Le Journal de Montreal

Mauvaise semaine pour la culture

La débâcle de Juste pour rire a malheureus­ement « éclipsé » l’autre débâcle de la semaine : les Espaces bleus.

- sophie.durocher@quebecorme­dia.com

Quand j’ai appris que la CAQ mettait la hache dans ce projet, je suis entrée dans une colère bleue.

Certains ont une peur bleue d’utiliser les vrais mots. Mais pour décrire l’abandon de ces 17 musées qui auraient été parsemés aux quatre coins du Québec, il n’y a qu’un mot : fiasco.

Je ne veux pas être bas-bleu (femme soi-disant savante, d’une pédanterie ridicule) mais, j’adore les musées, je peux y passer des heures ! Or, il y avait mille et une façons de mieux servir la culture au Québec.

BLEU JEAN BLEU

Mais qu’est-ce qui s’est passé pour que cette décision émane du salon Bleu (salle de l’Assemblée nationale où siègent les députés du Québec) ?

Il faudrait vraiment être un bleu (une nouvelle recrue, un débutant) dans le milieu de la culture pour penser que cette annonce, en 2021, avait été faite dans l’enthousias­me général.

Dès le départ, on s’était étonné que la CAQ soit si déconnecté­e des demandes du milieu qui souhaitait bien plus qu’on renforce les institutio­ns existantes, qui criaient famine.

Maintenant, il va falloir des Casques bleus (soldats armés membres des forces de maintien de la paix des Nations unies), pour départager les belligéran­ts dans cette guéguerre d’ego surdimensi­onnés.

François Legault laissait entendre que les Espaces bleus seraient son legs. Faudrait-il le surnommer François L’ego ?

Sur ce coin de la Terre (la planète bleue), au bord de l’eau (l’or bleu), à Percé en Gaspésie, on peut trouver ce qui est peut-être le plus gros fiasco des Espaces bleus.

Comme le rapportait Le Devoir le 18 janvier 2024 : « La prochaine saison touristiqu­e à Percé, en Gaspésie, risque d’être bien particuliè­re. Le bureau d’informatio­n touristiqu­e n’ouvrira pas, tout comme le musée du coin. En revanche, l’Espace bleu, le premier du genre au Québec, devrait accueillir ses premiers visiteurs ».

Ouvrir un Espace bleu, mais affamer le musée local, c’est déshabille­r Paul pour habiller Jean d’une belle chemise bleue.

« Je crois que parmi mes collègues [ministres], le prochain qui voudra faire un projet avec l’adjectif “bleu”, il va y repenser à deux fois », a laissé tomber, à la blague, M. Lacombe, en entrevue à La Presse, en référence à la fin du Panier Bleu ET des Espaces bleus.

Le gouverneme­nt de la CAQ ne s’en sortira pas indemne, marqué par ces ecchymoses, ces bleus sur sa réputation.

J’AI LE BLUES DE VOUS

Dans ma chronique de mercredi sur la fin de Juste pour rire, j’écrivais : « Avec tout l’argent public (tant au niveau municipal, qu’au niveau provincial et fédéral) qui a été siphonné dans la marque “Juste pour rire” au fil des ans, c’est quand même étrange que les coffres soient vides aujourd’hui ».

Hier, François Colbert, titulaire de la chaire de gestion des arts à HEC Montréal, dans une lettre ouverte dans La Presse, se demandait : « Comment un festival à but non lucratif adossé à une multinatio­nale peut-il être au bord de la faillite ? […] Comment [les gouverneme­nts] acceptent-ils qu’une entreprise à but non lucratif soit possédée par une entreprise à but lucratif où tout ce qui est payant va à la première et non dans l’OBNL?»

Ces questions-là ne vous mettent pas… dans une colère bleue ?

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