Le Journal de Montreal

La grande arnaque des bureaux de crédit

Selon mon institutio­n financière, mon score au bureau de crédit TransUnion me place parmi les pires consommate­urs au pays. Un score de 620, dans les basfonds, entre les fraudeurs et les cyberpirat­es.

- Francis.gosselin @quebecorme­dia.com

Je suis pourtant un gars à son affaire. Mais TransUnion, une entreprise américaine basée à Chicago, semble croire le contraire. Et cette entreprise déclare, à tous ceux qui consultent mon dossier de crédit, que je suis un mauvais payeur.

Il y a deux ans, je me suis fait voler mon identité.

En utilisant mes informatio­ns personnell­es, quelqu’un que je ne connais pas a acheté un iPhone neuf, à crédit. Les paiements mensuels n’ont pas été faits, et le compte a été transféré à une agence de recouvreme­nt, qui en a informé TransUnion.

Excellente nouvelle pour l’économie canadienne !

Depuis un an, j’ai passé plus de 15 heures au téléphone, avec TransUnion, Virgin, ma banque, l’Office de la protection du consommate­ur, la Commission d’accès à l’informatio­n et l’Autorité des marchés financiers. J’ai envoyé des papiers, reçu des papiers. Rien n’y fait.

Ma cote de crédit est encore de 620, et TransUnion, deux fois, a « mené une enquête » et est arrivée à la conclusion que « tout était normal ».

Une compagnie qui détient à mon sujet des données personnell­es fausses me dit, « après enquête », que c’est moi le problème.

VOS INFORMATIO­NS À VENDRE

Tous les bureaux de crédit qui gèrent les informatio­ns financière­s des Canadiens sont des entreprise­s étrangères.

Leur modèle d’affaires consiste à recueillir, sans notre permission, des informatio­ns sur nous et à les revendre sous la forme de dossiers de crédit, d’analyses de marché et de données marketing.

Pour ces entreprise­s, vous n’êtes pas un client, vous êtes le produit qui est vendu.

Il est donc normal que, quand j’appelle, je sois le dernier de leurs soucis. Une petite irrégulari­té, bien qu’elle me gâche la vie depuis plus d’un an maintenant, est sans aucune importance pour ces multinatio­nales.

Elles vendent des données agrégées et n’ont donc pas le temps de s’occuper de chaque petit consommate­ur insatisfai­t.

Pourtant, une enquête de Consumer Reports publiée en 2021 dévoilait qu’un tiers des consommate­urs avaient constaté au moins une erreur dans leur dossier de crédit.

Comme l’écrit le rapport, le système en place est complèteme­nt brisé, exploite des données personnell­es à des fins lucratives, sans aucune forme de contrôle, et tout le monde semble trouver cela normal.

Peut-être, au lieu de faire des « Paniers bleus », devrait-on s’intéresser à cette grande arnaque et protéger les Québécois contre ces prédateurs numériques étrangers

DRÔLE DE RAPPORT DE CONFIANCE

En 2017, le bureau de crédit Equifax a été victime d’un des plus grands vols de données jamais commis. Des noms, numéros de téléphone, cartes de crédit et numéros d’assurance sociale ont été dérobés par un groupe criminel chinois.

Ces données, rappelons-le, sont recueillie­s et gardées sur des serveurs, aux États-Unis, sans que vous ayez donné votre consenteme­nt.

Equifax s’est fait voler les données de 147 millions de personnes. L’entreprise, dont la valorisati­on boursière a augmenté de 88 % depuis 2017 pour atteindre 34 milliards $ US cette année, a dû payer 425 millions $ US en dommages.

Environ 3 dollars américains par client lésé.

Il y a quelque chose d’anormal dans ce système.

Peut-être, au lieu de faire des « Paniers bleus », devrait-on s’intéresser à cette grande arnaque et protéger les Québécois contre ces prédateurs numériques étrangers.

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PHOTO ADOBE STOCK Le siège social de TransUnion, à Chicago.

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