Dieu sauve les conservateurs de leurs dérapages
Le vote sur le serment au roi venait de prendre fin à la Chambre des communes. Le résultat prévisible était dévoilé. Une majorité de députés, 197 contre 113, avaient rejeté la proposition du libéral René Arseneault de ne plus rendre obligatoire le serment à la couronne britannique pour pouvoir siéger au Parlement.
Comme pris d’une émotion trop vive, une grande partie du caucus conservateur a entonné le God Save the King. Quel rapport ? Une chanson patriotique de ralliement à la monarchie devenue l’hymne national du RoyaumeUni. Quelle pertinence de bramer cet hymne sur le parquet de la Chambre des communes du Canada ?
MAIS POURQUOI ?
Au mieux, c’est de la bêtise pure. Comme si on avait entonné Na na na na hey hey Goodbye après un vote.
Vous avez perdu, nous avons gagné ! Dans cet enivrement, la première chanson qui leur est venue à l’esprit après avoir sauvé le serment au roi, c’est l’hymne à ce dernier.
Dans un autre cas, c’est que ces conservateurs ont un attachement si profond et si émotif à la couronne britannique qu’ils en ont perdu leurs repères. La peur de siéger dans le futur aux côtés de mécréants qui n’auraient pas prêté ledit serment leur a fait perdre rationalité et jugement. Leurs cordes vocales se sont déliées spontanément en constatant le résultat du vote.
Mais dans le pire des cas, leur attitude témoigne d’un certain mépris. Notamment à l’endroit des sensibilités des Acadiens. Il faut insister sur le fait que cette motion n’était pas amenée par des souverainistes du Bloc Québécois comme un pied de nez aux institutions du Canada.
La motion était présentée par un député du Nouveau-Brunswick, d’origine acadienne. Quiconque connaît l’histoire des Acadiens comprend le peu de chaleur que ce peuple exprime envers la monarchie britannique.
On comprend qu’un député acadien ne célèbre pas la monarchie britannique
LES ACADIENS
Les Acadiens étaient établis dans les provinces de l’Atlantique depuis la fondation de Port-Royal au début du 17e siècle. Durant 150 ans, ils avaient bâti des maisons, défriché les terres, fondé des villages.
En 1755, alors qu’ils refusaient de porter allégeance à la couronne britannique, un ordre de déportation est décrété contre les Acadiens. Les deux tiers des 18 000 Acadiens sont expulsés de leurs terres et mis sur des bateaux. Ils sont dépouillés de leurs avoirs. Leurs maisons et autres bâtiments sont saisis ou brûlés.
Des 12 000 déportés, 4000 à 5000 se retrouveront sans patrie, éparpillés aux États-Unis ou ailleurs. Les autres n’ont pas survécu, périssant par le froid, la maladie ou un naufrage.
Vous imaginez que pour beaucoup d’Acadiens, on repassera pour les mamours au roi. C’est la raison pour laquelle le député Arseneault proposait de rendre non obligatoire le serment au roi. Une position fort raisonnable puisqu’il ne voulait pas l’abolir.
L’attitude des conservateurs s’explique mal. Quelle que soit la source de leur impulsion pour devenir ce mauvais choeur de chant, les conservateurs ne s’aident pas au Québec. Parce que parmi les victoires du roi célébrées dans le texte du God Save the King ,ily a les plaines d’Abraham...