Le Journal de Montreal

Un système imparfait... qui fonctionne

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Des milliers d’ex-détenus issus de tous les horizons deviennent chaque année des membres actifs de la société grâce au système carcéral canadien et québécois malgré ses imperfecti­ons.

« La réinsertio­n sociale fonctionne et on le voit. Mais il y a encore du travail à faire », observe David Henry, criminolog­ue et directeur général de l’Associatio­n des services de réhabilita­tion sociale du Québec.

L’ex-chanteur électro-pop PierreFran­çois Blondeau, alias Midaz, emprisonné 11 mois pour agression sexuelle, en est la preuve vivante, lui qui a décidé de lancer une fondation pour prévenir les crimes de ce genre.

L’expert en criminolog­ie Jean-Claude Bernheim estime toutefois que les peines de moins de 6 mois pour les délits moins graves ne devraient pas exister. Selon lui, il s’agit d’une perte de temps.

« On les exclut de la société et on leur enlève leurs repères. Quand ils sont relâchés, ils sont dans une situation pire qu’elle l’était avant et ils ne sont pas encadrés. Ils n’ont pas le temps de réfléchir à leurs actes », explique-t-il.

C’est justement l’encadremen­t d’une peine fédérale de deux ans au pénitencie­r qui a aidé le rappeur Christian Dionne à se remettre sur le droit chemin, après une cavale de 5 ans en Colombie.

PLUSIEURS EMBÛCHES

Dans tous les cas, les ex-détenus se heurtent à plusieurs embûches au moment de leur retour dans la société. La recherche de travail étant souvent l’une des plus importante­s, comme a pu le constater l’ex-trafiquant Danny Mélasco, qui s’est buté à plusieurs portes closes.

« C’est pourtant l’un des facteurs les plus importants de réinsertio­n, parce que ça permet de subvenir à ses besoins, de se stabiliser dans un cadre de vie normal et de se créer un nouveau cercle social sain », affirme M. Bernheim.

« Plusieurs détenus qui ont reçu de longues sentences peinent aussi à s’y retrouver avec la technologi­e. Quelqu’un qui sort après 25 ans aujourd’hui n’a presque jamais vu de cellulaire, alors que notre vie est là-dessus de nos jours », lance de son côté M. Henry.

C’est précisémen­t la situation à laquelle a dû faire face Colin McGregor quand il a obtenu sa liberté en 2022, après 29 ans de pénitencie­r pour le meurtre de sa femme.

LES PORTES TOURNANTES

Si Le Journal a pu mettre en lumière plusieurs cas de succès du milieu carcéral, il n’en demeure pas moins que plusieurs individus échappent au système.

David Henry souligne que le taux de récidive après deux ans des détenus provinciau­x est de 50 % pour ceux qui sortent aux deux tiers de leur peine, sans encadremen­t. Cette proportion chute à 22 % lorsqu’ils passent d’abord par une libération conditionn­elle.

Au niveau fédéral, ce taux est d’environ 25 % dans les cinq années suivantes. M. Henry précise que les détenus sont suivis jusqu’à la fin de leur peine initiale, même s’ils sont libérés d’office aux deux tiers de leur peine, contrairem­ent au système provincial.

« Ce problème-là est bien documenté au Québec, c’est le phénomène des portes tournantes [...] On met énormément d’argent sur la détention et très peu sur les suivis », déplore le criminolog­ue.

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PHOTO STEVENS LEBLANC L’expert en criminolog­ie Jean-Claude Bernheim.

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