Montréal, un dépotoir à ciel ouvert
Plusieurs citoyens de la métropole sont-ils comme moi désensibilisés à la laideur de la ville à la fin de l’hiver ?
À l’intérieur de Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.
Déjections humaines, omniprésentes verres de Tim Hortons, sacs éventrés : certaines rues du centreville de Montréal se distinguent par une allure printanière qui n’a rien de réjouissant.
La neige n’est plus là pour faire écran. La saleté de l’hiver est exhibée.
Non loin d’une toilette publique autonettoyante, quelqu’un s’est soulagé sur le trottoir contre un mur de l’édicule de Berri-UQAM, juste à côté d’une boîte aux lettres.
Pourquoi ne pas avoir utilisé la toilette publique ? Un voyant près de la porte dit : « En maintenance »…
Comme d’autres Montréalais, habitués à un haut niveau de malpropreté, suis-je blasé jusqu’à l’insensibilité ?
Je suis incapable de m’émouvoir de ce qui dégoûterait un visiteur. Même à la vue des déjections humaines près de la station de métro, je me dis : « Beurk !... mais bof ».
C’est comme ça chaque printemps : c’est la saison des déchets. Est-ce normal que je trouve ça normal ?
MONTAGNES DE SACS
En ce lundi post-Nuit blanche sur la rue Saint-Denis, les déchets des événements nocturnes semblent avoir été réunis dans des dizaines de sacs empilés… Bravo pour cette première étape ! Mais quelqu’un viendra-t-il bientôt chercher lesdits sacs qui forment des montagnes au bord des rues ?
Déjà, lundi matin, une sorte de Jack l’Éventreur du sac à ordures avait sévi devant le restaurant Le Molière, en poignardant des sacs de la Nuit blanche, et une de ses « victimes » laissait couler un jus noir.
Sur Saint-Denis, entre Sainte-Catherine et de Maisonneuve, on avait passé le balai. Mais entre de Maisonneuve et Émery (la rue du cinéma Quartier latin), on n’avait PAS passé le balai. Puis, d’Émery à Ontario, ça redevenait salubre.
PROPRE, PAS PROPRE, PROPRE…
Sur Sainte-Catherine dans les environs du MTelus et des Foufounes, c’était une vraie poubelle à ciel ouvert.
Sur le Réseau express vélo de Saint-Denis direction nord, c’était (relativement) propre. Mais direction sud, c’était jonché de détritus.
Dans le carré Saint-Louis boueux et déprimant, les déchets, pour l’essentiel, semblaient avoir été ramassés. Mais dans le petit parc Jehane-Benoît de l’autre côté de l’Institut du tourisme et de l’hôtellerie, c’était un dépotoir.
Dans certains parcs, le ménage du printemps a déjà commencé parce que les cols bleus qui s’occupaient des patinoires ont été libérés de cette tâche plus tôt que d’habitude.
« Comme la glace a fondu vite, les employés ont été affectés à la propreté pour ramasser les branches et les déchets dans les parcs », m’expliquait la semaine dernière Nadine Bergeron, la responsable des cols bleus de Rivière-des-Prairies– Pointe-aux-Trembles.
UN DÉSASTRE
D’autres arrondissements ont-ils imité cet exemple ?
« Tant mieux si la Ville met plus de monde à nettoyer les rues, mais je ne vois pas de différence : c’est un désastre ! », déplore James Guilbaud, bien connu à Montréal pour ses sorties de course à pied de type « Plogga », où il ramasse les déchets tout en courant.
M. Guilbaud organise par ailleurs une grande course de ramassage de déchets le 21 avril pour le Jour de la Terre avec son groupe Plogga Mtl.
Chose certaine : d’ici à ce que les bourgeons sortent, il y a beaucoup de ménage à faire en ville.