Les détraqués
Avez-vous déjà vu le film The Crazies ?
Réalisé en 1973 par George A. Romero (qui, cinq ans auparavant, avait terrorisé le public avec son film de zombies La Nuit des morts vivants), ce nanar 100 % navet raconte ce qui se passe dans une petite ville fermière de l’Iowa lorsqu’un virus qui rend les gens hyper agressifs se répand dans la population.
À l’époque, The Crazies (qui est sorti en version française sous le titre Les détraqués) était un film d’anticipation.
Aujourd’hui, il pourrait passer pour un documentaire.
SORTEZ-MOI D’ICI !
C’est l’impression qu’on a lorsqu’on feuillette les journaux et écoute les bulletins d’infos : une épidémie de rage fait – c’est le cas de le dire – rage dans nos sociétés.
Quand ce n’est pas un professeur qui se fait casser le nez par un élève de 7 ans, c’est un sexagénaire qui se fait attaquer dans le métro par deux voyous intoxiqués, un préposé aux bénéficiaires qui se fait agresser dans un corridor d’hôpital, un politicien qui se fait menacer de mort ou une contrôleuse routière qui se fait pousser sur l’autoroute par un conducteur déchaîné muni de couteaux.
On dirait que tout le monde est en train de virer sur le top.
Qui sait ?
Romero avait peut-être raison : un virus échappé d’un laboratoire est en train de transformer nos villes en jungles.
Tiens, ça pourrait être une idée pour la prochaine saison de Sortez-moi d’ici : au lieu d’envoyer les participants dans la jungle au Panama, tu les parachutes au beau milieu du centre-ville de Montréal.
Ma blonde Sophie m’a impressionné en marchant sur un fil de fer 200 mètres au-dessus du sol, mais pas sûr qu’elle aurait assez de courage pour marcher sur la rue Sainte-Catherine à 19 h le soir.
Après tout, elle est déterminée, mais elle n’est pas suicidaire...
C’est comme si on n’avait plus de « gasket ». On passe de zéro à 100 en deux secondes.
C’est bien simple, chauffeur d’autobus est devenu un métier dangereux. Les chauffeurs veulent qu’on installe des cabines en plexiglas pour les protéger des passagers.
Tout juste si on ne va pas armer les brigadiers, bientôt.
PERVERS DANS LE MÉTAVERS
En fait, oui, il y a un virus qui a déstabilisé notre équilibre mental, un virus hyper puissant fabriqué dans des labos de Silicon Valley : « les internet ». Ça a tout changé. D’abord, ça nous a rendus impatients.
On est tellement habitué que tout se fasse vite (deux clics, et tu peux te faire parvenir trois gallons de lait de jument fermenté provenant d’une yourte située au fin fond de la Mongolie), qu’on capote dès que le moindre de nos désirs n’est pas satisfait dans la seconde.
Un signaleur routier nous dit d’attendre, le temps qu’un bulldozer traverse la rue ?
Vite, on sort de notre char et règle ça à coups de tapes sur la gueule.
Et deuxièmement, ça a rendu l’incivilité cool.
Pourquoi échanger des points de vue ou débattre quand tu peux insulter ?
Pas besoin d’aller dans le métavers pour se croire tout permis et se conduire en goujat. Le monde est devenu un énorme métavers !
Et – ce qui est vraiment étrange – plus les gens deviennent violents, moins on donne des sentences sévères !
Non seulement les libérations conditionnelles sont devenues automatiques (au 2/3 de ta peine, tu sors, même si tu es un pédo avec la bizoune en feu), mais les peines à purger à domicile sont de plus en plus courantes !
Le respect des droits individuels est devenu une religion d’État et la moindre manifestation d’autorité est perçue comme une agression.
Nous vivons dans un épisode de Caillou – avec la différence que le p’tit criss a 35 ans et qu’il s’est fabriqué une arme à feu avec l’imprimante 3 D de son père.
« Hon, Caillou, arrête de tirer en direction des voisins ! Tu es incorrigible ! »
La question n’est plus : Quel monde allons-nous laisser à nos enfants ? Mais : Quels enfants allons-nous laisser à notre monde ?
On dirait que le Québec est aux prises avec une épidémie de rage...