LE « BON KID » QUE LES FANS ONT ADOPTÉ
Il y a un an presque jour pour jour, Édouard Julien disputait, au Target Field de Minneapolis, son premier match
MINNEAPOLIS, Minnesota | Édouard Julien grimpe en vitesse les marches qui mènent vers le terrain du Target Field quand il est interrompu par une journaliste de Bally Sports, le diffuseur des matchs des Twins. « Hé, Eddy, as-tu une minute pour moi ? »
La reporter était à la recherche de réactions au superbe attrapé qu’avait réalisé Byron Buxton, un coéquipier, la veille et qui alimentait les discussions chez les partisans du Minnesota ce jour-là.
« Demande-lui de te parler aussi de sa nouvelle coupe de cheveux ! » lance à la journaliste un autre joueur des Twins.
« Ok je peux répondre, mais vraiment une petite minute », acquiesce Julien en enlevant rapidement sa casquette pour dévoiler sa chevelure fraîchement taillée, avant de livrer ses impressions sur le jeu de son collègue, sourire aux lèvres, pendant... plus d’une minute.
AFFICHES, CHANDAILS ET CIRCUITS
Il y a un an presque jour pour jour, Édouard Julien disputait au Target Field de Minneapolis son premier match dans la MLB.
Le « petit » gars de Québec était alors un solide espoir de l’organisation, doté d’un élan digne des ligues majeures, mais aussi d’une défensive à peaufiner.
Douze mois ont passé depuis, et une rapide promenade autour du stade des Twins ne laisse aucun doute : il est un membre à part entière de l’organisation, championne de la section Centrale de l’Américaine l’an dernier.
Sa photo est accrochée à plusieurs poteaux entourant le Target Field. À la boutique officielle, des chandails sur lesquels sont brodés le nom « Julien » et le numéro « 47 » sont bien en évidence, que ce soit en taille junior ou adulte.
Avec 19 circuits, 95 coups sûrs et 40 points produits depuis ses débuts dans les majeures, le Québécois de 24 ans est-il une vedette au sein de cette organisation vieille de plus de 60 ans, qui a vu défiler dans son uniforme les Kirby Puckett et Harmon Killebrew ?
On n’irait pas jusque-là. Du moins, pas encore. Mais une chose est sûre, des journalistes affectés à la couverture de l’équipe constatent que les fans des Twins ont vite adopté « Eddy ».
Un gars « facile à aimer », qui les charme non seulement par son puissant coup de bâton, mais aussi par son côté blagueur, goofy.
Un « bon kid », quoi.
LA CÉLÉBRITÉ ? PEU IMPORTE
Il en faut toutefois plus pour déstabiliser le principal intéressé. Les affiches à son effigie, les partisans qui achètent un chandail à son nom, « ça fait partie de mon emploi », pointe-t-il plus tard au Journal ce jour-là.
La célébrité qui est associée à son rôle, le joueur de deuxième but ne veut manifestement pas en faire trop de cas.
« La seule chose sur laquelle je me concentre, c’est d’essayer d’aider mon équipe. C’est la raison pour laquelle je me rends au terrain chaque jour, pour laquelle je travaille fort », insiste Julien.
Mardi soir, quand Le Journal l’a rencontré au terme du deuxième match d’une série contre les Dodgers de Los Angeles et un certain Shohei Ohtani, personne chez les Twins n’avait vraiment pu aider l’équipe à gagner.
Le Minnesota venait de se faire battre 6 à 3. En ce début de saison, les bâtons tardent à se réchauffer à Minneapolis, et, jusque-là, Julien ne faisait pas exception.
Ce soir-là, il avait été 0 en 4, et sa moyenne en 2024 avait chuté à ,107 après un camp d’entraînement pourtant superbe.
PAS FACILEMENT IMPRESSIONNABLE
Assis à son casier aux côtés de son ami, le vétéran joueur de deuxième but Kyle Farmer – qui, lui, connaît les mots « bonjour » et « fromage » en français –, Julien répondait tranquillement aux questions du Journal en laçant ses souliers, malgré la déception palpable.
De toute évidence, il faut plus qu’un début de saison ardu pour déstabiliser le jeune joueur issu du programme sportétudes en baseball des Canonniers. La plus grande preuve, c’est sans doute ces deux circuits qu’il allait claquer le lendemain (les choses changent vite au baseball !).
L’autre, c’est la confiance qu’il affiche quand on lui demande ce qu’il a appris de cette première année dans les grandes ligues.
Une confiance qu’a aussi évoquée son gérant, Rocco Baldelli, quand on lui a demandé comment il avait vu « Eddy » évoluer au cours des derniers mois.
JUSTE DU BASEBALL
Un Shohei Ohtani au bâton alors qu’il se trouve tout près de son deuxième but ? Ça ne semble pas impressionner Julien le moins du monde et encore moins maintenant « qu’il a affronté presque toutes les équipes de la ligue ».
« Pour moi, c’est juste du baseball. Ce sont les mêmes règlements, peu importe le niveau, insiste-t-il. La seule différence, c’est qu’il y a plus de monde dans les estrades, que les lanceurs sont un peu meilleurs. »
ÊTRE UN MODÈLE
Mais, s’il ne semble pas faire grand cas de sa nouvelle réalité de joueur de la MLB, Julien s’anime quand on lui parle de ces partisans qui attendent les athlètes pour leur faire signer des autographes.
« Souvent, sur les abords du terrain, il y a des jeunes qui attendent, qui arrivent plus tôt. Et c’est pour eux qu’on joue au baseball, pointe-t-il. J’ajouterais même que c’est la raison pour laquelle on a un emploi. »
« La plupart des gens qui regardent les parties, ce sont nos partisans, enchaîne Julien. On est un peu des modèles pour eux. Je crois qu’il faut les avoir à coeur, leur montrer c’est quoi, être une personne. »
Sans le savoir, avec ces deux phrases, Julien a confirmé ce qui faisait de lui un joueur que les partisans des Twins ont vite adopté.
Un « bon kid », comme on nous le disait aux abords de cet immense terrain qui est peu à peu devenu en partie le sien dans la dernière année.