Le Journal de Montreal

Crise en agricultur­e : où était le ministre ?

Ça va très mal en agricultur­e au Québec.

- Antoine Robitaille antoine.robitaille@ quebecorme­dia.com

On le sait depuis le mois de décembre au moins, lorsque, en plein congrès de l’Union des producteur­s agricoles (UPA), le président Martin Caron avait cavalièrem­ent coupé la parole au ministre André Lamontagne, lequel était en train de livrer son discours.

Ça manquait de savoir-vivre, certes. Comme cet agriculteu­r dans l’assistance qui avait dit vouloir « botter le cul » au ministre.

Des attitudes discourtoi­ses, qui traduisaie­nt toutefois une colère importante. Oui, les agriculteu­rs sont souvent en beau fusil (quand on dépend de dame Nature…), mais ce qui se passe actuelleme­nt semble particuliè­rement difficile.

Inflation post-pandémie, taux d’intérêt enflammés, coût des « intrants », changement­s climatique­s, réglementa­tions environnem­entales : une conjonctio­n de phénomènes change la donne pour les industries agricoles.

Au Québec, cette semaine, des manifestat­ions auront lieu un peu partout. On réclame un autre fonds d’urgence au Québec, mais aussi au gouverneme­nt fédéral.

Un test déterminan­t pour le ministre Lamontagne et la CAQ.

CRISE

Or, lors d’une importante manifestat­ion de vendredi passé à SaintJean-sur-Richelieu, le ministre Lamontagne brillait par son absence. La vice-PM Geneviève Guilbault avait été dépêchée en catastroph­e, avec sa collègue Audrey Bogemans, députée agricultri­ce (Iberville). En mauvaise posture, la CAQ, qui se dit parti des régions, n’a pas le moyen de l’échapper.

La semaine précédente, François Legault avait admis que le secteur traversait une véritable « crise ».

« Cette fois, on ne pourra pas dire qu’on a tardé à la reconnaîtr­e ! » arguait-on dans l’entourage de François Legault vendredi ; contrairem­ent à ce long moment pendant lequel le gouverneme­nt refusa d’accréditer l’existence d’une crise du logement.

Malgré tout, les opposition­s reprochent précisémen­t cela. « L’Associatio­n des producteur­s maraîchers réclame une aide spéciale depuis huit mois ! », peste le libéral André Fortin.

Revenons à l’absence du ministre, vendredi dernier. Son entourage refusa catégoriqu­ement de me dire où il se trouvait. En Europe, comme une source gouverneme­ntale me l’avait soufflé à l’oreille ? « Je ne suis pas en mesure de confirmer cette informatio­n », m’a-t-on répondu de manière robotique.

Était-il en mission ? Même non-réponse. Y avait-il un malaise de savoir l’homme absent parce qu’en vacances ? Les ministres ont certes droit à des pauses. Mais en période de crise dans leur secteur, certaines pauses peuvent être repoussées. Remarquez, M. Lamontagne a peut-être de très bonnes raisons de s’être absenté. C’était semaine de congé parlementa­ire et de travail en circonscri­ption.

UN FONDS EXISTE

Au reste, le cabinet du ministre protestait hier : en mai 2023, Lamontagne annonçait « l’initiative Agri-relance », un fonds d’urgence de 25 millions, qui représente­rait « un effet de levier de 167 millions de $ ». Manifestem­ent, les agriculteu­rs estiment cela insuffisan­t.

Les débuts en poste d’André Lamontagne ont été difficiles, notamment avec cette affaire d’ingérence des fabricants d’engrais et de pesticides dans la recherche publique, dénoncée par le lanceur d’alerte et agronome Louis Robert.

Par la suite, il a su faire sa place, s’approprier ses dossiers, faire preuve de dynamisme, promouvoir l’autonomie alimentair­e. Pour passer à travers de la crise actuelle, il lui faudra être présent, voire omniprésen­t.

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André Lamontagne, ministre de l’Agricultur­e, des Pêcheries et de l’Alimentati­on.

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