Le Journal de Montreal

Regard nouveau sur un classique

La pièce de théâtre de Tennessee Williams La ménagerie de verre a été judicieuse­ment modernisée

- BRUNO LAPOINTE

Huit décennies entières après sa création, La ménagerie de verre s’offre une nouvelle vie sur la scène du Théâtre DenisePell­etier. Et c’est un tout nouveau regard – résolument moderne – qu’on jette aujourd’hui sur le classique de Tennessee Williams. « Il faut être respectueu­x de l’oeuvre originale. Mais il ne faut pas non plus être paralysé par ce respect », avance la comédienne Marie-Hélène Thibault.

Les personnage­s s’expriment dans un langage franc. Actuel. Et rien dans la mise en scène ne dégage le moindre parfum de poussière, même si l’oeuvre originale souffle cette année 80 bougies.

Ça, c’est grâce au travail de Fanny Britt et Alexia Bürger, respective­ment traductric­e et metteure en scène de cette relecture.

« Il y a quelque chose de très moderne, d’accessible. On reconnaît les mots et l’univers de Tennessee Williams, mais on a nettoyé la poussière et gratté pour faire ressortir toute la couleur et l’humour du récit », explique Marie-Hélène Thibault.

Ces mots de Tennessee Williams, ils nous font voyager dans l’Amérique des années 1930 où un jeune homme (incarné par Fabrice Yvanoff Sénat) souhaite ardemment quitter le domicile familial pour s’émanciper. Mais la culpabilit­é de laisser derrière lui sa mère névrosée (Marie-Hélène Thibault) et sa soeur souffrant d’une timidité maladive (Elisabeth Smith) viendront freiner ses élans.

« CASTING DALTONIEN »

La mère et la soeur sont blanches. Le fils, lui, est noir. Si on ne tient pas nécessaire­ment à expliquer cet élément sur scène, ce choix vient tout de même renforcer le sentiment d’aliénation du personnage principal, lui qui peine à trouver sa place autant au sein de sa famille que dans la société.

Le jeune Fabrice Yvanoff Sénat a en effet bénéficié d’un « casting daltonien », procédé de plus en plus utilisé pour prioriser le talent plutôt que l’origine ethnique ou culturelle. On l’a vu, entre autres, dans la populaire série Bridgerton, où des personnage­s historique­ment blancs sont campés par des comédiens aux origines diverses.

« Non seulement ça permet à des gens comme Fabrice de pouvoir jouer des classiques comme La ménagerie de verre, mais ça permet aussi à plusieurs jeunes de se reconnaîtr­e dans les personnage­s qu’ils voient sur scène. Tout le monde y gagne », explique MarieHélèn­e Thibault.

La ménagerie de verre est présentée jusqu’au 9 avril au Théâtre DenisePell­etier.

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