Le promoteur d’une halte routière dénonce une concurrence déloyale
Le gouvernement du Québec va construire une halte de 10 M$ à 4 km de la sienne
Québec s’apprête à investir plus de 10 millions de dollars pour reconstruire une halte routière désuète située à moins de 4 kilomètres d’une grande halte privée flambant neuve sur l’autoroute 20. Son promoteur crie au « gaspillage » de fonds publics et à la concurrence déloyale.
Depuis son inauguration en 2018, près de 15 millions $ ont été investis dans la halte routière privée La Porte de l’Érable, accessible via la sortie 228, à mi-chemin entre Québec et Montréal.
En plus d’une essencerie, on y retrouve deux bannières de restauration rapide, une grande salle à manger, une quarantaine de bornes de recharge rapide Tesla et des services pour les camionneurs.
Lorsque Samuel Baril s’est lancé dans cette aventure avec ses partenaires, il y a cinq ans, c’était notamment pour combler « un manque évident de services sur l’autoroute » 20, à Saint-Louis-de-Blandford, près de Princeville et Plessisville.
C’était aussi sans savoir que Québec retaperait à grands frais la halte routière de Sainte-Anne-du-Sault est, située à seulement quelques minutes de route.
Le projet de nouvelle halte publique, au kilomètre 224 de l’autoroute 20, comprend la démolition de la vieille « cabane brune » actuelle, la construction d’un nouveau bâtiment avec une salle à manger, l’ajout de bornes de recharge rapide et l’aménagement d’un stationnement plus sécuritaire.
L’endroit a souvent fait les manchettes en raison de l’état pitoyable du bâtiment datant des années 1970 qu’on y retrouve… et des activités sexuelles qui ont déjà forcé le MTQ à restreindre l’accès au boisé situé derrière avec des blocs de béton.
IL APPRÉHENDE UN DÉDOUBLEMENT
M. Baril sait bien que la halte publique de Sainte-Anne-du-Sault manque d’amour, depuis longtemps.
Il s’étonne toutefois de voir que Québec s’apprête à y investir en fonds publics autant sinon plus que ce que le secteur privé a dépensé pour sa halte, seulement 4 kilomètres plus loin.
« En tant qu’entrepreneur commerçant, évidemment, je m’inquiète, entre autres, d’une compétition commerciale », a reconnu M. Baril en entrevue avec Le Journal.
« Pourquoi ne pas s’assurer de combler un besoin de sécurité qui existe certainement ailleurs ? » s’interroge l’homme d’affaires, qui appréhende un dédoublement de l’offre une fois la halte publique rénovée.
Il croit que le gouvernement aurait pu décider de condamner la halte de SainteAnne-du-Sault est, comme il l’a fait récemment pour celle de Villeroy est.
Le ministère des Transports, de son côté, fait valoir qu’il s’agit d’une des haltes routières les « plus fréquentées au Québec ».
« Sa situation géographique est optimale », a fait valoir le porte-parole du ministère, Nicolas Vigneault.
« Le projet de modernisation de la halte routière n’ajoute aucune offre commerciale à la halte existante », a ajouté le porte-parole du MTQ.
« CONCURRENCE DIRECTE »
Un rapport d’évaluation assez sommaire des impacts et retombées de la modernisation de la halte routière de Sainte-Annedu-Sault remis au MTQ en 2020 traite pourtant d’une « concurrence directe » avec la halte privée, notamment en ce qui a trait à l’offre de bornes de recharge et de machines distributrices.
La reconstruction de la halte de SainteAnne-du-Sault, qui pourrait être rebaptisée « Halte de Daveluyville », fait partie d’un vaste plan de modernisation de 150 millions $ annoncé en 2022 pour plusieurs infrastructures du même type (voir tableau).
La nouvelle halte de Villeroy ouest, inaugurée en 2020, a coûté 12,8 millions $.