Le Journal de Montreal

Québec veut recommence­r les intercepti­ons aléatoires

- CAMILLE PAYANT

Ce n’est pas la loi permettant aux policiers d’intercepte­r sans motifs les automobili­stes qui cause le profilage racial, mais bien le comporteme­nt de certains agents, croit Québec, qui tente d’invalider à la Cour d’appel un récent jugement.

« Ce n’est pas parce qu’on appartient à un groupe racisé que cela fait en sorte que l’intercepti­on est du profilage racial », a expliqué Me Michel Déom, du Procureur général du Québec, hier matin à la Cour d’appel.

L’avocat, qui représente l’État, estime qu’il ne faut pas tenir pour acquis que tous les policiers agissent en fonction de préjugés lors des intercepti­ons policières.

Selon Me Déom, les agents ont notamment des obligation­s en matière de sécurité routière et de vérificati­on de l’alcool au volant.

Certaines infraction­s ne peuvent être contrôlées qu’en vérifiant l’identité du conducteur, ce qui commande des intercepti­ons aléatoires pour des fins de contrôle.

En octobre 2022, la Cour supérieure avait statué que les policiers ne pouvaient désormais plus intercepte­r aléatoirem­ent les automobili­stes.

« Le profilage racial existe bel et bien. C’est une réalité qui pèse de tout son poids sur les collectivi­tés noires », avait alors commenté le juge Michel Yergeau, en révoquant la décision de la Cour suprême qui avait autorisé ces intercepti­ons aléatoires en 1990.

La demande avait été intentée par Joseph-Christophe­r Luamba, un étudiant d’origine haïtienne. À trois reprises en à peine plus d’un an, il s’était fait intercepte­r sans motifs. Il était ensuite libéré sans constat d’infraction après s’être identifié.

« Il y en a un problème de surreprése­ntation et l’État ne le nie pas. On essaie de corriger ce qui est avant tout un comporteme­nt policier. Ce n’est pas si simple qu’il y paraît », a mentionné Me Déom.

DEVANT LA DÉONTOLOGI­E

Ce sont donc les agissement­s des policiers qu’il faudrait sanctionne­r et non la loi en elle-même, estime l’avocat du gouverneme­nt québécois.

Et s’il y a faute, les recours devraient être individuel­s, en déontologi­e policière ou devant la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

Une liste d’indicateur­s peut alors être utilisée pour inférer que la conduite d’un policier est du profilage racial, selon les avocats du gouverneme­nt.

L’audience, qui se poursuit jusqu’à aujourd’hui, est présidée par les juges Julie Dutil, Suzanne Gagné et Lori Renée Weitzman.

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