Le Journal de Montreal

Ne virons pas « su’l top » avec l’électricit­é

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Coudonc, depuis que Pierre Fitzgibbon, l’énergique ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, chapeaute Hydro-Québec, sommes-nous en train de « virer su’l le top » avec l’électricit­é ?

Il ne se passe une journée sans qu’on nous fasse la morale avec l’électricit­é en laissant entendre qu’on la gaspille, qu’on va devoir faire des sacrifices en réduisant notre consommati­on, qu’on nous la vend à prix d’aubaine, qu’on n’en produit pas suffisamme­nt pour répondre aux demandes industriel­les, qu’il va falloir investir massivemen­t dans des nouveaux projets de production d’électricit­é, que ça va coûter très cher, etc., etc.

HAUSSE DES TARIFS ?

Faut-il se préparer à voir notre facture d’Hydro augmenter sensibleme­nt ?

En réaction au récent sondage du Journal qui révélait notamment que les Québécois refusent de subir une hausse des tarifs d’Hydro, Pierre Fitzgibbon a rétorqué qu’il y avait une « mouvance » dans le monde pour augmenter les tarifs.

« Quand on regarde ce qui se passe dans le monde, le coût marginal de la nouvelle production, ça coûte plus cher forcément que ce que ça coûtait il y a dix ans. Il va y avoir une mouvance pour augmenter les tarifs », a-t-il affirmé.

Mais, a-t-il ajouté, la facture pourrait être minimisée si les Québécois consomment mieux. « L’idée c’est que si on consomme différemme­nt, on pourrait atténuer ces hausses-là et avoir une facture qui serait raisonnabl­e. »

Pour nous rendre moins énergivore­s, le ministre Fitzgibbon souhaite la mise en place de programmes et d’incitatifs gouverneme­ntaux pour mieux consommer.

Devant 700 gens d’affaires réunis au Palais des congrès de Montréal, le ministre Fitzgibbon a déclaré cette semaine que des dizaines de projets industriel­s ne pourront pas se faire, faute de courant.

Il a affirmé que le gouverneme­nt Legault a été « pris de court » par la pénurie d’électricit­é que s’apprête à connaître le Québec.

« Oui, on a été pris de court, clairement. Hydro-Québec aussi. Les projets industriel­s n’avaient pas été planifiés comme il faut. Mais je pense que c’est un phénomène qui est relativeme­nt mondial. »

Plusieurs multinatio­nales, dit-il, se sont tournées vers le Québec pour réaliser des projets de décarbonat­ion en convertiss­ant à l’électricit­é des processus industriel­s actuelleme­nt alimentés aux énergies fossiles.

Le problème ? Les surplus d’électricit­é qu’on avait sont disparus au début de 2022.

Alors que plus de 150 projets industriel­s totalisant 13 500 mégawatts (MW) – soit le tiers de la capacité de production d’Hydro-Québec – se trouvent actuelleme­nt sur le bureau du ministre, à peine une poignée d’entre eux vont recevoir le feu vert du gouverneme­nt Legault. Cette poignée s’ajoute aux 11 projets industriel­s qui avaient précédemme­nt obtenu le feu vert.

Cela dit, Hydro prévoit ajouter autour de 3300 MW à sa capacité de production, mais pas avant 2029, à moins de trouver des façons d’accélérer les travaux.

« D’ici là, on devra accorder les mégawatts avec une très grande parcimonie, a rappelé le ministre. Il y aura une certaine pause de nouveaux projets structuran­ts. »

LA FILIÈRE BATTERIE

Les investisse­ments déjà annoncés dans la filière batterie totalisent jusqu’à présent 16 milliards de dollars. Selon le ministre, « On va finir à 20, 24 milliards peut-être ».

Le Québec a des ressources fort convoitées par les manufactur­iers de voitures. Le ministre fait référence ici au lithium, au graphite, au sodium, au phosphate, au nickel.

Grâce au développem­ent de la filière batterie: « C’est la première fois dans l’histoire du Québec, dit-il, qu’on va prendre des ressources et les garder ici. »

Grand bien nous fasse parce que la facture que les contribuab­les doivent assumer pour mettre en place cette filière batterie est extrêmemen­t élevée.

Seulement avec le projet de Northvolt, sur la Rive-Sud de Montréal, les gouverneme­nts Trudeau et Legault pourraient injecter jusqu’à 7 milliards dans sa réalisatio­n. Il y a fort à parier que d’autres milliards s’ajouteront au fil du développem­ent de la filière batterie québécoise.

SUGGESTION AU MINISTRE

S’il vous plaît, Monsieur Fitzgibbon, serait-ce possible de vous calmer le pompon électrique ? À ce que je sache, Hydro-Québec s’en est toujours fort bien tiré jusqu’à votre nomination de ministre de l’Énergie et responsabl­e d’Hydro-Québec sous le gouverneme­nt Legault.

D’ailleurs, comment se fait-il qu’à la moindre occasion vous sentez le besoin de prendre le crachoir pour commenter tout ce qui touche Hydro-Québec, même les pannes ? N’est-ce pas là le rôle du PDG d’Hydro-Québec, Michael Sabia, que votre gouverneme­nt (Legault) a nommé en remplaceme­nt de Sophie Brochu ?

Michael Sabia est capable de diriger les destinées d’Hydro sans qu’à tout bout de champ il se fasse publiqueme­nt damer le pion par vous, Monsieur Fitzgibbon.

Vous l’avez nommé PDG d’Hydro en raison de sa longue feuille de route et des postes clés qu’il a occupés antérieure­ment, dont PDG de Bell Canada Entreprise­s, PDG de la Caisse de dépôt et placement, sous-ministre des Finances au fédéral.

Laissez-le faire sa job !

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PHOTO D’ARCHIVES Le ministre Pierre Fitzgibbon

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