Des emprunteurs pris à la gorge
Les préavis de non-paiement des prêts hypothécaires ont grimpé par rapport à 2023, selon une étude
Alors que 60 % des prêts hypothécaires devront être renouvelés d’ici trois ans, il est troublant de constater que les préavis de non-paiement sont en hausse de 34 % par rapport à l’an dernier, selon le plus récent rapport Terram sur le marché immobilier au Québec.
Le préavis est émis par un créancier par suite d’un non-paiement d’hypothèque. L’avis informe le propriétaire que le prêteur pourrait saisir la propriété après un certain temps si la situation n’est pas résolue.
Les sept hausses répétitives des taux d’intérêt par la Banque du Canada ont obligé plusieurs Québécois à augmenter leurs paiements hypothécaires pour garder leur propriété.
Le Journal a constaté au fil de témoignages que plusieurs se retrouveront bientôt en difficulté financière. Ils se préparent à un choc et devront chercher des solutions pour boucler leurs fins de mois : √ Un père de famille qui s’était pris six mois d’avance pour renouveler son hypothèque est forcé de payer 200 $ de plus par semaine en raison des hausses des taux (voir ci-dessus).
√ Un couple propriétaire d’une maison, dont l’hypothèque n’est pas complètement payée, devra renouveler en 2025 à un taux d’intérêt beaucoup plus élevé que celui à 2 % signé en 2020 (à lire en page 46).
√ Un jeune couple qui a eu besoin de quatre emplois pour amasser 3500 $ supplémentaires à quelques jours de l’acte notarié (texte en page 47).
REPOUSSER L’INÉVITABLE
Le rapport Terram, qui se spécialise dans la collecte et l’analyse de données foncières au Québec, montre également que le volume d’hypothèques continue d’augmenter dans la province (de 10 % depuis un mois), ce qui laisse croire qu’une tendance se dessine, où les gens qui renouvellent leur hypothèque augmentent la période d’amortissement pour garder leur paiement mensuel au même niveau.
Les gens refinancent parce qu’ils sont endettés, et c’est une façon pour eux de garder leurs paiements mensuels bas », explique Stéphane Bruyère, courtier hypothécaire chez les Architectes hypothécaires.
Par exemple, une personne dont il reste 15 ans à payer son hypothèque peut refinancer sur 20 ans, ce qui fera diminuer son paiement mensuel.
Le Registre foncier du Québec, qui produit des statistiques pour dégager les grandes tendances immobilières, montre également que « l’indice de difficultés financières » est en hausse de 34,6 % par rapport au mois dernier, notamment en raison des préavis d’exercice qui ont augmenté de 47,2 %, pour un total de 471 préavis enregistrés en janvier.
Cet indice regroupe certains actes qui dénotent une difficulté pour un propriétaire à respecter ses obligations financières, comme un défaut de paiement sur une hypothèque.
UN AVERTISSEMENT
En octobre, Paul Beaudry, ancien sous-gouverneur de la Banque du Canada, avait lancé un pavé dans la mare en soulignant le danger des renouvellements hypothécaires à venir pour l’économie.
« Le danger qui guette l’économie, c’est que beaucoup de gens ont pris des hypothèques d’une durée de cinq ans à l’époque de la COVID, à des taux aussi bas que 1,5 %. Quand ils devront renouveler, leurs paiements hypothécaires vont bondir, puisque les taux actuels sont plutôt autour de 6,7 %. Si les taux d’intérêt à long terme demeurent au niveau actuel, tout le monde va être frappé », avait-il prévenu.
Voir autres textes dans la section Argent en pages 46 à 49, 56 à 58