Les élites canadiennes sont totalement déconnectées
On peut ramener à deux énoncés généraux l’ensemble des discours regroupés sous le parapluie woke.
Le premier est que les sociétés occidentales seraient profondément hostiles aux minorités sexuelles, ethniques et religieuses, et devraient avoir honte de leur passé et de leur présent.
Le second est que la parole et le ressenti du minoritaire doivent primer, puisqu’il veut s’émanciper de cette oppression, d’autant plus que la science, les lois, les normes et les valeurs sont des constructions sociales arbitraires imposées par la majorité.
Les gens restent solidement ancrés dans le bon sens et voient le wokisme pour ce qu’il est : un ramassis d’affirmations outrancières ou carrément fausses.
DONNÉES
Pourtant, quand j’écoute autour de moi, j’ai le sentiment que les gens restent solidement ancrés dans le bon sens et voient ces affirmations pour ce qu’elles sont : des faussetés outrancières.
De nouvelles données le confirment. Eric Kaufmann, chercheur pour l’Institut MacDonald-Laurier, vient de publier une étude intitulée The Politics of the Culture Wars in Contemporary Canada, fondée sur un sondage pancanadien mené du 18 au 20 septembre 2023.
85 % des Canadiens sont contre le fait d’enseigner aux enfants qu’il n’y a pas de fondement biologique à la sexualité, seulement des préférences de genre.
78 % pensent que la rectitude politique est allée trop loin.
70 % s’opposent à l’idée que le Canada serait un pays profondément raciste.
Ils sont deux fois plus nombreux à penser qu’il faut prévenir les parents si un enfant de moins de 16 ans veut que ses professeurs utilisent un autre prénom.
Ils sont deux fois plus nombreux à vouloir interdire aux femmes transgenres de participer à des compétitions sportives féminines.
Ceux qui ont participé à des formations EDI au travail ont substantiellement plus peur de perdre leur emploi et leur réputation que ceux qui n’y ont pas participé.
Sur toutes ces questions, il n’y a pas de différences notables entre francophones et anglophones.
Pourtant, note Kaufmann, les politiques publiques au Canada et la couverture proposée par les principaux médias ne reflètent pas, ou très peu, ce sentiment majoritaire.
Quand Blaine Higgs au Nouveau-Brunswick et Danielle Smith en Alberta ont annoncé qu’ils freinaient les changements de sexe, on a surtout entendu des hurlements.
Le Parlement fédéral a adopté à l’unanimité une motion affirmant que la politique des pensionnats autochtones relevait du génocide (sans qualificatif), ce qui est grotesque.
Le gouvernement fédéral continue à financer les universités qui organisent des concours d’embauche excluant d’emblée les hommes blancs.
Les manuels scolaires restent truffés de faussetés.
AUTOREPRODUCTION
Comment expliquer cette déconnexion entre les élites et le sentiment populaire ? Kaufmann n’aborde pas la question.
Une réponse adéquate nécessiterait un gros livre, mais en voici l’ossature, selon moi.
Les universités fabriquent ces idées. Ces idées sont ensuite reprises et entretenues par les médias et des militants.
Nos politiciens, vivant en vase clos malgré leurs prétentions, finissent par adhérer à ces idées ou, sinon, accordent de toute façon trop d’importance aux médias et aux activistes.
Le phénomène est autoreproducteur puisque journalistes, activistes, universitaires et politiciens se fréquentent, se recrutent, se soutiennent.
Les exceptions n’invalident pas le constat général.