Le Journal de Montreal

La réalité « invivable » des Haïtiens à Port-au-Prince

La longue crise politique nuit à la sécurité de la population

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PORT-AU-PRINCE | (AFP) À Portau-Prince rendue « invivable » par les gangs, des Haïtiens disent vivre « un cauchemar ».

Un mois après l’annonce de la démission du premier ministre contesté, les autorités de transition se font attendre et la population paie la longue crise politique et sécuritair­e au prix fort.

Jameson Jacques a perdu ses parents lorsque des « bandits » ont incendié sa maison. Depuis, il vit avec ses enfants dans un abri de fortune à Port-au-Prince, en grande partie contrôlée par les gangs.

« Si j’avais les moyens, je me serais déjà rendu dans une ville de province avec mes trois enfants », lâche le trentenair­e. « Portau-Prince devient invivable ».

Samson Dorsena, un artisan, dit, lui, n’avoir « jamais vécu une situation pareille ».

« Nous avons l’habitude des situations compliquée­s [mais] cette fois est pire », affirme-t-il.

Le pays pâtit depuis des dizaines d’années d’une instabilit­é politique chronique. Mais fin février, les gangs, dont la violence ravageait déjà des pans entiers du territoire, ont lancé des attaques coordonnée­s contre des sites stratégiqu­es, disant vouloir renverser le premier ministre Ariel Henry.

Ce dernier, nommé quelques jours avant l’assassinat en 2021 du président Jovenel Moïse, était fortement contesté. Il n’a même pas pu regagner son pays après un déplacemen­t au Kenya.

VIVRE UN CAUCHEMAR

Le 11 mars, le même jour qu’une réunion entre Haïtiens et plusieurs organisati­ons et pays comme les États-Unis, il a annoncé qu’il allait démissionn­er pour laisser la place à un « conseil présidenti­el de transition ».

Un mois plus tard, cet organe censé tenter de rétablir ordre public et stabilité n’a toujours pas été intronisé sur fond de désaccords entre les parties prenantes, mais aussi avec le gouverneme­nt sortant.

Pendant ce temps, la population vit au rythme des attaques de gangs, des coups de feu et des pénuries de toutes sortes.

Stéphane Dujarric a alerté que les stocks alimentair­es du Programme alimentair­e mondial de l’ONU (PAM) risquaient d’être épuisés d’ici la fin d’avril en Haïti, où l’aéroport internatio­nal et le port principal restent fermés, ce qui perturbe l’arrivée de l’aide.

« Je suis en train de vivre un cauchemar. Depuis plusieurs semaines, je ne peux plus me rendre en centre-ville », explique Junior Fontus, vendeur de boissons de 43 ans, rencontré dans un centre de réfugiés à Port-au-Prince.

« Sans mon commerce, comment vaisje faire pour nourrir mes cinq enfants et payer les frais » nécessaire­s à leur scolarité ? s’est-il demandé.

Les affaires de Mirlene Cleone, une marchande, ont également souffert.

Entre le 8 et le 27 mars, plus de 53 000 personnes ont fui Port-au-Prince, dans leur immense majorité pour échapper à la violence des gangs, selon l’Organisati­on internatio­nale pour les migrations.

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PHOTO AFP Des policiers haïtiens montent la garde au coin d’une rue, au milieu de la violence des gangs, à Port-au-Prince.

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