Quand Trudeau se gargarise de mots
Que le premier ministre cesse de se péter les bretelles, le Canada n’est plus du tout en tête de la course dans le domaine de l’intelligence artificielle.
Et ce ne sont pas les 2,4 milliards (sur cinq ans) qu’il vient d’annoncer à Montréal qui nous redonneront la première place. Même si Justin Trudeau a eu l’intelligence « naturelle » de se faire accompagner par Yoshua Bengio, notre réputé « parrain de l’IA », son gouvernement n’a pas un dossier très reluisant dans l’univers numérique.
À commencer par son échec à faire « cracher » les géants du numérique qui ont terrassé nos organismes de presse et qui risquent de ruiner notre industrie du cinéma et de la télévision. Il y a huit ans que Mélanie Joly, la ministre du Patrimoine de l’époque, a commencé son offensive contre les GAFA. Trois autres ministres sont passés à Patrimoine Canada depuis et on attend encore que le CRTC fasse savoir ce qu’il adviendra de la Loi sur la diffusion continue en ligne. Quant à la Loi sur les nouvelles en ligne, elle semble avoir fait le plein avec les 100 millions $ annuels arrachés de peine et de misère à Google. Depuis, c’est le calme plat dans l’offensive gouvernementale contre les GAFA.
LORSQUE CHANTE CÉLINE DION
Dans le monde de la musique, on s’arrache les cheveux. Interprètes et compositeurs récoltent des miettes des grandes plateformes. Musiciens et chanteurs, de leur côté, ne touchent pas un rond lorsque les oeuvres qu’ils interprètent se retrouvent au cinéma, à la télévision ou sur les plateformes en ligne. Céline Dion, par exemple, ne reçoit rien lorsqu’on présente le film Titanic parce que ce n’est pas elle qui a composé My Heart will Go On. Seule la radio redonne quelques maigres pinottes aux musiciens et aux interprètes.
Le 1er janvier 2023, en catastrophe, Ottawa a prolongé de 20 ans les oeuvres qui n’étaient pas encore tombées dans le domaine public, répondant ainsi aux appels désespérés des auteurs et des maisons d’édition.
Quant à la révision de la loi sur le droit d’auteur, promise solennellement en 2021 par les ministres Rodriguez et Champagne, elle attend toujours. La Loi sur l’intelligence artificielle et les données a été déposée à la Chambre des communes, il y a deux ans, mais elle n’est toujours pas adoptée.
LOIN DE LA PREMIÈRE PLACE
Et quel est le rang du Canada en matière d’intelligence artificielle ? Selon le classement de l’index Global AI de Tortoise Media, nous sommes en 5e place pour notre capacité à l’utiliser et notre infrastructure consacrée à l’IA est au 23e rang. Pas de quoi crier au succès comme l’ont fait dimanche nos politiciens fédéraux, mais c’est au moins une bonne raison d’engager desdiza ines de millions pour construire une structure informatique conséquente, à l’usage des chercheurs et des entreprises du secteur de l’intelligence artificielle. Jusqu’à quel point peut-on faire confiance au gouvernement fédéral en ce domaine ? Ce n’est sûrement pas la façon dont il a géré le système de paie Phénix ou le désormais risible ArriveCAN qui peut nous faire espérer qu’il arrivera à tirer le meilleur parti de ces 2,4 milliards. Dimanche, après l’annonce de Trudeau, un porte-parole du Parti conservateur a déclaré que le gouvernement actuel n’a pas la compétence de gérer un tel programme.
Ni un prochain gouvernement conservateur quant à moi !