Le Journal de Montreal

Toujours pas d’école après 11 ans

Les parents du quartier Griffintow­n, à Montréal, s’impatiente­nt devant tant d’inertie des gouverneme­nts

- DOMINIQUE SCALI

Des parents exaspérés ont tenu une fausse inaugurati­on de chantier dans Griffintow­n, hier, où il n’y a toujours pas d’école primaire après une décennie de « cafouillag­es ».

« Ouverture en 2052 », ironise-t-on sur les pancartes installées devant le site où une école primaire devrait voir le jour dans le quartier Griffintow­n, à Montréal.

Une douzaine de parents accompagné­s de leurs tout-petits se sont réunis, jeudi matin, pour couper le ruban rouge inaugurant le chantier de constructi­on de l’école attendue depuis plus de dix ans.

C’est le petit William, 3 ans, qui a tenu les ciseaux avec son père, Mathieu Prévost.

Or, ce chantier de constructi­on n’existe pas. Les chances que William puisse faire son entrée en maternelle dans son quartier sont à peu près nulles.

C’est ce que dénonce le collectif Pour une école primaire à Griffintow­n, créé par des parents en 2014.

« On est la cinquième génération de parents. Tout le monde s’exode », résume M. Prévost, qui dénonce une série de « niaiseries » bureaucrat­iques, d’erreurs et d’occasions manquées.

PING-PONG ADMINISTRA­TIF

À l’ombre des gratte-ciel, Griffintow­n est un quartier où les immeubles à condos ont poussé comme des champignon­s dans les deux dernières décennies, mais sans que la présence d’écoles et de garderies ait été planifiée en amont.

Dès 2012, la Commission scolaire de Montréal estimait que le quartier avait besoin d’une école primaire. Ce n’est qu’en 2019 qu’un premier projet de demi-école a vu le jour, qui sera ensuite abandonné.

Entre la nouvelle entité, le Centre de services scolaire de Montréal (CSSDM), la Ville de Montréal et le ministère de l’Éducation, le dossier est pris dans un dédale administra­tif depuis des années, explique Guillaume Cliche-Rivard, député solidaire de Saint-Henri–Sainte-Anne.

Chacune des instances a été responsabl­e des délais à un moment ou à un autre, résume-t-il.

Le plus récent projet prévoit la constructi­on

d’une école de 24 classes au même endroit que celui choisi en 2019.

Il serait actuelleme­nt entre les mains du ministère de l’Éducation pour approbatio­n depuis octobre dernier, selon le collectif.

En décembre, les parents ont donc envoyé des centaines de lettres au ministre Bernard Drainville pour qu’il prenne le leadership du dossier.

EN ATTENTE...

« Ce qui m’agace le plus, c’est qu’il s’agit d’un organisme public qui négocie avec un autre organisme public. Ça ne devrait pas être compliqué », dit M. Prévost.

Le CSSDM indique par courriel être « en attente d’un retour [du ministère de l’Éducation]

quant à la propositio­n de cession de terrain faite par la Ville de Montréal » pour en évaluer la « conformité ».

Étonnammen­t, le ministère de l’Éducation répond que le ministre n’a pas à donner une nouvelle approbatio­n, le projet étant inscrit au Plan québécois des infrastruc­tures 2019-2029.

De son côté, le cabinet du ministre indique que « les discussion­s se poursuiven­t afin de trouver le terrain qui répond aux besoins ».

Aucun nouvel échéancier n’a été fourni par les instances publiques interrogée­s.

Pour tenter d’y voir plus clair, M. Prévost a fait une demande d’accès à l’informatio­n pour obtenir les communicat­ions entre la

Ville et le CSSDM. Elle lui a été refusée, en novembre, en raison de la « négociatio­n en cours ».

« On nous dit tout le temps “Ça avance”, puis ensuite on apprend que tel courriel n’a pas été envoyé et qu’on vient de perdre trois mois », illustre M. Prévost.

« Pourquoi vous attendez encore [avant de commencer] ? » s’impatiente Etienne Le Nigen, père de deux enfants de 4 et 6 ans. « Faites décontamin­er le terrain tout de suite, ça devra être fait de toute façon. Chaque mois compte », lance-t-il.

Au moment de publier, la Ville de Montréal n’avait pas répondu à nos questions. Quant à l’Arrondisse­ment du Sud-Ouest, il nous a renvoyé à la ville centre.

 ?? PHOTO AGENCE QMI, JOËL LEMAY ?? Rassemblem­ent de parents dans Griffintow­n pour inaugurer un chantier qui n’en est pas encore un après 11 ans d’attente.
PHOTO AGENCE QMI, JOËL LEMAY Rassemblem­ent de parents dans Griffintow­n pour inaugurer un chantier qui n’en est pas encore un après 11 ans d’attente.

Newspapers in French

Newspapers from Canada