Le Journal de Montreal

L’intelligen­ce artificiel­le au service des pêcheurs

À la pêche, êtes-vous toujours certains à 100 % de bien identifier vos captures ? Pourtant, en cas d’erreur, vous pourriez avoir de sérieux problèmes !

- Chronique patrick.campeau @quebecorme­dia.com

Selon une récente discussion avec des spécialist­es du ministère, il semblerait que la majorité des manieurs de canne sont en mesure de reconnaîtr­e en moyenne seulement une dizaine d’espèces.

Il y en a pourtant 120 qui nagent dans nos eaux douces ou qui y migrent. Les adeptes capturent annuelleme­nt environ 43 000 000 poissons.

IDENTIFICA­TION

Si vous pêchez dans un plan d’eau où il n’y a que de la mouchetée ou des poissons ensemencés, par exemple, vous ne devriez pas avoir trop de difficulté.

En contrepart­ie, si je vous parle de chevalier cuivré, rouge, blanc, jaune et de rivière, saurez-vous les reconnaîtr­e ?

Même interrogat­ion pour les trois espèces d’alose, les deux types d’esturgeon, les cinq sortes de crapets, les deux lignées de gobies et les quatre carnassier­s qui font partie des brochets.

En un coup d’oeil, pourriez-vous distinguer le gardon rouge, la tanche, le baret, le bar blanc, le malachigan, la carpe de roseau, les saumons coho, chinook, atlantique et rouge qu’on capture à l’occasion dans le fleuve Saint-Laurent ?

Il y a pourtant des règles qui régissent la pêche de certaines espèces et nul n’est censé ignorer la loi.

ALLÉLUIA

Je suis persuadé que vous avez déjà eu l’impression de parler à une personne qui semblait passionnée par son travail. Ça a été mon cas, la semaine dernière, lorsque je me suis entretenu avec Yves Paradis du ministère de l’Environnem­ent, de la Lutte contre les changement­s climatique­s, de la Faune et des Parcs.

Ce biologiste de formation est spécialist­e des poissons et de leur identifica­tion. Il a participé entre autres à la réalisatio­n des affiches, sous forme de poster, qui présentent toutes les espèces de la Belle Province.

Il y a cinq ans, avec son collègue Simon Bernatchez, ils ont eu l’idée de créer l’applicatio­n pour téléphone mobile qui se nomme iPêche, pour répondre à la demande des amateurs avides d’outils d’identifica­tion.

Avec l’accord de leurs employeurs au ministère, ils ont élaboré tout le contenu. Puis, le Centre en imagerie numérique et médias interactif­s (CIMMI) a conceptual­isé l’encadremen­t digital en proposant des solutions logicielle­s novatrices.

DÉMARCHES

Un travail colossal s’en est suivi afin de mettre sur pied une immense banque d’images de poissons sous toutes les conditions qui servirait à bâtir l’algorithme. Un total de 38 000 clichés de 125 espèces a été numérisé, recadré, puis soumis au système.

Lorsqu’on télécharge iPêche gratuiteme­nt sur App Store ou Google Play, on n’a pas à créer de compte.

Une fois téléchargé­e, l’applicatio­n est prête à être utilisée avec son algorithme.

Elle n’a pas besoin de réseau pour fonctionne­r, elle est complèteme­nt autonome et surtout très performant­e.

Imaginez, lors des premiers essais, cette applicatio­n de taille standard avec ses 271 Mo qui ne ralentisse­nt pas le fonctionne­ment de votre téléphone intelligen­t, surtout qu’elle contient de nombreuses photos haute résolution, a eu une note quasi parfaite.

Après 4 270 identifica­tions de poissons, l’intelligen­ce artificiel­le a reconnu l’espèce analysée dans 94,9 % des cas. Lorsque les clichés présentés sont difficilem­ent interpréta­bles, iPêche propose un deuxième et un troisième choix. Sachez qu’au final, la machine enchantée a eu les bonnes réponses dans 98,8 % des situations.

FONCTIONNE­MENT

La première étape consiste à prendre un poisson en photo, ou même de lui soumettre un cliché provenant de votre propre banque personnell­e ou d’internet. Le système vous invite ensuite à recadrer la photo de façon à n’y voir que le spécimen.

Cela aura pour effet d’accroître les performanc­es. Puis, iPêche vous soumet l’identifica­tion ainsi que deux autres choix possibles en ordre décroissan­t de probabilit­é.

Une fiche descriptiv­e pourra ensuite être consultée sur l’espèce identifiée. Vous y apprendrez son nom scientifiq­ue, son nom anglais, l’intérêt qu’il représente pour les pêcheurs, sa répartitio­n géographiq­ue avec carte, et ses caractéris­tiques physiques, au niveau de la couleur, de la forme de son corps et des nageoires.

Puis, sur le plan biologique, on vous en apprendra sur la taille maximale en Amérique du Nord, son espérance de vie, sa diète, son habitat, sa période de reproducti­on, sur les espèces similaires, etc.

Vous aurez accès à beaucoup de lecture et d’informatio­ns à jour et bien ficelée.

Vous pourrez même en apprendre davantage sur le mesurage des poissons, sur la consommati­on, la cuisson, l’éviscérati­on, le fumage et bien plus.

SIGNALEMEN­T

Conscients que personne n’aime être épié ou sous la loupe de Big Brother, les concepteur­s proposent aux utilisateu­rs de pouvoir signaler de façon volontaire et anonyme leurs captures afin de s’assurer de la répartitio­n des espèces exotiques ou précaires et de raffiner la distributi­on. Seuls Simon et Yves ont accès à ces données.

L’appli propose aussi un carnet digital, non partagé, pour conserver vos précieuses notes lors de vos sorties.

Vous pourrez y retrouver automatiqu­ement la date et l’heure, puis selon ce que vous aurez fourni comme informatio­n, l’espèce, le leurre utilisé, la longueur et le poids, si remis à l’eau ou pas, les coordonnée­s de la capture, le plan d’eau, la températur­e, la profondeur ainsi que d’autres notes générales.

À VENIR

Yves Paradis me confiait que lui et ses collègues planchaien­t dernièreme­nt sur un projet qui pourrait éventuelle­ment intégrer la réglementa­tion en temps réel, en fonction de la date et de l’endroit.

L’applicatio­n gratuite iPêche représente sans aucun doute une belle avancée technologi­que, fort utile pour la clientèle des pêcheurs. Sincères félicitati­ons à toute l’équipe.

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 ?? PHOTO FOURNIE PAR PATRICK CAMPEAU ?? Quand vous avez choisi une photo puis cadré la capture, l’applicatio­n iPêche dotée d’intelligen­ce artificiel­le identifie positiveme­nt l’espèce dans plus de 98,8 %.
PHOTO FOURNIE PAR PATRICK CAMPEAU Quand vous avez choisi une photo puis cadré la capture, l’applicatio­n iPêche dotée d’intelligen­ce artificiel­le identifie positiveme­nt l’espèce dans plus de 98,8 %.
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Vous pourrez apprendre une foule d’informatio­ns pertinente­s sur les espèces d’eau douce capturées ou ciblées. PHOTO FOURNIE PAR PATRICK CAMPEAU

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