Hiver désastreux pour le traîneau à chiens
En plus du manque de neige, les températures douces peuvent être risquées pour les animaux
Les températures clémentes et le peu de neige reçue cet hiver font craindre le pire aux entreprises de balades en traîneau à chiens.
« En 19 ans de carrière, je n’ai jamais vu un hiver comme ça », se désole Éric Pichette, propriétaire de la Meute Tanwen, en Outaouais.
Avec à peine une vingtaine de jours de « vrai hiver » depuis décembre, l’éleveur n’a qu’un seul mot pour qualifier la saison froide : « désastreuse ».
Même son de cloche pour Stéphane Denis, du Centre Kanatha-Aki, à Val-desLacs, dans les Laurentides. Il n’a pu ouvrir que deux mois, soit la moitié moins qu’à l’habitude.
« En tout, on a vraiment eu un mois d’opérations sachant qu’on a dû composer avec la pluie, la fonte de la neige et les températures chaudes », explique-t-il.
Chez Laurel Aventure Nature, certains sentiers sont restés fermés tout l’hiver. Et parmi ceux qui étaient ouverts, de la neige a dû être ajoutée par des employés, souligne Marie-Hélène Durocher, copropriétaire de l’entreprise.
PAS LE KLONDIKE...
Financièrement, l’hiver 2023-2024 est à oublier. Meute Tanwen a vu ses revenus bruts chuter de 50 % cette année, soutient Éric Pichette.
Il faut dire que la clientèle québécoise n’était pas aux rendez-vous, notamment à cause des faibles précipitations de neige.
« Beaucoup de Québécois pensent que parce qu’il n’y a pas de neige chez eux qu’il n’y en a pas nulle part. Il y a seulement les touristes qui appellent. Ça a un impact sur l’achalandage », déplore Marie-Hélène Durocher de Laurel Aventure Nature.
Du côté du Centre Kanatha-Aki, on parle d’environ 70 % de revenus en moins.
« L’année passée était vraiment une bonne année. Mais là, il faut faire attention où on met nos billes. Je suis assez sécuritaire, on a quand même d’autres activités l’été qui nous permettent de fonctionner, mais je sais que beaucoup d’autres collègues ont dû fermer [leur entreprise] cette année », indique le propriétaire Stéphane Denis.
Éric Pichette dénombre pas moins de quatre chenils qui ont dû cesser leurs activités touristiques cette année, « du jamaisvu », selon lui.
Les trois entrepreneurs envisagent d’augmenter leurs prix dès l’hiver prochain pour pallier les saisons écourtées et continuer à entretenir une meute de chiens à l’année.
Au-delà de la neige qui fond, le redoux pose un risque pour les bêtes.
« Dès que la température atteint cinq degrés Celsius, les chiens risquent de surchauffer, de faire de l’hyperthermie. Il faut faire très attention. On doit changer nos horaires pour travailler tôt le matin et ne pas faire de tours l’après-midi », précise Stéphane Denis.
Ce dernier soutient également avoir dû changer la race des chiens de sa meute dans les dix dernières années.
Le husky, une race originaire de Sibérie orientale, a le poil trop long et trop épais pour pouvoir travailler durant nos hivers de plus en plus chauds, dit-il.
L’entrepreneur s’est plutôt tourné vers l’élevage de chiens alaskan, un croisement entre le husky, le lévrier et des chiens de chasse.
Avec les changements climatiques, les entreprises de traîneaux à chiens n’ont également d’autres choix que d’adapter leurs services.
« Il y a des activités qu’on peut faire l’été, mais c’est complètement une autre logistique. S’il fallait opérer à l’année pour gagner l’équivalent de ce qu’on fait en hiver, je ne suis pas certaine qu’on pourrait continuer comme ça », craint Marie-Hélène Durocher.