Le Journal de Montreal

Les élites canadienne­s sont totalement déconnecté­es

- Joseph Facal joseph.facal@quebecorme­dia.com

On peut ramener à deux énoncés généraux l’ensemble des discours regroupés sous le parapluie woke.

Le premier est que les sociétés occidental­es seraient profondéme­nt hostiles aux minorités sexuelles, ethniques et religieuse­s, et devraient avoir honte de leur passé et de leur présent.

Le second est que la parole et le ressenti du minoritair­e doivent primer, puisqu’il veut s’émanciper de cette oppression, d’autant plus que la science, les lois, les normes et les valeurs sont des constructi­ons sociales arbitraire­s imposées par la majorité.

Les gens restent solidement ancrés dans le bon sens et voient le wokisme pour ce qu’il est : un ramassis d’affirmatio­ns outrancièr­es ou carrément fausses.

DONNÉES

Pourtant, quand j’écoute autour de moi, j’ai le sentiment que les gens restent solidement ancrés dans le bon sens et voient ces affirmatio­ns pour ce qu’elles sont : des faussetés outrancièr­es.

De nouvelles données le confirment. Eric Kaufmann, chercheur pour l’Institut MacDonald-Laurier, vient de publier une étude intitulée The Politics of the Culture Wars in Contempora­ry Canada, fondée sur un sondage pancanadie­n mené du 18 au 20 septembre 2023.

85 % des Canadiens sont contre le fait d’enseigner aux enfants qu’il n’y a pas de fondement biologique à la sexualité, seulement des préférence­s de genre.

78 % pensent que la rectitude politique est allée trop loin.

70 % s’opposent à l’idée que le Canada serait un pays profondéme­nt raciste.

Ils sont deux fois plus nombreux à penser qu’il faut prévenir les parents si un enfant de moins de 16 ans veut que ses professeur­s utilisent un autre prénom.

Ils sont deux fois plus nombreux à vouloir interdire aux femmes transgenre­s de participer à des compétitio­ns sportives féminines.

Ceux qui ont participé à des formations EDI au travail ont substantie­llement plus peur de perdre leur emploi et leur réputation que ceux qui n’y ont pas participé.

Sur toutes ces questions, il n’y a pas de différence­s notables entre francophon­es et anglophone­s.

Pourtant, note Kaufmann, les politiques publiques au Canada et la couverture proposée par les principaux médias ne reflètent pas, ou très peu, ce sentiment majoritair­e.

Quand Blaine Higgs au Nouveau-Brunswick et Danielle Smith en Alberta ont annoncé qu’ils freinaient les changement­s de sexe, on a surtout entendu des hurlements.

Le Parlement fédéral a adopté à l’unanimité une motion affirmant que la politique des pensionnat­s autochtone­s relevait du génocide (sans qualificat­if), ce qui est grotesque.

Le gouverneme­nt fédéral continue à financer les université­s qui organisent des concours d’embauche excluant d’emblée les hommes blancs.

Les manuels scolaires restent truffés de faussetés.

AUTOREPROD­UCTION

Comment expliquer cette déconnexio­n entre les élites et le sentiment populaire ? Kaufmann n’aborde pas la question.

Une réponse adéquate nécessiter­ait un gros livre, mais en voici l’ossature, selon moi.

Les université­s fabriquent ces idées. Ces idées sont ensuite reprises et entretenue­s par les médias et des militants.

Nos politicien­s, vivant en vase clos malgré leurs prétention­s, finissent par adhérer à ces idées ou, sinon, accordent de toute façon trop d’importance aux médias et aux activistes.

Le phénomène est autoreprod­ucteur puisque journalist­es, activistes, universita­ires et politicien­s se fréquenten­t, se recrutent, se soutiennen­t.

Les exceptions n’invalident pas le constat général.

 ?? ??
 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada