Quand François Legault rencontre Justin Trudeau...
C’est jour de rencontre entre François Legault et Justin Trudeau. Demandée par M. Legault pour parler d’immigration, elle servira surtout de test pour son autonomisme fédéraliste dont la récolte, jusqu’à maintenant, est plutôt mince.
Quand deux premiers ministres en chute libre dans les sondages se rencontrent, difficile toutefois de prévoir ce qu’il en sortira. Sans oublier qu’au-delà des sourires obligés, les atomes crochus entre les deux hommes sont aussi rares qu’un rendez-vous médical rapide au Québec.
Test il y aura donc pour M. Legault. Jeudi, on apprenait en effet de sa bouche même qu’il présenterait aujourd’hui une demande formelle à M. Trudeau pour l’entièreté des pouvoirs en immigration. Vaste commande...
Cette annonce est venue en réponse au chef péquiste, Paul St-Pierre Plamondon, qui, depuis des semaines, le talonne sur le peu de résultats concrets dans la filière « autonomiste » de la CAQ.
Ce vide relatif est d’autant plus étonnant que dès 2015, M. Legault s’engageait, s’il prenait le pouvoir, à livrer 21 demandes autonomistes musclées.
ADQ SUR LES STÉROÏDES
Il disait viser les pleins pouvoirs en immigration, le contrôle des ports au long du Saint-Laurent, des milliards en transferts fédéraux sans condition, une déclaration de revenus unique, etc. Bref, un genre d’ADQ sur les stéroïdes.
Il jurait qu’une fois au pouvoir, la CAQ réussirait le tout sans grandes messes constitutionnelles. Sa baguette magique serait la « troisième voie » qui, dans les faits, est un vieux fantasme nationaliste québécois.
Son approche au sein du Canada, promettait-il, serait donc « progressive, réaliste et pragmatique ». M. Legault prédisait même que pour le fédéral, ce serait « très difficile, sinon impossible de refuser ce qui est demandé par beaucoup de Québécois ». Oups.
Presque deux mandats au pouvoir plus tard, la plupart des demandes de la CAQ ont disparu du radar. Avec un PQ en avance dans les sondages, pour M. Legault, cette situation devient de plus en plus malaisante.
Résultat : pour sa grande demande à Justin Trudeau, François Legault joue gros. Sa popularité affaiblie, s’il en ressortait bredouille comme d’habitude, sa carte autonomiste ne vaudrait plus cher à la tombola des demandes périlleuses.
QUEL EST LE PLAN B ?
D’où la question que lui adressait jeudi le chef péquiste : que compte faire M. Legault « si, concrètement, Justin Trudeau dit non à la demande fondamentale de rapatrier les pouvoirs en immigration, une question de survie de la nation pour le premier ministre ? ».
« Il y a des options qui se présentent, a dit M. Legault, on est déjà en train de les évaluer. » C’est bien la grâce qu’il doit se souhaiter. D’autant plus qu’il se refuse à tenir un référendum sectoriel sur les pleins pouvoirs en immigration.
Et s’il refuse, c’est parce qu’il sait que même avec un Oui majoritaire, le fédéral, tout en négociant pour la galerie, pourrait refuser de les lui accorder.
Que fera donc M. Legault si Justin Trudeau, au-delà de se dire peut-être prêt à examiner un meilleur soutien pour les demandeurs d’asile ou autres dossiers, lui redit non à sa demande des pleins pouvoirs en immigration ?
Quel sera le Plan B du premier ministre du Québec ? Quelles seront ces options qu’il dit être en train d’évaluer ? Existent-elles ? Si oui, les partis d’opposition auront hâte de les entendre.
À moins, bien sûr, d’une miraculeuse épiphanie autonomiste de Justin Trudeau. Auquel cas, même le Frère André en resterait bouche bée...