1,3 G$ versés à des gestionnaires privés
Par rapport à 2020, l’actif net de la Caisse de dépôt en 2023 a aug- menté de 19,7 %. Mais pendant ce temps-là, les coûts de gestion, eux, ont bondi de 52,2
Les coûts de gestion des portefeuilles de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) ont ainsi grimpé à un rythme 2,6 fois plus élevé que l’augmentation de l’actif net sous gestion.
En 2023, la CDPQ a dépensé en coûts de gestion la costaude somme de 2,47 milliards $, soit 845 millions $ de plus qu’en 2020.
LES FRAIS EXTERNES DOUBLENT
Le gros de cette forte dépense additionnelle est attribuable à l’augmentation spectaculaire des frais de gestion que la CDPQ a payés aux gestionnaires externes des placements et fonds privés.
En 2023, la facture des « Frais de gestion externe – Marchés privés et autres fonds » a atteint la mirobolante somme de 1,33 milliard $, à comparer à 647 millions $ en 2020.
On parle donc ici d’une hausse de 679 millions $, soit de 105 %, par rapport à la facture des frais de gestion externe d’il y a quatre ans. Cette hausse de 105 % est quatre fois plus élevée que l’augmentation de l’actif net du « Portefeuille spécialisé Placements privés » entre 2020 et 2023.
À première vue, convenons que ça dépasse l’entendement de voir une telle explosion des frais de gestion externe !
POURQUOI DES GESTIONNAIRES EXTERNES ?
À la fin de décembre 2023, la CDPQ avait à sa disposition 1644 employés, à comparer à 1391 en 2020, soit 18,2 % de plus.
Avec autant de personnel à son service, pourquoi la CDPQ recourt-elle à des gestionnaires externes ?
Parce que, explique-t-elle dans son Rapport annuel, les placements privés et des fonds offerts par des gestionnaires externes de haut niveau lui permettent de diversifier géographiquement ses activités et d’élargir son bassin d’investissement dans des domaines de niche.
Ces gestionnaires externes encaissent deux types de frais, soit des frais de gestion (calculés sur le montant des actifs détenus par le fonds) et des frais de performance (c’est-à-dire des incitatifs payables lorsque les rendements générés excèdent un taux de rendement cible).
CHERCHONS LA LOGIQUE
En 2023, la CDPQ a versé aux gestionnaires externes des placements et fonds privés des frais d’un peu plus de 1,3 milliard $. Rendement obtenu en 2023 ? Une anémique performance de 1,01 % !
Cette facture en 2023 dépasse de 481 millions $ celle de 2022 où les placements privés avaient rapporté un rendement de 2,76 %.
Encore plus étonnant, c’est de voir que la facture 2023 des frais de gestion externe surpasse de 327 millions $ celle de 2021 alors que les placements privés avaient rapporté un époustouflant rendement de 39,16 %.
Il est tout aussi étonnant de constater que la CDPQ a versé en 2023 aux gestionnaires externes 679 millions de plus qu’en 2020, année où les placements privés avaient pourtant bondi de 20,7 % à comparer à seulement 1 % en 2023 !
Il est étonnant de constater que la CDPQ a versé en 2023 aux gestionnaires externes 679 M$ de plus qu’en 2020, année où les placements privés avaient portant bondi de 20,7 % à comparer à seulement 1 % en 2023.
CHARLES ÉMOND SE JUSTIFIE
Appelé à commenter l’explosion des coûts de gestion de 52 % par rapport à 2020, voici la réponse que le PDG de la Caisse, Charles Émond, m’a envoyée :
« La hausse de 52 % (ou environ 800 millions $) entre 2020 et 2023 est facile à expliquer, et provient à environ 90 % (700 M$) des frais de performance.
« Nos placements privés, expliquet-il, ont fait un rendement cumulé de 73 % de 2020 à 2022. C’est une performance historique. On a donc payé des frais de performance en 2023 à certains gestionnaires pour ces années-là (c’est toujours décalé un peu). Et on a aussi vendu quelques investissements qui ont généré le paiement de frais de performance. C’est très rentable pour les déposants lorsqu’on paie ces frais de performance, car ils sont payés suite à des rendements beaucoup plus importants que ces frais. »
LE MOT DE LA FIN
Il n’en demeure pas moins que l’embauche de ces gestionnaires externes de placements et fonds privés coûte très cher à la Caisse.
À preuve, les frais de gestion externe de 1,33 milliard $ que la Caisse leur a versés en 2023 dépassent de 527 millions $ les charges d’exploitation interne (799 M$) que lui coûte son propre personnel de 1644 employés, pour la gestion et l’administration des portefeuilles.
Les gestionnaires des placements et fonds privés ont ainsi accaparé 62 % de tous les frais de gestion que la Caisse a payés en 2023 alors que le « Portefeuille spécialisé des Placements privés » ne représente que 18,5 % de l’actif net de la Caisse.
Faut le faire !