Le Journal de Montreal

Des emprunteur­s pris à la gorge

Les préavis de non-paiement des prêts hypothécai­res ont grimpé par rapport à 2023, selon une étude

- DAVID DESCÔTEAUX

Alors que 60 % des prêts hypothécai­res devront être renouvelés d’ici trois ans, il est troublant de constater que les préavis de non-paiement sont en hausse de 34 % par rapport à l’an dernier, selon le plus récent rapport Terram sur le marché immobilier au Québec.

Le préavis est émis par un créancier par suite d’un non-paiement d’hypothèque. L’avis informe le propriétai­re que le prêteur pourrait saisir la propriété après un certain temps si la situation n’est pas résolue.

Les sept hausses répétitive­s des taux d’intérêt par la Banque du Canada ont obligé plusieurs Québécois à augmenter leurs paiements hypothécai­res pour garder leur propriété.

Le Journal a constaté au fil de témoignage­s que plusieurs se retrouvero­nt bientôt en difficulté financière. Ils se préparent à un choc et devront chercher des solutions pour boucler leurs fins de mois : √ Un père de famille qui s’était pris six mois d’avance pour renouveler son hypothèque est forcé de payer 200 $ de plus par semaine en raison des hausses des taux (voir ci-dessus).

√ Un couple propriétai­re d’une maison, dont l’hypothèque n’est pas complèteme­nt payée, devra renouveler en 2025 à un taux d’intérêt beaucoup plus élevé que celui à 2 % signé en 2020 (à lire en page 46).

√ Un jeune couple qui a eu besoin de quatre emplois pour amasser 3500 $ supplément­aires à quelques jours de l’acte notarié (texte en page 47).

REPOUSSER L’INÉVITABLE

Le rapport Terram, qui se spécialise dans la collecte et l’analyse de données foncières au Québec, montre également que le volume d’hypothèque­s continue d’augmenter dans la province (de 10 % depuis un mois), ce qui laisse croire qu’une tendance se dessine, où les gens qui renouvelle­nt leur hypothèque augmentent la période d’amortissem­ent pour garder leur paiement mensuel au même niveau.

Les gens refinancen­t parce qu’ils sont endettés, et c’est une façon pour eux de garder leurs paiements mensuels bas », explique Stéphane Bruyère, courtier hypothécai­re chez les Architecte­s hypothécai­res.

Par exemple, une personne dont il reste 15 ans à payer son hypothèque peut refinancer sur 20 ans, ce qui fera diminuer son paiement mensuel.

Le Registre foncier du Québec, qui produit des statistiqu­es pour dégager les grandes tendances immobilièr­es, montre également que « l’indice de difficulté­s financière­s » est en hausse de 34,6 % par rapport au mois dernier, notamment en raison des préavis d’exercice qui ont augmenté de 47,2 %, pour un total de 471 préavis enregistré­s en janvier.

Cet indice regroupe certains actes qui dénotent une difficulté pour un propriétai­re à respecter ses obligation­s financière­s, comme un défaut de paiement sur une hypothèque.

UN AVERTISSEM­ENT

En octobre, Paul Beaudry, ancien sous-gouverneur de la Banque du Canada, avait lancé un pavé dans la mare en soulignant le danger des renouvelle­ments hypothécai­res à venir pour l’économie.

« Le danger qui guette l’économie, c’est que beaucoup de gens ont pris des hypothèque­s d’une durée de cinq ans à l’époque de la COVID, à des taux aussi bas que 1,5 %. Quand ils devront renouveler, leurs paiements hypothécai­res vont bondir, puisque les taux actuels sont plutôt autour de 6,7 %. Si les taux d’intérêt à long terme demeurent au niveau actuel, tout le monde va être frappé », avait-il prévenu.

Voir autres textes dans la section Argent en pages 46 à 49, 56 à 58

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