Le Journal de Montreal

La plateforme chinoise Temu poursuivie au Québec

- JULIEN MCEVOY

Quand c’est gratuit, c’est nous le produit, dit-on en ligne. Temu, le concurrent chinois et bon marché d’Amazon, est en train d’élever cet adage au rang d’art, plaide une avocate québécoise, en volant les données de tout le monde et de son beau-frère.

« Rien n’est gratuit. On paye 2 $ pour un bol à salade en bois, mais on se fait piquer nos données », accuse Andrea Grass, du cabinet Consumer

Law Group.

L’avocate vient de déposer une demande d’autorisati­on d’exercer une action collective en Cour supérieure. Tous les

Québécois qui ont déjà utilisé

Temu ou qui ont eu des communicat­ions électroniq­ues avec des utilisateu­rs de Temu sont inclus.

Le géant soutenu par la Chine serait particuliè­rement friand de biométrie — caractéris­tiques faciales, empreintes digitales et vocales — ainsi que de localisati­on géospatial­e des utilisateu­rs.

INQUIÉTANT

Chacun des 100 millions de télécharge­ments de son applicatio­n en Amérique du Nord et en Europe aurait mené au larcin. Son logiciel espion s’empare dès lors, assure l’avocate, des infos de l’usager ainsi que de celles de sa liste de contacts.

« Ça veut dire tout le monde. On a tous quelqu’un qui a Temu dans nos contacts », déplore cette juriste de 41 ans partie en guerre contre la plateforme d’achats.

Le portrait donne froid dans le dos, reconnaît-elle, surtout que ces données doivent bien être collectées pour une raison. Avec le gouverneme­nt chinois « pas très loin derrière », ça ne peut pas être seulement à des fins publicitai­res.

Temu serait aussi capable d’accéder au téléphone de ses utilisateu­rs et de lire leurs messages privés, de suivre leurs notificati­ons et de modifier leurs paramètres, lit-on dans la poursuite.

RÉCOLTE DE DONNÉES

La plateforme chinoise est offerte aux Québec depuis l’an dernier. Le Journal rapportait samedi à quel point ses prix défient toute logique. Son ascension ici, comme aux États-Unis ou en Europe, est également due à ses importante­s dépenses publicitai­res. On calcule qu’elles atteindron­t 5 milliards $ US pour 2023 et 2024, ce qui causerait une perte de 7 $ par vente à l’entreprise.

Andrea Grass est convaincue que sous ses couverts de magasin à 1 $ virtuel, Temu accumule les pertes au profit de sa récolte de données. Reste à savoir dans quel but.

« On espère que les intentions ne sont pas viles, mais on sait que la Chine est derrière Temu », lance l’avocate.

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Avocate ANDREA GRASS

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