Le Journal de Montreal

1,3 G$ versés à des gestionnai­res privés

- Michel.girard@ quebecorme­dia.com %.

Par rapport à 2020, l’actif net de la Caisse de dépôt en 2023 a aug- menté de 19,7 %. Mais pendant ce temps-là, les coûts de gestion, eux, ont bondi de 52,2

Les coûts de gestion des portefeuil­les de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) ont ainsi grimpé à un rythme 2,6 fois plus élevé que l’augmentati­on de l’actif net sous gestion.

En 2023, la CDPQ a dépensé en coûts de gestion la costaude somme de 2,47 milliards $, soit 845 millions $ de plus qu’en 2020.

LES FRAIS EXTERNES DOUBLENT

Le gros de cette forte dépense additionne­lle est attribuabl­e à l’augmentati­on spectacula­ire des frais de gestion que la CDPQ a payés aux gestionnai­res externes des placements et fonds privés.

En 2023, la facture des « Frais de gestion externe – Marchés privés et autres fonds » a atteint la mirobolant­e somme de 1,33 milliard $, à comparer à 647 millions $ en 2020.

On parle donc ici d’une hausse de 679 millions $, soit de 105 %, par rapport à la facture des frais de gestion externe d’il y a quatre ans. Cette hausse de 105 % est quatre fois plus élevée que l’augmentati­on de l’actif net du « Portefeuil­le spécialisé Placements privés » entre 2020 et 2023.

À première vue, convenons que ça dépasse l’entendemen­t de voir une telle explosion des frais de gestion externe !

POURQUOI DES GESTIONNAI­RES EXTERNES ?

À la fin de décembre 2023, la CDPQ avait à sa dispositio­n 1644 employés, à comparer à 1391 en 2020, soit 18,2 % de plus.

Avec autant de personnel à son service, pourquoi la CDPQ recourt-elle à des gestionnai­res externes ?

Parce que, explique-t-elle dans son Rapport annuel, les placements privés et des fonds offerts par des gestionnai­res externes de haut niveau lui permettent de diversifie­r géographiq­uement ses activités et d’élargir son bassin d’investisse­ment dans des domaines de niche.

Ces gestionnai­res externes encaissent deux types de frais, soit des frais de gestion (calculés sur le montant des actifs détenus par le fonds) et des frais de performanc­e (c’est-à-dire des incitatifs payables lorsque les rendements générés excèdent un taux de rendement cible).

CHERCHONS LA LOGIQUE

En 2023, la CDPQ a versé aux gestionnai­res externes des placements et fonds privés des frais d’un peu plus de 1,3 milliard $. Rendement obtenu en 2023 ? Une anémique performanc­e de 1,01 % !

Cette facture en 2023 dépasse de 481 millions $ celle de 2022 où les placements privés avaient rapporté un rendement de 2,76 %.

Encore plus étonnant, c’est de voir que la facture 2023 des frais de gestion externe surpasse de 327 millions $ celle de 2021 alors que les placements privés avaient rapporté un époustoufl­ant rendement de 39,16 %.

Il est tout aussi étonnant de constater que la CDPQ a versé en 2023 aux gestionnai­res externes 679 millions de plus qu’en 2020, année où les placements privés avaient pourtant bondi de 20,7 % à comparer à seulement 1 % en 2023 !

Il est étonnant de constater que la CDPQ a versé en 2023 aux gestionnai­res externes 679 M$ de plus qu’en 2020, année où les placements privés avaient portant bondi de 20,7 % à comparer à seulement 1 % en 2023.

CHARLES ÉMOND SE JUSTIFIE

Appelé à commenter l’explosion des coûts de gestion de 52 % par rapport à 2020, voici la réponse que le PDG de la Caisse, Charles Émond, m’a envoyée :

« La hausse de 52 % (ou environ 800 millions $) entre 2020 et 2023 est facile à expliquer, et provient à environ 90 % (700 M$) des frais de performanc­e.

« Nos placements privés, expliquet-il, ont fait un rendement cumulé de 73 % de 2020 à 2022. C’est une performanc­e historique. On a donc payé des frais de performanc­e en 2023 à certains gestionnai­res pour ces années-là (c’est toujours décalé un peu). Et on a aussi vendu quelques investisse­ments qui ont généré le paiement de frais de performanc­e. C’est très rentable pour les déposants lorsqu’on paie ces frais de performanc­e, car ils sont payés suite à des rendements beaucoup plus importants que ces frais. »

LE MOT DE LA FIN

Il n’en demeure pas moins que l’embauche de ces gestionnai­res externes de placements et fonds privés coûte très cher à la Caisse.

À preuve, les frais de gestion externe de 1,33 milliard $ que la Caisse leur a versés en 2023 dépassent de 527 millions $ les charges d’exploitati­on interne (799 M$) que lui coûte son propre personnel de 1644 employés, pour la gestion et l’administra­tion des portefeuil­les.

Les gestionnai­res des placements et fonds privés ont ainsi accaparé 62 % de tous les frais de gestion que la Caisse a payés en 2023 alors que le « Portefeuil­le spécialisé des Placements privés » ne représente que 18,5 % de l’actif net de la Caisse.

Faut le faire !

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PHOTO D’ARCHIVES Charles Émond, PDG de la Caisse de dépôt et placement du Québec, en février dernier lors de la présentati­on des résultats financiers de 2023.

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