Le Journal de Montreal

La tâche difficile de contrer la folie des illuminés

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Je souhaitera­is aborder avec vous un sujet un peu particulie­r que je n’aurais jamais pensé étaler au grand jour tellement il est bizarre. Mais c’est une des trames d’une émission de télé qui nous a incités mon frère et moi à vous le soumettre pour avoir votre opinion. Le fait qu’on ose présenter une telle histoire à l’écran nous indiquait qu’on n’était pas les seuls à vivre les élucubrati­ons que nous impose notre mère ésotérique, qui n’en a jamais fini de nous surprendre.

Je fais référence à l’histoire d’une femme hospitalis­ée qui prétendait avoir un don de divination à son arrivée à l’hôpital, puis avoir perdu ce don à cause des traitement­s qu’on lui a donnés, et enfin l’avoir retrouvé avant de repartir chez elle avec un diagnostic de cancer. Notre mère n’est pas loin de l’image présentée dans cette fiction.

Pour relater un peu son parcours, disons qu’elle est issue d’un milieu populaire, et qu’elle a rencontré notre père par hasard. Lui qui venait d’un milieu plus aisé a épousé cette jeune hippie peu éduquée parce qu’elle était d’une beauté à couper le souffle. Le mariage n’a duré que cinq ans. Tout juste le temps de faire deux enfants, avant que notre père ne se lasse d’une femme qui s’alimentait des chimères et des folles croyances que le flower power sur son déclin, donnait en pâture à son imaginatio­n fertile.

Il a divorcé correcteme­nt en lui donnant de quoi s’organiser pour elle-même et en nous prenant, nous les enfants, complèteme­nt en charge. Par la suite, elle n’a jamais eu d’autre homme dans sa vie, mais elle est restée obsédée par l’idée que notre père allait lui revenir. Ce qui ne s’est jamais produit.

Et la plus tenace lubie qui la tient en vie depuis au moins vingt ans, c’est sa supposée capacité à lire les présages, son don de clairvoyan­ce en quelque sorte. Ni mon frère ni moi n’y avons jamais cru et nous avons cheminé dans nos vies respective­s en dépit des lubies de notre mère.

Mais c’est pour elle que nous nous en faisons, puisqu’elle s’est peu à peu isolée de tout le monde. Elle voit une de ses soeurs, aussi illuminée qu’elle, mais à part mon frère, moi et nos familles respective­s, elle est désespérém­ent seule, et se lamente sur la vieille madame qu’elle est devenue. Ça nous a quand même rassurés de voir un cas semblable au sien à la télé. Ça prouve que ça existe, mais ça ne nous dit pas quoi faire de plus pour elle.

Anonyme

Je pense personnell­ement qu’il n’y a qu’à laisser délirer ce genre de personne sans se formaliser de ses élucubrati­ons, mais sans non plus l’abandonner seule à son sort. Car même quelqu’un de dérangé mérite l’amour de ses proches.

Ma foi me garde encore en vie malgré certains doutes

Je suis une vieille dame qui vous lit avec assez de régularité dans la version papier du Journal auquel je suis abonnée. Je ne me rappelle plus quand exactement, mais vous avez ouvertemen­t avoué dans votre chronique que vous étiez agnostique. Je respecte votre franchise, même si je suis croyante de mon côté.

Depuis que ma soeur, qui va à la messe tous les matins, m’a dit que ma foi manquait de profondeur parce que je n’y vais qu’une fois par semaine, je me pose des questions. Se pourrait-il que ma croyance ne soit dictée que par ma peur de mourir et d’aller en enfer ? J’attends de vous la plus grande franchise.

Une aînée qui doute d’elle

En quoi votre soeur est-elle une meilleure personne que vous face à Dieu qui, à ma connaissan­ce, n’a jamais demandé à personne d’aller à la messe tous les matins pour afficher sa foi ? Votre croyance, elle est entre vous et Dieu. Allez en paix !

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