Le Journal de Montreal

Des ressortiss­ants chinois forcés de rentrer au pays

Un nouveau rapport lève le voile, entre autres, sur les menaces de harcèlemen­t

- SARAH-MAUDE LEFEBVRE Bureau d’enquête

Une trentaine de ressortiss­ants chinois au Canada ont été forcés de retourner en Chine après avoir subi du harcèlemen­t de la part d’agents de Pékin ou encore qu’on s’en soit pris carrément à leur famille.

C’est ce que révèle un rapport de l’organisati­on non gouverneme­ntale (ONG) Safeguard Defenders, qui a découvert qu’au moins 12 000 personnes issues de 120 pays ont subi ce sort entre 2014 et 2023, sans qu’on sache s’ils étaient réellement coupables des crimes dont on les accusait.

De ce nombre, l’organisme a réussi à identifier formelleme­nt 283 personnes, dont 27 qui ont été forcées de quitter le Canada, à partir de sources ouvertes du gouverneme­nt chinois.

« Nous croyons qu’il y a plus de cas et de tentatives que cela, c’est certain », affirme la porte-parole de Safeguard Defenders, Laura Harth.

Difficile de déterminer combien de ces 27 cas se sont passés au Québec, mais au moins un des ressortiss­ants forcés de quitter le Canada est arrivé en Chine à partir d’un vol en provenance de Montréal.

JUSQU’AU KIDNAPPING

Au cours de la dernière décennie, la Chine a lancé plusieurs opérations (Fox Hunt, Skynet) visant à retrouver de présumés fugitifs aux quatre coins du monde pour les forcer à revenir faire face à la justice chinoise.

Or, la Chine, rappelle Safeguard Defenders, est un pays connu pour « son absence d’autorité indépendan­te judiciaire et des violations graves, généralisé­es et systématiq­ues des droits de l’Homme ».

Pour arriver à ses fins, la Chine aurait autant recours à l’extraditio­n qu’à des mesures plus extrêmes comme le kidnapping.

Pour les 27 cas identifiés au Canada, des agents chinois auraient utilisé différente­s méthodes pour les « persuader de revenir ».

« Ces méthodes de persuasion […] incluent la surveillan­ce en ligne, les menaces et le harcèlemen­t, la surveillan­ce, des interrogat­oires et des visites répétés à des membres de la famille en Chine, la punition de parents en Chine ou […] le harcèlemen­t de la cible à l’étranger par des agents (non déclarés) de la République populaire de Chine », lit-on dans le rapport.

Les gouverneme­nts doivent être plus proactifs pour que les ressortiss­ants chinois cessent de vivre dans la peur de représaill­es de Pékin, affirme Safeguard Defenders.

BIEN PRÉSENT

« Clairement, on le voit avec l’enquête publique en cours, la conversati­on sur l’ingérence étrangère est commencée au Canada. »

« Mais ce n’est qu’un début […] Il faut identifier ceux qui commettent des actes de répression au Canada. On a vu que des membres de la diaspora ont refusé de participer à l’enquête sur l’ingérence parce qu’ils ne se sentaient pas assez en sécurité pour témoigner. Ça montre à quel point il y a encore beaucoup à faire », affirme Laura Harth.

L’an dernier, Safeguard Defenders a révélé l’existence de présumés « postes de police » chinois dans une cinquantai­ne de pays, qui oeuvrent notamment à traquer des ressortiss­ants et à forcer leur retour en Chine.

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CAPTURE D’ÉCRAN DU COMITÉ SPÉCIAL SUR LES RELATIONS ENTRE LE CANADA ET LA CHINE La porte-parole de Safeguard Defenders, Laura Harth, lors de son passage devant le Comité spécial sur la relation entre le Canada et la Chine, à Ottawa, le 20 mars. Ci-bas, la page couverture du rapport que l’organisati­on a publié aujourd’hui.

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