LE QUÉBÉCOIS QUI FASCINE LA PLANÈTE
Orane Ossowski est l’un des meilleurs mécanos du grand circuit américain
À travers les garages de la Montérégie et de l’Estrie, le nom des Ossowski résonne depuis des décennies. L’ADN de la mécanique et de la course automobile se transmet de génération en génération dans cette famille. Après les Patrick et Andrew Ossowski, c’est au tour d’Orane de faire sa marque dans les plus hautes sphères de la NASCAR.
Né à Saint-Hyacinthe, le Québécois de souche s’est exilé très jeune au pays du stock-car, en Caroline du Nord, quand son père, Patrick, a dégoté un boulot dans le département de la motorisation chez Hendrick Motorsports.
Il s’agit de l’une des meilleures écuries américaines, qui a compté dans ses rangs les Darrell Waltrip, Terry Labonte, Jeff Gordon, Jimmie Johnson, Dale Earnhardt Jr., etc. Le paternel a longtemps bizouné sur ces moulins qui ont dominé en NASCAR.
Avec ses nombreux rutilants bolides en piste, l’écurie compte 304 victoires en séries Cup depuis le début des années 80. Les Ossowski y sont associés depuis 1994. L’histoire d’Orane, 31 ans, est rattachée au neuvième titre acquis par Hendrick à la prestigieuse course du Daytona 500, à la mi-février dernier.
TOMBÉ DANS LA POTION MAGIQUE
Le mécano s’occupe de la voiture numéro 24 pilotée par William Byron depuis les saisons marquées par la pandémie.
Il est l’un des cinq membres à sauter le muret de béton et se précipiter sur le bolide quand il rentre aux puits de ravitaillement. Orane s’occupe de changer les deux pneus arrière, un art qu’il a peaufiné avec le temps et dans lequel il excelle. On reviendra d’ailleurs sur sa technique qui a révolutionné son métier.
« J’ai été élevé et j’ai grandi dans l’univers fascinant des sports motorisés, raconte celui qui visitait son père dans l’usine de Hendrick alors qu’il était haut comme trois pommes. Il préparait la voiture de Labonte et il y travaille toujours, mais dans un département différent. Il s’occupe de la fabrication des pièces des réservoirs.
« Comme j’ai toujours aimé les courses, je me suis fait engager quand j’étais encore à l’école secondaire, se souvient-il. Je travaillais à temps partiel dans l’usine des pièces en fibre de carbone. C’est au bout de trois ans que je me suis intéressé à une nouvelle tâche. Je voulais faire les arrêts aux puits. »
« C’EST NOTRE VIE »
Ossowski s’est donc fait la main et les dents sur les bolides des séries secondaires, comme les camionnettes. Il a ensuite fait son chemin jusqu’à la série Cup, où il a observé les mécanos à quelques pieds de distance de la fameuse voiture numéro 24 de Jeff Gordon.
« C’est drôle, car l’un de mes frères a réalisé une vidéo de notre vie de famille récemment. Et j’avais l’impression que nous étions toujours dans l’univers de la course. Nous y sommes toujours. Mon oncle et mon cousin travaillent aussi chez Hendrick. C’est notre vie », relate-t-il au bout du fil, en entrevue avec Le Journal.
PARMI LES MEILLEURES
L’équipe de ravitaillement de la voiture numéro 24 figure parmi les plus talentueuses, efficaces et rapides du plateau. L’an dernier, selon les statistiques compilées par la NASCAR, elle trônait au premier rang avec une moyenne générale de 11,07 secondes par arrêt. Elle venait aussi au 9e rang des arrêts les plus rapides avec une performance de 9,383 secondes enregistrées à Nashville.
Évidemment, il ne s’agit pas de la même rapidité qu’en Formule 1, où l’arrêt ne dure que l’instant d’un clignement d’oeil ou presque. En NASCAR, un homme s’occupe de soulever la voiture au cric, deux de déboulonner et reboulonner les roues en plus de celui qui les trimballe et un autre à porter l’immense canisse d’essence pour la ravitailler.
L’efficacité est donc primordiale dans la chorégraphie de quelques secondes pouvant virer à la catastrophe. D’ailleurs, en septembre dernier, Ossowski a littéralement pris en feu.
« Les chronos ont diminué de façon significative depuis quelques années. On réussit à effectuer un arrêt aux puits en tout juste neuf secondes, si ce n’est pas entre 8,5 et 9 secondes. À l’entraînement, on peut même le faire en sept secondes », explique-t-il.
UN RÊVE À DAYTONA
Il y a longtemps qu’il souhaitait célébrer sur « Victory Lane » à la plus prestigieuse course de stock-car au mythique circuit de Daytona. Un triomphe de sa voiture trônait au sommet de sa bucket list.
« Les mécanos ne pilotent pas, mais ils sont essentiels. Avec de bons services, la voiture gagne de précieuses places. Le Daytona 500, c’est notre Super Bowl. C’est l’objectif ultime. Quitter l’ovale avec la victoire, on ne le réalise pas. On le sent à notre retour au quartier général à Charlotte. »
Ce lundi-là de février, il a savouré le champagne sous les confettis, mais les célébrations furent de courte durée, car il devait retourner aux puits pour assurer le travail lors des arrêts de la voiture de Sammy Smith, en série Xfinity. Il est finalement rentré à la maison au petit matin.
« Je suis reconnaissant, car même de grands pilotes ne goûteront jamais à la victoire à Daytona. On ne le revivra peutêtre jamais. Il faut savoir savourer les moments semblables. »
S’il souhaite évidemment revivre cet événement, il espère aussi savourer une victoire au Brickyard 400 à Indianapolis, une autre course renommée, le championnat de la saison et même célébrer un jour au circuit Gilles-Villeneuve quand la série NASCAR y sera de retour.