Le Journal de Montreal

Cet oiseau qui n’est plus le dindon de la farce

- Chronique patrick.campeau @quebecorme­dia.com

Aux endroits où il y a beaucoup de pression de chasse et de pêche, on dit que les espèces ciblées deviennent éduquées, conditionn­ées et méfiantes.

Il est possible de prélever des dindons sauvages, au printemps, depuis 2008. Il s’agit donc de la 17e saison régulière où l’on peut se lancer aux trousses de ces grands gallinacés.

Les quelque 23 000 amateurs qui feront l’acquisitio­n de leur permis pourront tenter de prélever les grands oiseaux porteurs d’une barbe au fusil, à l’arme à chargement par la bouche ou la culasse, à l’arbalète et à l’arc. La saison de chasse se déroulera en avant-midi, du 26 avril au 20 mai, dans les zones 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 26 et 27 ou bien du 26 avril au 7 mai, dans les zones 2, 12, 13 et 15.

Au printemps, il est permis de récolter deux dindons sauvages porteurs d’une barbe. Il faut toutefois savoir et retenir que le deuxième spécimen doit obligatoir­ement provenir des zones 4, 5, 6, 7, 8, 9 ou 10.

Un spécialist­e

Pierre Roy, de Rougemont, pourchasse les gallinacés depuis plus de 15 ans. Il est formateur multidisci­plinaire et conférenci­er et il a même publié quelques vidéos sur le sujet, sur YouTube. Bref, il les connaît, ces grands gibiers ailés.

Comme cet expert me l’expliquait, il faut réaliser qu’il y a de plus en plus d’adeptes. Ils se sont ajustés, ils ont appris et ils ont évolué face à cette chasse. En contrepart­ie, il est évident que les dindons eux aussi se sont adaptés à la présence des nemrods. Plusieurs connaisseu­rs affirment qu’ils sont maintenant beaucoup plus éduqués.

Par exemple, si autrefois il était possible de récolter un beau Tom en ne faisant que des cris de femelle prête à l’accoupleme­nt, appelés yelps, de nos jours, cette technique générera de maigres résultats si vous souhaitez intercepte­r un mâle dominant, surtout si vous chassez en terrain connu, soit aux mêmes endroits depuis maintes années.

Trucs et astuces

Face à ce constat, M. Roy suggère d’ajuster vos approches pour faire face aux nouvelles réalités sur le terrain. Voici l’essentiel de ses conseils.

Il est important de prospecter afin de pouvoir clairement identifier le sexe, puis la maturité des mâles présents et le lieu où ils vont se percher pour la nuit. Ces informatio­ns seront des atouts précieux pour la planificat­ion de votre stratégie matinale, entre autres en matière d’appelants à installer et d’appels à prioriser au petit matin.

Votre approche matinale devra être encore plus minutieuse qu’auparavant. Il faut arriver tôt, très tôt, tout en évitant de faire du bruit et d’utiliser une lumière. Vous devrez passer inaperçu et n’éveiller aucun soupçon auprès des oiseaux. Si vous avez des appelants à mettre, déposez-les lentement et retournez dans votre tente. Chasser sans decoy est possible, mais les bordures de champ ne sont pas les emplacemen­ts idéaux pour cette technique. Optez plutôt pour une lisière au bord du bois ou une éclaircie. En milieu boisé, l’approche des dindons est plus lente, car ils vous cherchent tout en se déplaçant.

Les appels

Appeler trop tôt est une erreur commune. Selon Pierre Roy, il faut attendre que les oiseaux soient descendus de leur arbre avant d’entreprend­re les appels continus. À force de les entendre dialoguer sans arrêt lorsqu’ils sont perchés, il est évident que l’envie de leur répondre est fort tentante. Soyez patient : généraleme­nt, les oiseaux dominants vont descendre en dernier, vous aurez alors de meilleures chances de les récolter.

Face à des dindons « éduqués », votre marge d’erreur dans l’exécution de vos appels est presque nulle. Le yelp est encore bon, et il le sera toujours, mais la façon de l’exécuter, sa tonalité et son amplitude seront toutes des facteurs à considérer en fonction de la situation qui prévaut devant vous. Assurément, vous devrez aussi l’attirer en effectuant aléatoirem­ent des appels en douceur de purr, de cut, de cluck, voire du grattage des feuilles au sol. Les cris agressifs ou de femelles excitées demeurent des options plausibles ; encore une fois, c’est le scénario qui se dresse devant qui vous dictera le bon choix.

Le type d’appels

Vos dindons répondent, mais, rien à faire, ils n’approchent pas ou ils demeurent en retrait à de très longues distances. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce genre de situations.

Si vous utilisez toujours les mêmes appeaux, sachez qu’il est prouvé que les dindons ont une mémoire auditive à vie et que, dans certains cas, ils sont en mesure de reconnaîtr­e vos sons. Changez de call, vous éveillerez ainsi peut-être un nouvel intérêt.

Si vous faites vos appels toujours de la même manière avec votre appeau, modifiez la façon dont vous l’utilisez et tentez de produire de nouveaux sons et tonalités. Vous pourrez ainsi déjouer leur mémoire active en changeant votre approche.

Lorsqu’ils sont en visuel, mais qu’ils ne veulent pas approcher, c’est peut-être parce qu’ils ne souhaitent pas confronter vos appelants. Aussi beaux et d’allures

réelles que soient ces derniers, leur utilisatio­n peut s’avérer néfaste. Si cela semble le cas, délaissez-les et exploitez un autre racoin de votre secteur le lendemain matin.

Approche

Lors de votre prospectio­n, si vous trouvez les dortoirs principaux à proximité de beaux gros arbres matures, sous lesquels on retrouve des amoncellem­ents de fientes, vous pouvez y installer votre poste d’affût à un minimum de 100 mètres de distance. Attendez toutefois que les dindons soient loin de leur secteur de repos nocturne pour ne pas les alerter.

Il ne faut jamais oublier qu’ils ont une acuité visuelle exceptionn­elle. Les moindres faux mouvements seront très rapidement détectés et leur réaction sera instantané­e et sans retour. Il faut faire attention aux reflets de votre visage et de vos lunettes, aux gestes brusques lorsque vous vous apprêtez à tirer et aux autres dindons du groupe qui pourraient vous observer et sonner l’alarme.

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PHOTO FOURNIE PAR PATRICK CAMPEAU Avec le temps, les dindons ont appris et compris plusieurs de nos stratagème­s ; il vous faut donc être plus rusé qu’eux. La qualité de vos succès de chasse reflétera celle de votre adaptation, rappelle Pierre Roy, qui pourchasse les gallinacés depuis plus de 15 ans.

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