Elle a « magasiné » son médecin pour sa grossesse
Une Québécoise a vu quatre obstétriciens avant de choisir celui qui l’accompagnerait jusqu’à l’accouchement
TAIPEI, Taïwan | L’un des aspects les plus sensationnels du système de santé taïwanais est la possibilité de « magasiner » son médecin spécialiste. C’est ce qu’a fait une Québécoise làbas lorsqu’elle est tombée enceinte.
Nul besoin de consulter un médecin de famille au préalable : il suffit de se rendre sur le site de n’importe quel hôpital, où l’on peut lire le CV de tous les médecins, et prendre rendez-vous directement avec celui que l’on préfère, en quelques clics seulement.
Les patients les moins pressés en profitent pour prendre deux ou trois avis différents.
« J’ai vu quatre obstétriciens, dont un qui chronométrait sept minutes sur sa montre avant de me mettre à la porte parce qu’il avait trop de patientes », relate Alina Pietilainen qui enseigne l’anglais dans la ville de Taoyuan.
« J’ai fini par en trouver un qui avait de l’écoute et une super équipe, avec qui je pouvais communiquer en tout temps. »
OPÉRÉ EN DEUX SEMAINES
« Dans ma belle-famille, une personne a eu une tumeur au cerveau, et deux semaines plus tard elle était opérée par un chirurgien renommé qu’elle a elle-même choisi », ajoute un autre Québécois, Jonathan Geoffroy, qui travaille dans le domaine du marketing à Taipei.
Il y a six ans, avant de quitter la Belle Province, Alina Pietilainen était sur la liste d’attente d’un endocrinologue depuis 18 mois.
À Taïwan, elle a pu en voir un immédiatement.
Les Taïwanais ont tendance à abuser de cette accessibilité extrême. Ils vont chez le médecin en moyenne 14,3 fois par an.
Cela finit même par distordre le concept de médecin de famille, se désole Hsin-Ju Chen, qui exerce cette profession dans une clinique de quartier.
Parmi les malades qui défilent dans son bureau, il y en a beaucoup qu’il ne verra qu’une seule fois. Son travail se résume donc à traiter leurs symptômes, sans suivi à long terme.
UN EXCÈS
La National Health Insurance (NHI), l’assureur public, tente de corriger cette situation, car l’excès de consultations finit par lui coûter cher.
Elle demande par exemple un paiement beaucoup moins important pour ceux qui viennent à l’hôpital sur référence d’un omnipraticien, mais ce petit incitatif ne suffit pas à changer les habitudes.
« Tout le monde pense que son problème nécessite l’intervention d’un spécialiste », constate le docteur Chen.
Installé à Taïwan depuis 14 ans, Jonathan Geoffroy soutient avoir vite pris goût à ce système de santé.
« Avant la COVID, nous pensions rentrer au Québec, avec ma femme et mes deux enfants, confie-t-il. Mais l’état du système de santé là-bas nous refroidit. On pense qu’on sera plus facilement pris en charge ici en cas de maladie. »