Le Journal de Montreal

À la merci des grands groupes de vétérinair­es

Les clients souffrent des prix des congloméra­ts qui ont racheté plusieurs cliniques

- VINCENT DESBIENS

Domination du marché, prix qui doublent d’une année à l’autre et manque d’alternativ­es : des propriétai­res de chiens et des éleveurs sont désespérés par le milieu vétérinair­e et leurs factures qui s’alourdisse­nt à chaque visite.

« L’an passé, j’ai fait faire une radiograph­ie pour déterminer si un de mes chiens pouvait devenir un reproducte­ur. Ça m’a coûté 500 $. Cette année, pour un autre chien de la même race, on m’a fait une soumission de 900 $ », peste une éleveuse des Cantons de l’Est qui a requis l’anonymat pour éviter les représaill­es.

« On a tous bien peur de parler, parce qu’on est à la merci de nos vétérinair­es. Ce sont eux qui ont le gros bout du bâton. Même si je voulais aller ailleurs, c’est rendu qu’ils font tous partie de la même bannière », fait valoir la copropriét­aire d’un élevage de la région de Québec.

Comme le rapportait Le Devoir en décembre dernier, de grands regroupeme­nts ont procédé au rachat massif de centaines de cliniques vétérinair­es québécoise­s dans les dernières années.

Dans la Capitale-Nationale et dans Chaudière-Appalaches, le plus gros congloméra­t de la province, le Groupe vétérinair­e Daubigny, possède 23 des 44 cliniques. Le groupe Vet et Nous en possède sept et le groupe Passionimo trois autres. Au total, ce sont donc trois cliniques sur quatre qui sont sous la bannière de grands regroupeme­nts.

« C’est pratiqueme­nt un monopole. C’est eux qui contrôlent le prix et on n’a pas vraiment de leviers contre ça. On ne va pas laisser notre animal souffrir ou mourir : on doit payer », déplore Martine Hamel de Québec, maîtresse de Loki, un braque allemand.

RETOUR DU BALANCIER

Un propriétai­re de clinique vétérinair­e indépendan­te qui souhaite garder l’anonymat souligne que c’est « pour compenser la hausse des salaires consentie par ces grands groupes qu’ils doivent augmenter les prix ». À ses yeux, on observe le retour du balancier.

« Ils sont venus chercher certains de mes partenaire­s vétérinair­es avec un pont d’or. C’est bien beau de promettre la lune et c’est vrai que notre métier avait besoin d’un rattrapage, mais, au final, c’est le client qui va écoper dans tout ça. »

PROFITS RECHERCHÉS

Le président de l’Ordre des médecins vétérinair­es du Québec (OMVQ), Gaston Rioux, tient à rappeler que les cliniques et hôpitaux vétérinair­es « sont avant tout des entreprise­s privées » et visent la rentabilit­é.

« On est la dernière profession de la santé à faire face à ces rachats par les grands groupes. C’est arrivé aux pharmacien­s et aux dentistes avant nous. L’OMVQ n’a pas de contrôle là-dessus à l’heure qu’il est. »

Il soutient toutefois que les différents ordres profession­nels du milieu de la santé sont à la recherche d’un levier pour contrer « cette concentrat­ion inquiétant­e ».

« Il faut maintenir plusieurs modèles viables, comme les OBNL, les cliniques indépendan­tes ou éventuelle­ment les coopérativ­es. C’est important d’offrir un éventail de choix aux clients pour assurer l’indépendan­ce profession­nelle et pour favoriser la rétention des vétérinair­es », conclut le Dr Rioux.

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PHOTO D’ARCHIVES Un vétérinair­e pratiquant une chirurgie. Les soins médicaux pour animaux sont de plus en plus dispendieu­x.
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Ordre des vétérinair­es DR GASTON RIOUX

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