La journée qui a changé les hommes
Demain, 8 mars, on célébrera la « Journée internationale des femmes » proclamée par les Nations-Unies il y a déjà 49 ans.
Cette journée a modifié le sort des femmes et profondément changé l’attitude des hommes, particulièrement au cinéma et à la télévision, les vecteurs de changement les plus importants de notre société. Que ce soit devant ou derrière la caméra, les Canadiennes, et surtout les Québécoises, occupent une place de choix dans la plupart des métiers de l’audiovisuel. Elles y sont même devenues majoritaires.
Pour le meilleur et pour le pire, les réseaux sociaux ont accéléré le changement. Propagé par Facebook et Twitter (maintenant X), le mouvement « MeToo»aeuun impact énorme sur le monde du spectacle.
Parfois sans nuances, le mouvement a fait la lumière sur une certaine culture d’impunité. Les accusations furent nombreuses, les allégations encore plus, renversant les idoles et fragilisant des entreprises d’envergure sans égard aux conséquences. La triste faillite de Juste pour rire est le plus récent exemple de ces coups de griffe tous azimuts.
L’EXCEPTION FRANÇAISE
Jusqu’à ces derniers mois, la France était le seul pays d’Occident où le mouvement « MeToo » n’avait pas fait de brèche. Cela en dit long sur le machisme du mâle français et sur son acceptation par les femmes. Le mois dernier, au moment de la sortie de sa série Icon of French Cinema, l’actrice Judith Godrèche a ouvert les vannes, dénonçant deux réalisateurs qui auraient abusé d’elle quand elle était mineure : Benoît Jacquot (Trois Césars pour Les adieux à la reine) et Jacques Doillon (Prix Delluc pour Le petit criminel).
L’industrie française du spectacle aura donc été la dernière où les vedettes peuvent tout se permettre impunément. Roman Polanski, Gérard Depardieu, André Téchiné, ils sont maintenant de plus en plus nombreux à se défendre contre des accusations de gestes osés, d’agressions sexuelles et même de viols. Dans son édition du 23 février, Le Figaro magazine publie le témoignage d’un expert du cinéma rapportant que « Clouzot et Pialat giflaient leurs acteurs sur les plateaux pour les mettre en condition » ! Et personne ne trouvait à redire.
UNE SCÈNE INCROYABLE
J’ai moi-même été témoin d’une scène à faire dresser les cheveux sur la tête.
En 1988, au moment du tournage à Paris d’un épisode de la série Mount royal dont j’étais l’un des script doctors avec Wayne Grigsby, le scénario demandait qu’une jeune fille accouche en cachette dans un bâtiment de ferme. Elle devait fondre en larmes en voyant son bébé mort-né. Malgré les nombreuses prises commandées par le réalisateur et les ordres qu’il lançait à tue-tête, l’actrice n’arrivait pas à pleurer.
Impatient, le réalisateur sexagénaire bondit sur elle et lui décocha deux gifles retentissantes. Elle tomba à la renverse et fondit en larmes. Je courus dénoncer cette brute au coproducteur de TF1. Il me regarda avec condescendance ajoutant que ce réalisateur avait fait ce qu’il fallait pour que cette actrice idiote ne retarde pas le tournage plus longtemps !
Les multiples accusations et allégations lancées par tant de Françaises qui travaillent dans l’audiovisuel réussiront-elles à transformer le cinéma français avant le 50e anniversaire de la proclamation de l’Année internationale de la Femme ? Peutêtre, mais rien n’est moins sûr, certaines des plus grandes vedettes défendant encore bec et ongles les camarades mâles qu’on accuse.