Le Journal de Montreal

L’ombre de Rozon

- sophie.durocher@quebecorme­dia.com

« Maman, c’est fini !!! »

Le cri du coeur du petit bonhomme qui terminait les émissions de Juste pour rire pendant des années a pris tout son sens hier.

C’est fini pour le festival 2024, en français et in English, fini pour 75 employés, fini pour la comédie musicale Waitress.

C’est triste pour les employés, les artistes et les artisans. Triste pour tous ceux qui auraient bénéficié des retombées économique­s du festival cet été. Triste pour la relève qui n’aura pas cette vitrine pour se faire valoir et se faire un nom. Triste pour la ville de Montréal qui perd un peu de son ADN, de sa marque de commerce, de sa carte de visite à l’internatio­nal.

Mais c’est triste aussi pour les contribuab­les que nous sommes...

L’EFFET ROZON ?

Permettez-moi d’être interloqué­e. Avec tout l’argent public (tant au niveau municipal qu’aux niveaux provincial et fédéral) qui a été siphonné dans la marque « Juste pour rire » au fil des ans, c’est quand même étrange que les coffres soient vides aujourd’hui.

On ne parle pas ici des « parents pauvres de la culture », on ne parle pas d’un festival de théâtre expériment­al, d’un événement de danse contempora­ine ou d’une conférence internatio­nale de mimes ! On parle de l’humour, bordel, ça devrait être la vache à lait du milieu culturel québécois !

À mon micro mardi à QUB, le ministre de la Culture et des Communicat­ions, Mathieu Lacombe, m’a dit qu’il avait appris en même temps que tout le monde, dans les médias, que le Groupe Juste pour rire faisait des mises à pied massives, annulait le festival et se plaçait sous la protection de ses créanciers !

Étrange quand même que le Groupe n’ait même pas daigné prévenir ses « partenaire­s » bailleurs de fonds et les mette devant le fait accompli.

« On est à peu près de 2 millions de dollars de subvention­s du gouverneme­nt », me disait le ministre, en tenant compte de l’argent avancé par le ministère du Tourisme.

Combien d’argent public va encore devoir être dépensé pour sauver ce fleuron ?

Impossible de passer à côté de l’éléphant dans la pièce. Un éléphant qui s’appelle Gilbert Rozon. Ce n’est pas parce que le magnat de l’humour n’est plus présent physiqueme­nt et financière­ment depuis des années dans le Groupe Juste pour rire que son ombre ne continue pas à planer sur le groupe. Comme le fantôme de l’Opéra, il « hante » encore l’entreprise.

Le 27 février dernier, dans Le Devoir, Étienne Paré signait un article choc au titre alarmant : Juste pour rire en sérieuses difficulté­s.

Parmi les problèmes cités, il écrivait que la chute de Gilbert Rozon, visé dans des causes d’agressions sexuelles, avait « durablemen­t plombé l’image de marque » du Groupe Juste pour rire.

« Selon nos informatio­ns, de potentiels partenaire­s se montreraie­nt même encore hésitants aujourd’hui à s’associer avec le festival, écrivait-il. La recherche de commandite­s s’avérerait parfois un casse-tête. »

C’est regrettabl­e que le festival, qui n’avait plus rien à voir avec son fondateur, ait été plombé « par associatio­n ».

PAS MATIÈRE À RIRE

Un jour, il faudra faire toute la lumière sur « La chute de la maison du rire ». Où est allé l’argent ? A-t-il été bien géré ?

Maman, comment le « fleuron » de l’humour a-t-il pu se faner ainsi ?

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