Le Journal de Montreal

Le Canada cherche à effacer le peuple québécois

Ils sont nombreux, parmi les commentate­urs, à avoir tiqué lorsque Paul St-Pierre Plamondon, le chef du Parti Québécois, a affirmé qu’Ottawa travaillai­t consciemme­nt à l’effacement du peuple québécois.

- Sociologue, auteur et chroniqueu­r

Certains d’entre eux ont pris un air outré : comment peut-on imaginer une chose pareille ? Ils accusent même le chef péquiste de « jouer avec les peurs », sans se demander si la peur de disparaîtr­e comme peuple est fondée. Pourtant, c’est la simple vérité. L’idéal d’Ottawa est aisé à comprendre : il voudrait que la population québécoise cesse de se percevoir comme un peuple, comme une nation. Ottawa voudrait que les Québécois se voient d’abord comme des Canadiens du Québec.

EFFACEMENT

Certes, ils auraient une forme d’originalit­é régionale, mais elle ne se vivrait plus comme une identité nationale, mais comme une différence culturelle secondaire, presque folkloriqu­e.

Ottawa veut réduire à néant le contenu politique de l’identité québécoise, qui pousse les Québécois à se voir comme une nation à part entière, même si pour l’instant, ils ont vécu leur existence politique dans la fédération.

Dès lors, Ottawa prend les moyens pour cela : il mise sur l’immigratio­n massive, pour réduire le poids de la majorité historique francophon­e, et créer un bassin d’électeurs qui lui seront fidèles, quelles que soient les circonstan­ces, et qui serviront de minorité de blocage, dans l’éventualit­é d’un prochain référendum.

Ottawa mise sur le multicultu­ralisme d’État, qui fait des Québécois francophon­es une communauté parmi d’autres dans une société plurielle.

Il mise sur un fédéralism­e impérial, qui s’ingère dans toutes les compétence­s du Québec.

Il mise sur un système médiatique agressif, qui assimile toute affirmatio­n du peuple québécois à une forme de suprémacis­me ethnique.

Il finance des groupes idéologiqu­es anglophone­s radicaux, qui contestent devant les tribunaux les lois démocratiq­uement adoptées au Québec.

Faut-il rappeler qu’Ottawa n’a pas hésité, non plus, à nous imposer en 1982 une constituti­on qui diminuait les pouvoirs de l’Assemblée nationale et que nous n’avons toujours pas signée ?

Ottawa, pour nous faire accepter cela, mise sur une partie des élites francophon­es dont les privilèges sociaux dépendent de leur capacité à faire accepter aux Québécois leur enfermemen­t dans le cadre fédéral. Elles feront tout pour diaboliser les nationalis­tes.

On me dira : nul ne fait le mal volontaire­ment.

Certes. C’est pourquoi Ottawa présente cette entreprise comme un projet d’émancipati­on de la population du Québec, qu’il faudrait protéger des nationalis­tes voulant les enfermer dans une conception tribale et régressive de l’identité.

Les Québécois, laissés à eux-mêmes et aux méchants nationalis­tes identitair­es qui les enfermerai­ent dans la peur, seraient condamnés à une existence rapetissée.

TRUDEAU

Mais en embrassant pleinement le Canada, ils sortiront du provincial­isme.

Évidemment, ils sacrifiero­nt en chemin leur langue – Justin Trudeau est le prototype du Québécois « canadianis­é » et on voit bien que cet homme, en plus de massacrer le français, pense en anglais.

On y revient : le Canada cherche à effacer politiquem­ent la nation québécoise.

Dire le contraire, c’est se couper du réel. C’est la mauvaise habitude, j’en conviens, d’une bonne partie du commentari­at.

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Paul St-Pierre Plamondon, chef du Parti Québécois

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