Le Journal de Montreal

Ne touchez pas à Peter Stastny !

- Stéphane Cadorette stephane.cadorette@quebecorme­dia.com

La saison grandiose que connaît Nathan MacKinnon pourrait le propulser vers le record de franchise des Nordiques et de l’Avalanche. Ce serait un accompliss­ement majeur, mais pas suffisant pour pousser le seul et unique Peter Stastny en bas de son piédestal.

Lundi dernier, le confrère Benoît Rioux faisait état de la situation. MacKinnon affiche 123 points au compteur, ce qui lui procure la deuxième meilleure production dans l’histoire de la concession.

L’électrisan­t attaquant s’approche dangereuse­ment de la marque de 139 points de Stastny établie au cours de la saison 1981-82, sa deuxième à Québec.

Avec la visite du Canadien au Colorado mardi dernier, plusieurs médias ont évoqué cette chasse au record d’équipe.

Le confrère à la radio du 93,3, Jérôme Landry, s’est même amusé à lancer son top 5 des plus grands joueurs de la franchise, dans lequel il a relégué Stastny au quatrième rang (derrière Joe Sakic, MacKinnon et Peter Forsberg).

Jérôme, et tous ceux qui sont de cet avis, faut qu’on se parle...

LE PLUS GRAND

Certains diront que je vis sur de vieux souvenirs de jeunesse, mais Peter Stastny est indélogeab­le et ce n’est pas que pour sa saison de 139 points. On jase là, comme dirait l’autre, mais c’est le meilleur.

Stastny a produit sept saisons de 100 points ou plus. C’est déjà extraordin­aire en soi, mais ce l’est encore plus lorsqu’on considère qu’il a été catapulté dans la LNH à 24 ans.

On dit souvent que la décennie 1980 générait des marqueurs de 100 points à la pelle. De 1980 à 1990, ils étaient en moyenne 11,4 par saison à atteindre ce plateau. Vrai, mais cette saison, une dizaine de joueurs devraient en faire autant.

Stastny a terminé sa carrière avec 1239 points et on imagine facilement un total beaucoup plus élevé s’il s’était joint aux Nordiques plus jeune.

Joe Sakic, dont le cas à titre de meilleur de l’histoire de la franchise se défend aussi très bien, a bouclé sa carrière avec 1641 points, lui qui a fait ses débuts à Québec à 19 ans.

Pour en revenir à notre cher Peter, de 1980 à 1989, il a amassé 1059 points. Un seul joueur a fait mieux au cours de cette décennie, soit un dénommé Wayne Gretzky, avec un total ridicule de 1842 points.

PLUS QUE DES POINTS

Mais pour évaluer l’impact d’un grand joueur, il faut aller bien plus loin que les chiffres.

L’arrivée improbable de Stastny a immédiatem­ent hissé les Nordiques au rang d’équipe crédible. Dès sa deuxième saison, les fleurdelys­és paralysaie­nt la foule de Montréal en éliminant le Canadien en séries. Les Nordiques n’étaient soudaineme­nt plus les petits cousins sympathiqu­es de Québec, regardés avec condescend­ance.

Jamais un joueur venu de l’extérieur ne s’est autant imprégné de la culture francophon­e de Québec. Les partisans se sont identifiés à lui autant qu’il s’est identifié aux partisans, dans une vague d’amour qui ne s’est pas reproduite par la suite avec un Joe Sakic ultra performant, mais pas aussi attaché à sa ville d’adoption.

Il faut aussi considérer que les Nordiques n’ont jamais eu les moyens de l’Avalanche, qui s’est paquetée des clubs pas possibles dès son arrivée au Colorado. Stastny a fait partie de très bonnes équipes à Québec, mais jamais complètes d’un bout à l’autre de l’alignement comme l’Avalanche a pu l’être dans ses années de gloire.

De 1995 à 2000, Sakic a été devancé quatre fois au sommet des pointeurs de l’équipe par Peter Forsberg.

À Québec, sur neuf saisons complètes, Stastny a été sept fois le meilleur pointeur, dont quatre fois par 10 points ou plus. Difficile de tirer davantage le train ! Finalement, il a fait plus avec moins, en matière de production.

ET LA COUPE STANLEY ?

Évidemment, dans une telle comparaiso­n, l’argument du nombre de conquêtes de la coupe Stanley doit être considéré. Sakic, avec ses deux coupes, est pour l’instant au-devant. MacKinnon en compte déjà une et n’a que 28 ans avec une belle équipe autour de lui. Il n’a pas dit son dernier mot.

Plusieurs y verront l’élément manquant au dossier de Stastny, qui n’a jamais soulevé le précieux trophée.

D’accord, mais est-ce que Marcel Dionne est un moins bon joueur pour autant ? Et Jarome Iginla ? Et Adam Oates ? Et Gilbert Perreault ? Et Mats Sundin ? Ils ont tous inscrit au moins 1300 points, mais la coupe leur a échappé pour différente­s raisons.

Cet amusant débat provient de la saison magistrale de Nathan MacKinnon et qu’on se comprenne bien... Ce qu’il accomplit est phénoménal. Il n’est pas question de diminuer ses exploits. Un jour, peut-être que le piédestal lui reviendra de plein droit.

Forsberg ? Il manque l’élément de la longévité et de la durabilité, même s’il a été dominant.

Patrick Roy ? C’est peut-être le biais québécois, mais il a eu encore plus d’impact à Montréal au sein d’équipes moins puissantes que l’impact déjà immense qu’il a eu au Colorado.

Sakic ? Je suis prêt à écouter, les candidatur­es se valent.

Reste que Peter, c’est Peter. N’y touchez pas. Les souvenirs, c’est ce qu’il nous reste à Québec...

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 ?? PHOTO D’ARCHIVES ?? Débarqué chez les Nordiques à l’âge de 24 ans, Peter Stastny a produit sept saisons de 100 points ou plus.
PHOTO D’ARCHIVES Débarqué chez les Nordiques à l’âge de 24 ans, Peter Stastny a produit sept saisons de 100 points ou plus.

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