Le français de nos jeunes : la faute des anglos ?
Il y a deux atouts classiques dans le jeu de nos politiciens depuis des lustres : c’est la faute du fédéral et… c’est la faute des anglos ! Nos enfants ne savent pas écrire le français ? Ne cherchez pas les causes, blâmez l’anglais ! C’est plus facile !
Je suis né en Ontario et j’ai grandi ici dans une famille de 10 enfants avec une maman canadienne-française et un papa d’origine irlandaise. Les aînés, dont je fais partie, ont tous fait leurs études en anglais. Les plus jeunes ont été dirigés vers l’école française, nos parents réalisant qu’une bonne connaissance du français était désormais essentielle.
LES DEUX SOLITUDES LINGUISTIQUES
La fratrie est aujourd’hui répartie de Saint-Lazare à Shanghai, en passant par Calgary et la Californie, mais nous avons tous en commun une bonne connaissance du français et un amour pour le Québec.
J’ai toujours eu un pied dans chacune des « deux solitudes » linguistiques. Je connais bien les codes des deux bords et, croyez-moi, il y a beaucoup à décoder.
François Legault aime rappeler qu’il a grandi à Sainte-Anne-de-Bellevue, dans le « West Island » où « les anglos » pullulent. De manière célèbre, il aurait même dit lors de sa soirée d’investiture qu’il haïssait les anglos. Il nie la boutade, mais à la lumière de ses agissements, c’est à se demander s’il n’y a pas toujours quelque chose de problématique dans sa manière de concevoir la relation entre « nous » et « eux autres ».
UNE APPROCHE DE BUREAUCRATE
Les contrecoups de la révision récente de la loi 101, la Charte de la langue française, commencent à être mieux compris et ce n’est pas drôle.
Certains se sont offusqués d’un reportage de CBC démontrant l’impact de ces nouvelles règles sur l’affichage des raisons sociales. Comme mon collègue Luc Lavoie l’a si bien dit, l’absurdité des exemples est un fidèle reflet de l’absurdité des changements imposés. En d’autres mots, arrêtez de blâmer le messager !
On peut ajouter les électroménagers et d’autres produits qui sont fabriqués pour un marché planétaire avec « on/off » qui seront bannis ici. Bonne chance avec ça !
Par diktat bureaucratique, la CAQ refuse d’émettre des certificats d’admissibilité pour l’école anglaise, pourtant toujours garantis par la loi. Bien sûr, ce sera contesté devant les tribunaux et, bien sûr, il y aura des grincements de dents.
On coupe le financement des universités anglophones en brandissant des chiffres totalement factices. Aucune étude sérieuse, juste une attaque en règle, car « on entend trop d’anglais dans la rue ».
Mon préféré c’est un document que vient de publier l’OQLF sur l’utilisation du français dans les établissements de santé reconnus bilingues.
Voici une citation textuelle de leur « Aide-mémoire » d’une quinzaine de pages : « Le contenu de cet aide-mémoire n’a aucune valeur juridique… ». Avec raison, car c’est truffé de fausses informations qui relèvent des souhaits des bureaucrates de la langue et non de la volonté du législateur.
Il faut éviter de faire en sorte que le français soit perçu, surtout par les jeunes, comme quelque chose qu’on « impose ». Célébrons plutôt cette langue et sa culture que nous partageons avec joie et fierté.