La prison pour avoir voulu se faire justice
Le coupable a involontairement atteint un garçon de 9 ans d’une balle perdue en visant des intimidateurs
Un homme qui a voulu se faire justice lui-même en ouvrant le feu dans un quartier résidentiel, atteignant un enfant de 9 ans d’une balle perdue alors qu’il visait ses intimidateurs, devra réfléchir à son geste derrière les barreaux durant sept ans.
« Quoiqu’il ait été menacé, au lieu de faire appel aux policiers, il s’est fait ce qu’on dit communément “justice lui-même”. Il s’est armé, en toute connaissance des conséquences qui pouvaient advenir », a déploré hier la juge Louise Leduc, en prononçant la peine d’Yves Martin Larocque, au palais de justice de Sorel-Tracy.
Branché par vidéoconférence, l’homme de 40 ans avait les yeux rougis lors de la sentence.
En janvier 2023, il a reconnu avoir commis des voies de fait graves, déchargé une arme à feu dans l’intention de blesser et fait une utilisation négligente d’une arme. Son accusation de tentative de meurtre est alors tombée.
DES MENACES
L’affaire s’est jouée le 22 août 2021 à Contrecoeur, en Montérégie.
Ce soir-là, vers 19 h 30, David Burelle-Jeannotte et deux autres hommes se sont rendus chez l’accusé, rue des Pivoines.
« On va se monter une équipe et on va venir te passer », l’avait préalablement averti Burelle-Jeannotte, un individu lourdement criminalisé qui le menaçait depuis des mois.
Selon nos informations, leur conflit avait débuté lors d’une querelle dans un bar.
Martin Larocque, qui ne portait qu’un maillot de bain lorsqu’il a été réveillé par
les intrus, est sorti de sa maison et a fait feu vers ses intimidateurs avec sa carabine enregistrée.
En fuyant en voiture, Burelle-Jeannotte a reçu un projectile à la tête.
Un garçon de 9 ans qui se tenait à proximité et qui n’avait rien à voir avec cette guerre ouverte a vu une balle lui traverser la cuisse.
Si l’enfant n’a conservé que des séquelles psychologiques, Burelle-Jeannotte se déplace aujourd’hui en fauteuil roulant et vit dans une résidence spécialisée.
« On a beau me dire que cet individu-là était criminalisé, c’est d’une tristesse épouvantable », a nommé la juge Leduc, qui a insisté sur l’importance de la dissuasion en matière d’armes à feu.
Il y a moins d’une semaine, la magistrate sermonnait d’ailleurs un autre condamné dans une affaire semblable pour laquelle l’homme a tenté de se défendre lui-même lors d’une attaque.
FAIBLE RISQUE DE RÉCIDIVE
Incarcéré depuis, Yves Martin Larocque risquait 10 ans de pénitencier. Son avocate suggérait pour sa part une sentence de quatre ans en cellule.
Le Contrecoeurois sortira tout de même plus tôt que prévu de prison en raison de sa détention préventive et de conditions d’incarcération jugées difficiles par le tribunal.
Il lui reste donc un peu moins de trois ans d’emprisonnement à purger.
Aux yeux du tribunal, Martin Larocque présente un faible risque de récidive. Il n’avait aucun antécédent criminel.
« Je tiens beaucoup en compte le fait qu’il ait des remords. [Il a commis] un acte criminel à une occasion, dans des circonstances particulières de sa vie. À défaut de quoi, son mode de vie ne reflète pas du tout le comportement qu’il a eu », a conclu la juge Leduc.