sur l’épaule.
« Hey Brash ! Comment ça va, mon gars ? Content de voir ! »
Dans le vestibule de la pièce ayant servi, il y a un quart de siècle, de vestiaire aux Gaillards de Jonquière, de la Ligue de hockey collégial, Donald Brashear est accueilli par ses coéquipiers et son entraîneur Bob Desjardins.
L’air timide, malgré le sourire qu’il affiche, Brashear s’engouffre dans ce qui se veut maintenant le repaire des Marquis de Jonquière. Ce soir, à 52 ans bien sonnés, il disputera son 15e match dans l’uniforme de cette formation de la Ligue nord-américaine de hockey. Un circuit dans lequel il est de retour après s’être promené dans d’autres circuits seniors inférieurs au cours des dernières saisons.
« Je vais jouer jusqu’à tant que je ne sois plus capable. J’aime vraiment ça », lancera un peu plus tard Brashear à l’auteur de ces lignes, dans l’une des rares entrevues qu’il a accepté de donner au cours des dernières années.
Évidemment, la physionomie du vétéran détonne avec celle de ses compagnons d’armes, la plupart au début de la trentaine. N’empêche, il n’y a pas l’ombre d’un début de bedaine de bière par-dessus ces abdominaux, certes un peu plus fatigués, mais toujours bien présents.
TENIR TÊTE AUX JEUNOTS
Et le coup de patin est encore là. Assurément dans la moyenne (peut-être même un peu plus) de ceux qui foulent la glace à ses côtés et contre lui dans cette ligue dans laquelle la très grande majorité des joueurs ont connu de brillantes carrières dans la LHJMQ.
Certains ont été repêchés dans la LNH. Au premier tour, même. Chez les Marquis, c’est le cas d’Alexandre Picard (8e au total), sélectionné par les Blue Jackets en 2004, et de Philippe Paradis (27e au total), par les Hurricanes en 2009.
« Je pratique au moins trois fois par semaine. Quand je ne le fais pas, je le ressens assez rapidement, lance Brashear pour expliquer comment il parvient à tenir tête aux jeunots. Même dans la LNH, passé 35 ans, ceux qui ne veulent plus s’entraîner commencent à voir leurs performances descendre. »
Brashear est bien placé pour le savoir. Il a disputé 1025 matchs dans le circuit Bettman. Une carrière de 16 saisons qui l’ont mené de Montréal à New York, en passant par Vancouver, Philadelphie et Washington. Il avait 38 ans quand il a disputé sa dernière campagne, sa seule dans l’uniforme des Rangers.
« Y en a qui pensent que je me magane parce que je joue encore à 52 ans. Ceux qui pensent ça, c’est parce qu’ils ne savent pas c’est quoi se tenir en forme, martèle-t-il.
Quand tu vieillis, il faut que tu bouges. D’ailleurs, quand je ne fais rien, c’est là que j’ai le plus mal partout. »
LE FAVORI DE LA FOULE
En ce vendredi soir, 2210 spectateurs prennent place dans le Palais des sports. Bien qu’ils affectionnent encore le jeu robuste, ils savent qu’on est à des années-lumière de l’époque où ils venaient encourager Jimmy Burns, le bagarreur le plus en vue des Condors de Jonquière, première mouture du hockey senior provincial au pays des Bleuets.
Néanmoins, on sait qu’ils ne cracheraient pas sur une démonstration des talents pugilistiques de celui qui a livré plus de 200 combats dans la LNH. On le comprend rapidement en les entendant scander le nom de leur numéro 87 favori chaque fois qu’il touche la surface de jeu.
« Quand je le fais (jeter les gants), c’est parce que c’est moi qui sens que j’ai besoin de le faire. Personne ne me donne une tape dans le dos et ne me dit : “Envoye ! Va le pogner, lui.” Si je sens qu’un gars dérange et qu’il faut que ça se rende là, ben c’est là que ça va se rendre », explique-t-il.
« Dans la LNH, je le faisais parce que c’était mon travail. Mais le hockey, c’est scorer des buts, faire des passes. Une bataille, ça ne donne pas un but, ça ne fait pas un point, ajoute-t-il. J’ai toujours eu ça comme mentalité. Maintenant, je peux davantage le faire. »
«Jev ais jouer jusqu’à tant que je ne sois plus capable. J’aime vraiment ça »