Le Journal de Montreal

La victoire du hockey féminin

- Marc.defoy@quebecorme­dia.com

Il y aura eu au moins un match où régnait une ambiance des séries éliminatoi­res au Centre Bell cette année. La rencontre entre les formations montréalai­se et torontoise de la Ligue profession­nelle de hockey féminin présentée samedi après-midi a été comme prévu un grand succès.

Le record de la plus grosse foule pour du hockey féminin a été atteint. Ils étaient 21 105 spectateur­s comme pour les matchs du Canadien.

Jeunes et moins jeunes ont festoyé du début à la fin de l’événement.

C’en était hallucinan­t par moments !

Lors de la présentati­on des joueuses, Marie-Philip Poulin a reçu le genre d’ovation que les Québécois réservent à leurs plus grands héros sportifs.

On frissonnai­t avec elle ! Marie-Philip n’en revenait toujours pas après la rencontre.

« Ç’a rentré ! » a-t-elle dit en parlant de l’ovation.

« C’est un moment que je n’oublierai jamais. »

Celles et ceux qui en ont été témoins non plus.

Ça s’inscrit dans les beaux moments du sport québécois.

UNE GRANDE COMMUNION

L’atmosphère qui enveloppe les matchs de hockey féminin est tout à fait particuliè­re. On dirait une grande communion. On sent que les amateurs sont solidaires des joueuses dans leur cause. Ils sont de tout coeur avec elles.

Tout le monde suit le jeu avec intérêt, tout le monde sourit, tout le monde s’amuse.

Le seul moment de silence est survenu lorsque Sarah Nurse a donné la victoire aux Torontoise­s en prolongati­on. Mais les spectateur­s ont vite surmonté leur déception. Ils se sont levés pour applaudir les joueuses des deux équipes alors qu’elles se donnaient la main.

Puis les joueuses de Montréal ont eu droit à leur moment avec leurs partisans qui semblaient leur dire : « Ce n’est pas grave que vous ayez perdu. On a apprécié vos efforts et votre travail et on sera encore là pour vous soutenir la prochaine fois. »

Si le succès rapide de la LPHF a de quoi étonner, Marie-Philip Poulin, elle, se dit aucunement surprise.

« On croyait à notre produit depuis plusieurs années », a-t-elle affirmé.

« Ça va juste grandir », a-t-elle ajouté sur un ton sûr.

L’IMPACT DES RÉSEAUX SOCIAUX

Mais où étaient donc tous ces gens avant la naissance de la LPHF ?

C’est la question que je me suis posée en regardant les gradins bondés.

La réponse est qu’on vit dans un monde différent de celui où le hockey féminin peinait à attirer les foules. La LPHF met l’accent sur les réseaux sociaux pour rejoindre les familles et les jeunes.

Le prix des billets est évidemment un facteur dont il faut tenir compte. Pas besoin d’un prêt bancaire pour se procurer un abonnement de saison.

Enfin, il est impératif que le spectacle vaille le déplacemen­t.

Frank Brown, qui est consultant aux communicat­ions pour la ligue, apporte un point de vue intéressan­t.

« Les joueurs de la Ligue nationale sont tellement gros, tellement forts et tellement rapides que les dimensions de la patinoire ne leur conviennen­t plus », explique-t-il

« Avec les filles, on voit davantage le hockey qui se pratiquait dans les années 1970 et 1980. »

Je connais Frank depuis une quarantain­e d’années. Il a longtemps fait partie du monde de la Ligue nationale.

D’abord à titre de journalist­e affecté à la couverture des Rangers pour l’Associated Press puis le Daily News. Il lui arrivait même de se transforme­r en gardien de but lors des séances d’entraîneme­nt des Rangers.

Je l’ai vu faire au Forum. Il se débrouilla­it bien.

De journalist­e, il est devenu attaché de presse de Gary Bettman, poste qu’il a occupé plusieurs années.

LA PROPHÉTIE D’HAZEL MCCALLION

Le bonhomme n’a pas hésité lorsque la LPHF l’a approché. Son travail le passionne. Il transporte dans sa valise de travail un livre intitulé Proud Past, Bright Future (Glorieux passé, brillant avenir). L’ouvrage signé par Brian MacFarlane, ancien animateur à Hockey Night in Canada, traite de la longue histoire du hockey féminin.

On retrouve en page couverture une photo très ancienne où des femmes vêtues de longues jupes et coiffées de longues tuques s’affrontent sur une surface extérieure.

Dans un chapitre, on y retrouve une prophétie d’Hazel McCallion, Gaspésienn­e d’origine née à Port-Daniel– Gascons, qui a été une des premières femmes à jouer au hockey au Canada.

« Je pense que dans 15 à 20 ans, il existera une ligue de hockey profession­nel féminin », dit-elle.

« Ces femmes talentueus­es que nous voyons sur la glace sont en fait des athlètes profession­nelles. »

Il aura fallu plus de temps. La prédiction de Mme McCallion est devenue réalité 30 ans après la sortie du livre (1994). Décédée l’an dernier à l’âge vénérable de 101 ans, la dame qui a été mairesse de Mississaug­a, en banlieue de Toronto, pendant près de 36 ans, serait fière de voir les succès de la LPHF.

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 ?? PHOTO MARTIN ALARIE ?? La gardienne de Toronto Kristen Campbell a étiré la jambière pour frustrer l’attaquante de Montréal Laura Stacey sous les yeux de Sarah Nurse lors du match de samedi, au Centre Bell.
PHOTO MARTIN ALARIE La gardienne de Toronto Kristen Campbell a étiré la jambière pour frustrer l’attaquante de Montréal Laura Stacey sous les yeux de Sarah Nurse lors du match de samedi, au Centre Bell.

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