Le royaume des achigans démesurés
Nous rêvons tous de pouvoir accéder à des endroits paradisiaques réputés comme étant les meilleurs emplacements pour capturer de gigantesques spécimens.
On se promet, dans un avenir plus ou moins lointain, de se gâter et de se permettre une dépense folle. La fameuse bucket list, la liste des choses qu’on souhaite vraiment faire avant de trépasser ou de ne plus avoir la santé.
UNE PAUSE
Depuis une vingtaine d’années, j’entends parler de certains lacs du Mexique où on capture littéralement des trophées.
La guerre avec les cartels de drogue qui a commencé en 2006 a fait plus de 60 000 victimes. Nul besoin de préciser que durant toutes les années qui ont suivi, on évitait de se rendre dans ces secteurs. De nos jours, dans ce coin de pays, aux dires de tous les intervenants impliqués, il n’y a plus de problèmes. Pour notre part, sans avoir la prétention d’être des experts en géopolitique, nous n’avons rien vu d’inquiétant.
UN ÉDEN ENCHANTÉ
Le lac El Salto est situé dans l’État de Sinoloa, au pied des montagnes de la Sierra Madres, à 1 h 45 min de Mazatlan. Ce réservoir a été construit sur la rivière Elota, en 1986. Le gouvernement l’a endigué afin d’assurer, entre autres, un apport d’eau suffisant pour arroser les cultures à des centaines de kilomètres à la ronde.
Le niveau des eaux fluctue de 15 mètres au cours de l’année, faisant passer le El Salto d’une taille de 14 000 à 27 000 acres. À l’eau haute, on y découvre plus de 85 km de rivage.
ENSEMENCEMENTS
Selon certaines données, à la suite du remplissage du réservoir, les autorités gouvernementales y auraient déposé 10 000 alevins d’achigan à grande bouche de souche floridienne. Elles ont aussi enrichi le tout avec une source de nourriture fort profitable pour les bass : le tilapia.
Il semblerait également que Billy Chapman, le propriétaire et fondateur de la pourvoirie Angler’s Inn qui nous a reçus, aurait transporté avec son père 60 000 autres alevins d’achigan de même souche et les aurait ensemencés à son tour.
Certaines études ont démontré que les eaux chaudes et riches de cet environnement prospère accentuent la croissance des grandes gueules et qu’elles gagnent près deux livres par an. En 1995, par exemple, après seulement 10 ans d’existence dans ce grand bassin naturel, ils ont trouvé un achigan de 16 lb, mort à la surface, avec un tilapia coincé dans la bouche. En mai 2002, un habile pêcheur a berné un monstre de 18,8 lb. Vous voyez le genre.
C’EST UN DÉPART
Le 17 février, avec mon copain Pascal Marin, nous nous envolons avec le transporteur aérien Aeroméxico. L’itinéraire comprend un vol jusqu’à Mexico City, puis un autre jusqu’à Mazatlan. Il ne reste alors plus que 1 h 45 min de fourgonnette avec chauffeur pour se rendre jusqu’à la pourvoirie.
Arrivés à destination, on s’empresse de déballer nos leurres et nos moulinets, que nous installerons sur les cannes de qualité qu’ils nous prêtent pour notre excursion de cinq jours. Après avoir vogué seulement cinq minutes sur le réservoir, le bal commence. Mon chum Pascal hisse des eaux une 7 lb, suivie immédiatement d’une 8 lb.
J’attache une offrande que je lance au loin et je manque un aussi gros poisson qui la recrache en sautant à la surface.
PARLONS PÊCHE
Au El Salto, on exploite surtout les berges rocheuses escarpées, les hautsfonds et les nombreux arbres et cactus morts, submergés dans l’eau.
Lors de notre visite, les spinnerbaits à double lame de ½ et ¾ d’once Booyah Covert, War Eagle et Strike King Premier étaient les plus productifs. Nous les équipions avec un leurre remorque comme le Sassy Swimmer ou le Yum Pulse. Les teintes imitant la robe des menés ou avec de la chartreuse et du bleu fonctionnaient très bien. Le Thunder Cricket nous a également aidés à prélever de beaux spécimens, tout comme les poissons nageurs ventrus Big O, Norman Deep Little N, Bomber Fat Free Shad et autres du genre. Le « plastico », comme le disait notre guide Lorenzo, sous forme de vers de 7 à 10 pouces ou de salamandres, montés à la texane ou en Carolia rig plaisait fortement à ces ogres, tout comme les jigs Booyah Mobster et Hack Attack dotés d’une écrevisse de 4 po.
L’offrande qui a généré le plus d’attaques, toutes tailles confondues, a été le Comida Mister Twister 5 po de couleur vert citrouille monté wacky.
Nous avons capturé en moyenne de 25 à 60 grandes bouches, dont le poids variait de 500 g à 8 ½ lb, par sortie d’une durée de 4 à 5 heures. La deuxième fin de journée, dans une baie de la taille d’un terrain de football où le vent frappait, nous avons croisé une bande de poissons de la même classe d’âge. Le plus surprenant et incroyablement amusant, c’est que 21 prédateurs de 5 à 7,1 lb se sont rués sur nos leurres. Comme tous les autres pêcheurs sur place, nous avons eu l’impression d’avoir échappé les records du monde, mais ça, c’est la pêche.
DÉROULEMENT
À 5 h 20 le matin, on cogne à votre porte avec un café ou un jus. Le déjeuner est déjà prêt. On pêche de 6 à 11 h, puis c’est le lunch vers 11 h 30. La pêche reprend après la siesta entre 13 h 30 et 14 h jusqu’à la noirceur, vers 18 h. Après l’apéritif, c’est le souper, et rares sont ceux qui veillent plus tard que 21 h.
La bouffe est vraiment exquise, le service fantastique, la pêche mémorable et extraordinaire, mais la chambre où nous avons logé était peu invitante et d’un goût douteux. Pour le reste, je peux faire un X sur ma