IXE-13, une série dans les trois X
Au lieu de dire : « C’est fameux ! », mon père disait toujours : « C’est dans les trois x ! ».
C’est sûrement ainsi qu’il aurait qualifié la série IXE-13 et la course à l’uranium qu’on peut visionner sur Illico depuis la mi-février et jusqu’à ce qu’elle atterrisse sur un réseau de télévision traditionnelle. Cette série de huit épisodes qu’on ne peut décrire sans des tas de superlatifs pourrait devenir l’un des plus beaux joyaux de l’histoire de notre télévision.
C’est rare qu’on puisse écrire que tous ceux qui ont participé à une série, de l’auteur jusqu’au coursier, tous sont responsables de son succès. Il n’y a pas de défaut dans La course à l’uranium. Aucune faille, aucun moment creux, aucune faute de goût, aucune réplique inutile. On est bien près de la perfection.
La première étoile de cette partie parfaite revient à Gilles Desjardins, peut-être l’auteur le plus studieux de notre télévision. L’un des plus créatifs et des plus personnels aussi. Gilles Desjardins, que j’ai connu à ses débuts il y a déjà plus de 30 ans, est un bûcheur et un solitaire. Un pince-sansrire aussi, ce qui explique les dialogues incisifs, abrasifs ou absurdes et parfois surréalistes des personnages de IXE-13.
RIEN À VOIR AVEC LE FILM
C’est faire injure à la série que laisser entendre qu’elle a quelque chose à voir ou qu’elle s’inspire de la comédie musicale IXE-13, le film que Jacques Godbout a réalisé en 1971 avec le groupe Les Cyniques.
L’impressionnante série de Desjardins a le mérite de rappeler l’oeuvre colossale de Pierre Daignault. Tous les Québécois se souviennent de lui pour son interprétation du père Ovide dans Les belles histoires des pays d’en haut de 1960 à 1970. Avant de remplacer son père Eugène dans ce rôle, Pierre Daignault, sous le pseudonyme de
Pierre Saurel, avait créé le James Bond des agents secrets canadiens.
Chaque semaine durant une vingtaine d’années, des milliers de Québécois se procuraient à l’épicerie, à la tabagie ou à la pharmacie un fascicule de 32 pages racontant les aventures étranges de l’Agent IXE13. Les 28 millions de fascicules vendus et quelque 44 romans policiers plus tard font de Pierre Daignault, alias Saurel, l’auteur le plus prolifique de tout le Canada.
UN RÉALISATEUR QUI SE RÉVÈLE
On ne dira jamais assez le mérite de Gilles Desjardins d’avoir ressuscité l’espion imaginé par Pierre Daignault et du réalisateur Yan Lanouette Turgeon de lui avoir donné un visage. Ce réalisateur assez discret jusqu’ici avait tout de même fait ses classes à la télévision et au cinéma, notamment avec Épidémie et Roche papier ciseaux. Dans IXE-13 ,il se révèle carrément génial.
D’abord par une distribution impeccable. On ne pourra jamais voir l’espion Jean Thibault autrement que sous les traits de Marc-André Grondin, comme on aura du mal à oublier les personnages extravagants que créent Julie Le Breton, Vincent Leclerc et Hugolin Chevrette.
Mais avant tout, c’est la façon de tourner qu’a mise au point le réalisateur Lanouette Turgeon qu’il faut retenir. Ce cinéaste malin arrive à faire oublier un budget modeste, utilisant presque juste des plans serrés et multipliant les huis clos et les éclairages nocturnes. Je n’ai jamais vu pareille ingéniosité pour faire revivre une époque qui aurait nécessité un budget que seules les plus grandes chaînes et les plateformes internationales peuvent se permettre.
Au prochain gala des Gémeaux, l’Académie pourrait faire l’économie du jury pour la meilleure série en accordant d’ores et déjà la palme à
!