L’affaire Delisle et la justice à deux vitesses
Considérée comme du jamais-vu dans l’histoire judiciaire au Québec, l’affaire Jacques Delisle démontre comment notre système de justice est susceptible de fonctionner à deux vitesses lorsque vient le temps de bénéficier d’une défense pleine et entière.
« Que ce soit pour M. Delisle autant que pour le système, ça a dû coûter une fortune extraordinaire », a observé en entrevue l’avocat Rénald Beaudry, mercredi, à propos de l’éventail de procédures utilisées.
On venait d’apprendre qu’après
15 ans de cette saga judiciaire, l’ex-juge, accusé du meurtre de sa femme, avait décidé de plaider coupable pour homicide involontaire.
C’est tout un coup de théâtre, considérant que l’ex-magistrat a toujours clamé son innocence. Il continue néanmoins de soutenir la thèse du suicide de sa femme, laquelle était contestée par la poursuite.
NOMBREUSES DÉMARCHES
L’avocat René Verret a aussi fait valoir, dans nos pages, que bien qu’inhabituelles et inédites mises bout à bout, l’ensemble des démarches effectuées représentaient le droit le plus strict de l’accusé à une défense pleine et entière.
Bien sûr, Jacques Delisle avait droit, comme tout citoyen, à une défense pleine et entière. Cela pouvait justifier toutes les démarches qu’il a entreprises, en Cour d’appel et en Cour suprême, et en déposant une demande de révision ministérielle à Ottawa.
Va pour le principe.
POCHES PROFONDES
Mais dans la réalité, bien peu de gens auraient pu s’offrir les meilleurs juristes et de nombreux experts internationaux, comme ç’a été le cas pour Jacques Delisle. Les gens peu fortunés, on l’imagine bien, auraient rapidement manqué de moyens financiers et n’auraient sans doute jamais pu aller aussi loin.
Ou sinon, ils auraient mis tellement de temps à réunir les fonds pour effectuer autant de démarches qu’ils n’y seraient jamais arrivés de leur vivant.
Est-ce donc dire qu’il faut avoir les poches profondes pour s’offrir une défense pleine et entière ?
Le cas Delisle laisse croire que ça peut être le cas, et c’est choquant.