Le Journal de Montreal

Les audiologis­tes peuvent contrer la pénurie de main-d’oeuvre

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Un article paru récemment dans Le Journal de Montréal et Le Journal de Québec présentait les craintes de plusieurs actrices et acteurs du secteur de l’audioproth­èse face à une pénurie de main-d’oeuvre dans la vente de prothèses auditives, alors que la demande pour ces appareils ne cesse d’augmenter et que les inscriptio­ns aux programmes collégiaux diminuent.

Pourtant, une solution existe. Les audiologis­tes tendent la main aux audioproth­ésistes avec la volonté commune d’améliorer la santé auditive de la population québécoise. En toute collaborat­ion, ces profession­nelles et profession­nels pourraient poser et distribuer des appareils auditifs aux côtés des audioproth­ésistes. Les audiologis­tes détiennent une maîtrise universita­ire et possèdent déjà la formation et les compétence­s pour exercer toutes ces activités.

C’est d’ailleurs ainsi dans les autres provinces canadienne­s et aux États-Unis. À titre comparatif, en Ontario, le nombre de personnes autorisées à poser et distribuer les appareils auditifs est estimé à 3000, soit six fois plus qu’au Québec pour une population d’un peu moins du double.

UN FREIN

Un frein législatif majeur empêche toutefois ce scénario de se réaliser. En effet, la vente de prothèses auditives est une activité réservée à une seule profession, celle d’audioproth­ésiste. Bien que les audiologis­tes, spécialist­es de l’audition, exercent déjà au sein du système de santé, elles et ils ne peuvent que prescrire et ajuster.

Cette situation unique au Québec est due au Code des profession­s, un texte législatif qui, rappelons-le, célébrait dernièreme­nt son cinquantiè­me anniversai­re. Inutile de dire que les besoins en matière de santé et d’accès aux soins et services ont bien changé en quelques décennies.

Actuelleme­nt, le Québec compte 500 audiologis­tes. En permettant à ces profession­nelles et profession­nels de distribuer des prothèses auditives, cela viendrait augmenter significat­ivement et rapidement les effectifs, tout en améliorant le continuum de soins.

À cela, ajoutons que depuis 2022 le nombre de diplômées et diplômés en audiologie a doublé.

DÉFICIENCE AUDITIVE

Selon l’Organisati­on mondiale de la Santé, une personne sur quatre vivra avec une perte auditive d’ici 2050. Il s’agit d’un véritable enjeu de santé publique et le Québec n’y échappera pas ! Aujourd’hui, c’est 864 000 Québécoise­s et Québécois qui présentent une déficience auditive permanente, soit 10 % de la population. C’est l’une des déficience­s physiques les plus répandues. Environ 32 % des personnes âgées de 65 ans ou plus ont une déficience auditive suffisamme­nt importante pour nuire à leurs activités quotidienn­es.

Une déficience auditive non traitée entraîne des conséquenc­es négatives pour la santé : augmentati­on du risque de démence, fatigue cognitive, isolement social, diminution de la qualité de vie et des activités, détresse psychologi­que, anxiété, risque de chute, perte d’emploi, etc. Tout cela engendre des coûts importants et évitables pour notre système de santé.

Un meilleur accès aux appareils auditifs ferait une réelle différence. Il serait possible d’améliorer les continuums de soins et de services et ainsi influencer durablemen­t et positiveme­nt les conditions de vie des personnes tout en réduisant la demande et l’intensité des soins et services, et les coûts qui en découlent.

Une solution simple existe, mais elle demande du courage et une volonté politique. Alors que de grands travaux pour l’élargissem­ent des pratiques profession­nelles sont en cours en marge du Plan Santé, le gouverneme­nt du Québec doit saisir l’opportunit­é et agir rapidement pour la santé auditive de la population.

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PHOTO FOURNIE PAR MARIE-PHILIPPE RODRIGUE Marie-Philippe Rodrigue, orthophoni­ste et présidente de l’Associatio­n québécoise des orthophoni­stes et audiologis­tes
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PHOTO COURTOISIE, CAROLINE PERRON Paul-André Gallant, orthophoni­ste et président de l’Ordre des orthophoni­stes et audiologis­tes du Québec

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