Le Journal de Montreal

L’anonymat réclamé pour les témoins d’un accident de travail chez ArcelorMit­tal

- ALEXANDRE CANTIN

Les Tribunaux protègent parfois l’identité de criminels repentis lors de procès, mais cette mesure qui vise à protéger les témoins de représaill­es peut-elle s’appliquer à des employés qui craignent de témoigner contre leur employeur ?

Voilà la question qui doit être tranchée dans le cadre du procès de la compagnie ArcelorMit­tal, accusée de négligence criminelle.

Le procureur aux poursuites criminelle­s et pénales a présenté sa plaidoirie mercredi au palais de justice de Sept-Îles.

La demande d’ordonnance de nonpublica­tion sur l’identité de 39 témoins a un caractère inusité, a souligné d’emblée Me Claude Girard.

Dans sa plaidoirie de deux heures, il a souligné que la protection de témoins (employés, ex-employés et fournisseu­rs d’ArcelorMit­tal) était dans ce cas-ci nécessaire pour protéger ces derniers d’éventuelle­s représaill­es. Ils devront témoigner des circonstan­ces entourant un accident de travail au cours duquel un travailleu­r a subi des blessures sérieuses lors du bris d’un convoyeur au complexe minier du mont Wright à Fermont.

Selon Me Girard, un conflit de loyauté peut se produire, ce qui risque d’empêcher des personnes de témoigner librement. Au cours des deux dernières semaines, il a été démontré que d’éventuels témoins ont exprimé un malaise à livrer un témoignage contre leur employeur ou leur client.

Le procureur aux poursuites criminelle­s et pénales a soulevé le risque qu’un employé qui témoignera­it contre les intérêts de son employeur puisse avoir difficilem­ent accès à une promotion dans le futur.

Il a aussi évoqué une possible division au sein de la population de Fermont, où ArcelorMit­tal est le poumon économique.

Il a également souligné la possibilit­é que les membres de la famille de témoins fassent l’objet de quolibets dans la communauté de Fermont après leur passage en cours.

LA LIBERTÉ DE LA PRESSE EN JEU ?

Sachant qu’une ordonnance de non-publicatio­n vient compromett­re le principe de la publicité des procès, Me Claude Girard a souligné que sa demande est somme toute limitée et n’empêcherai­t pas les médias de rapporter le contenu de la preuve.

Selon lui, la protection de l’identité de témoins est la mesure qui porte le moins atteinte à la liberté de la presse.

Le procureur d’ArcelorMit­tal, Me Michel Massicotte, s’oppose à la demande d’ordonnance de non-publicatio­n.

Me Massicotte et l’avocat de deux médias, Radio-Canada et TVA, exposeront leurs arguments jeudi prochain.

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