Deux origines, deux histoires, deux pays
C’est une séquence politique fascinante.
À Ottawa, la proposition d’un député acadien de rendre optionnel le serment au roi a été rejetée.
Je note au passage, puisque cela semble oublié, que la déportation des Acadiens a été le nettoyage ethnique inaugural de la modernité.
Cela dit, cette motion n’a pas seulement été rejetée : un très grand nombre de députés canadiens-anglais a entonné, sur un mode vengeur, le God Save the King. Heurtés dans leur imaginaire, les Canadiens ont entendu le chant de leurs origines.
GRANDE-BRETAGNE
Quelques heures plus tard, l’Assemblée nationale recevait Gabriel Attal, le premier ministre français. Dans son discours, il a rappelé la parenté profonde de nos deux peuples.
Il s’est ému du combat québécois pour vivre l’Amérique en français. Il a rappelé notre combat partagé, dans les temps présents, pour la laïcité.
Les députés québécois ont célébré ce magnifique discours, qui avait un parfum de retrouvailles politiques. Les Québécois aussi, à ce moment, ont entendu le chant des origines.
Que peut-on voir dans cette séquence ?
Que les Québécois et les Canadiens anglais, qui se sont rencontrés en 1759 sans jamais nouer de pacte ensuite, sinon pour dissimuler un rapport de domination jamais surmonté, demeurent étrangers l’un à l’autre.
De la Conquête au rapport Durham, de la Confédération au rapatriement unilatéral de la constitution, du refus de nous reconnaître comme société distincte à la noyade démographique actuelle, notre histoire avec le Canada est conflictuelle.
FRANCE
Certes, les idéologues à la mode ont l’habitude de vivre à la surface du présent. Ils ne comprennent rien à la mémoire des peuples, à leur passé, à leurs aspirations qui traversent les siècles.
Mais le réel ne disparaît pas parce qu’on ne le comprend pas. Nous avons vu ces derniers jours deux peuples évoquer deux histoires, deux identités, deux origines.
Tôt ou tard, ils formeront deux pays.