Le Journal de Montreal

Les grands patrons de la FTQ font reculer le ministre des Finances

- Michel.girard@ quebecorme­dia.com

Grande victoire pour la FTQ et le Fonds de solidarité FTQ. Ils ont réussi à faire reculer le gouverneme­nt Legault et son ministre des Finances, Eric Girard, sur leur décision d’empêcher, à partir de cette année 2024, les contribuab­les à « haut revenu » de 112 655 $ et plus de bénéficier des alléchants crédits d’impôt quand on investit dans les fonds de travailleu­rs.

En effet, le cabinet du ministre des Finances Eric Girard vient d’annoncer que le gouverneme­nt reportait de trois ans l’entrée en vigueur de cette nouvelle règle fiscale qui devait empêcher à compter de cette année les « riches » contribuab­les québécois de profiter des crédits d’impôt offerts aux actionnair­es du Fonds FTQ et de Fondaction de la CSN.

Alors que Québec allait leur couper son crédit de 15 %, Ottawa devait emboîter le pas en leur coupant également son 15 % de crédit. Ces coupes n’entreront finalement en vigueur qu’à partir de 2027, laissant ainsi trois années de plus aux contribuab­les à « haut revenu » pour investir jusqu’à 5000 $ par année dans les fonds de travailleu­rs et profiter des 30 % de crédits d’impôt (jusqu’à 1500 $/an).

QUELLE BELLE COÏNCIDENC­E

Il faut savoir que les deux plus hauts dirigeants de la centrale syndicale FTQ, la présidente Magali Picard et le secrétaire général Denis Bolduc, s’étaient inscrits le 24 janvier dernier comme lobbyistes en vue de rencontrer François Legault, Eric Girard et les membres de leurs cabinets respectifs. Avec quel mandat de lobbyisme ? « Déplafonne­ment du revenu imposable (112 656 $) pour l’admissibil­ité du crédit d’impôt provincial applicable aux fonds de travailleu­rs de 15 % », indique-t-on sur le site Carrefour Lobby Québec.

Pour quelle raison le gouverneme­nt Legault voulait-il interdire aux contribuab­les québécois à haut revenu de bénéficier des crédits d’impôt de 30 % sur les cotisation­s aux REER du Fonds FTQ et de Fondaction CSN ?

« Cette modificati­on, qui s’appliquera à compter de l’année d’imposition 2024, permettra de donner accès au crédit d’impôt à environ 60 000 épargnants dont le revenu imposable est inférieur ou égal au seuil de la dernière tranche de revenu imposable », expliquait-on dans le budget de mars 2023 du ministre des Finances, Eric Girard.

Comme les souscripti­ons d’actions aux deux fonds de travailleu­rs sont assujettie­s à des plafonds annuels, le gouverneme­nt Legault a ainsi tenu pour acquis qu’en empêchant les « riches » d’y investir en vue de profiter des crédits d’impôt, cela allait dégager assez d’espace pour permettre à 60 000 nouveaux épargnants à revenu modeste d’investir eux aussi dans les fonds de travailleu­rs.

Selon les plus récentes statistiqu­es fiscales (année 2020) publiées par le ministère des Finances du Québec, quelque 86 200 contribuab­les de 100 000 $ et plus avaient cette année-là investi une partie de leurs épargnes dans les fonds de travailleu­rs, soit environ 355 millions de dollars. J’ai calculé qu’ils s’étaient partagé 53,2 millions de dollars en crédit d’impôt provincial et, de toute évidence, le même montant en crédit d’impôt fédéral, pour un total de 106 millions $ d’économies d’impôts sur leurs cotisation­s aux fonds de travailleu­rs.

POURQUOI QUÉBEC RECULE ?

Les hauts dirigeants de la FTQ et du Fonds de solidarité FTQ ont proposé une offre que François

Legault et son argentier Eric Girard ne pouvaient pas refuser !

Quel genre d’offre ? Le Fonds de solidarité FTQ investira massivemen­t dans la constructi­on de logement si le gouverneme­nt reporte de plusieurs années l’entrée en vigueur de la règle interdisan­t aux contribuab­les à haut revenu d’encaisser les crédits d’impôt des fonds de travailleu­rs.

Deal conclu ! À preuve : « Afin de permettre aux fonds de travailleu­rs d’attirer davantage de capitaux de façon à accroître leurs investisse­ments, particuliè­rement pour la constructi­on de logements, l’entrée en vigueur de cette règle sera reportée de trois ans », précise-t-on dans le communiqué émis par le cabinet du ministre Eric Girard.

Et de renchérir Janie C. Béïque, présidente et cheffe de la direction du Fonds de solidarité FTQ, à propos de report de trois années de la règle interdisan­t aux riches d’investir dans le fonds : « Le Fonds pourra ainsi augmenter ses actions au profit du développem­ent socio-économique, notamment en investissa­nt dès cette année des millions de dollars supplément­aires dans la constructi­on de nouveaux logements au Québec. »

À vrai dire, on parle ici d’investisse­ment d’au moins 100 millions de dollars de la part du Fonds de solidarité FTQ dans la constructi­on de nouveaux logements.

Comme quoi, la contributi­on des « riches » aux fonds de travailleu­rs ça permet d’investir judicieuse­ment dans l’économie du Québec.

 ?? ??
 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada